(Du Torrentiel au croissant de lune, herméneutique 9)
Envoyé par le Torrentiel, le 28 février à 16h12
Mon cher croissant de lune,
Je suis en train de publier tes messages, décryptages et chroniques, et je ne sais pas comment je suis passé à côté de celle du 20 février, dont je suis pourtant certain d'avoir lu le début ; mais comme tu y mettais en cause avec beaucoup de véhémence le patriarche Chénouda III auquel je suis attaché parce qu'il est mon correligionnaire et pour l'amour de mes amis coptes, j'ai dû ne pas pouvoir en lire plus long. Je vais t'y répondre succintement à ce que j'en tiens pour les points principaux.
Préalablement aux quelques éléments de réponse qui vont suivre, transmets à ta femme et à sa fille mes félicitations pour la naissance de ces deux jumelles, dont tu te trouves être le grand-père par alliance. Je te félicite aussi pour en porter la responsabilité dans ton sein paternel par alliance.
Mais revenons-en à nos échanges plus traditionellement politicoreligieux. Tout d'abord, tu fais état de la lâcheté
de certains savants qui assurent qu'on ne doit pas "sortir contre les rois du temps", et tu ajoutes que l'attitude du patriarche ressemble à celle de ces savants. Il faut te répondre que cette attitude est fondée en christianisme sur un verset de Saint-Paul qui, souhaitant que lui soit intenté un procès en sa qualité de citoyen romain, enjoint les fidèles de "respecter les autorités de l'Etat", car "tout pouvoir vient de Dieu", dit un autre verset : "Tu n'aurais sur moi aucun pouvoir si tu ne l'avais reçu d'En Haut", précise le christ à Pilate. Cette dernière précision permet de sortir de l'ambiguïté : un pouvoir est forcément permis par dieu, puisque rien de ce qui a lieu sous le ciel ne saurait avoir lieu sans Sa permission, ce qui ne vaut pas forcément approbation. Je reconnais que c'est là une distinction bien casuistique et que le christianisme a pu s'attirer la réprobation des "esprits clairs", parce qu'il manifeste dès l'origine un goût tout à fait spécial pour ce genre de raisonnements spécieux. Il en va de même de sa condamnation de l'esclavage, jamais prononcée sous une forme qui ne souffre pas la discussion. Saint-Paul renvoie Onésime à Philémon pour qu'il l'affranchisse par un acte libre de sa volonté. Sans doute, ne trouvait-il pas tactique de dénoncer carrément l'esclavage alors qu'il était l'un des constituants manouvriers de la cité antique et singulièrement de l'Empire romain ! La religion ne doit pas toujours chercher à se rallier les habiles. D'autant qu'à se rallier les habiles, il est probable que l'on entre dans un esprit général de ralliement à l'injustice sous des prétextes qui ne visent en réalité que la défense de ses intérêts personnels. C'est ainsi que Léon XIII a exigé des partis catholiques qu'ils se rallient à la très anticléricale troisième République pour obtenir qu'elle le soutienne dans sa volonté de récupérer ses etats pontificaux. Dans le cas d'espèce du "pape" des Coptes, a-t-il été sensible au fait qu'Hosni Moubarak était l'époux d'une de ses fidèles ? A-t-il voulu rester fidèle à l'enseignement de saint-Paul dans la lignée des savants d'outre-egypte qui ne voulaient pas que l'on sortît contre les "rois du temps" ? A-t-il craint qu'un régime issu d'une révolution ne fragilise la situation déjà précaire des fidèles dont il avait la charge ? A-t-il voulu préserver tels de ses intérêts privés ? Je ne saurais te le dire, ne connaissant pas ces intérêts. Il est cependant indéniable qu'un pays franc, libre et souverain ne saurait tolérer que le patriarche d'une religion minoritaire, même s'il lui est légitime de rechercher une certaine sécurité qu'elle n'obtient visiblement pas de l'Etat, dispose d'une police parallèle. De même que je suis à peu près de ton avis sur la réserve que devraient garder des autorités religieuses en matière de prononciamento électoraliste. Bien qu'il fasse quelquefois bon savoir qui pense quoi. Mais ces avis ne devraient pas valoir injonctions. Du reste, l'immiction des autorités religieuses dans la chose politique dessert la religion. On reproche à juste titre à l'épiscopat français de tenir un discours dont la teneur spirituelle est relativement faible, tandis que les évêques de france ne cessent de décrire une société, qu'ils ne connaissent que de l'observer à travers des visites officielles, qui ressemblent à celles des ministres, dans des églises ou des usines, ou d'en recevoir des notes qu'ils commandent à des sociologues. Nos évêques sociologues sont incapables de produire un discours spirituel consistant, sont pour partie responsable du creux de la vague spirituel et de notre dépression chrétienne européenne. Il est vrai que la spiritualité innerve de manière hollistique, comme tu dirais avec d'autres, sans séparation dissociatrice, toute la vie d'un individu. Pour autant, le discours d'un chef religieux doit être "spirituel d'abord". Le sens religieux inné des fidèles ne s'y trompe pas, qui n'ont ni suivi les savants que tu incrimines, et qui ont participé au soulèvement égyptien pour les coptes, jusqu'à faire de leurs corps un cordon sanitaire pour leurs compatriotes en prière, comme nous autres, catholiques, ne suivons pas toujours notre pape infaillible, quand il nous donne l'impression d'errer. Et nous sommes fondés à agir de la sorte, puisque l'un des premiers mots que dit le premier pape, Saint-Pierre en l'occurrence au début de son discours après la Pentecôte, fut celui-ci :
"Ne faut-il pas obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes" ?
Les coptes ont participé à la révolution égyptienne. C'est cet aspect de la coexistence religieuse qui me paraît plus important à regarder que les anathèmes des savants ou le conservatisme patriarcal d'un chef religieux qui est aussi, malheureusement, celui d'une police, j'en demande pardon à dieu pour lui si ces rumeurs se confirment et sont fondées.
Faisons à ton invitation une incursion dans les domaines politique et économique avant de revenir plus loin au domaine religieux qui est décidément celui, par cloisonnement peut-être, mais aussi parce que j'ai une foi à transporter les montagnes (il faut avoir une foi à transporter les montagnes et une charité à consoler et soutenir le monde), où je me sens le plus à l'aise. Tu dis que l'"ennemi" (pour toi, c'est l'etat juif) aurait exigé que, quelque régime qui succède à celui de Moubarak, il ne soit pas question pour l'egypte de revenir sur sa signature des accords de camp david. J'applaudis tout d'abord à la pragmatique de ta proposition de "lecture minimaliste" du traité. Je n'ignore pas que, pour toi, cette "lecture miniimaliste" n'est qu'un premier pas, mais tout refus de la "politique du pire" est un acte de bonne volonté qui vise, si ce n'est à empêcher un état de guerre, à ne la faire que chacun n'ait refait ses forces. En droit, je précise que je ne vois pas ce qui empêcherait un pays souverain de dénoncer un Traité qu'il trouve injuste. Nous pourrions même affiner l'analyse en disant que, par exemple, si, du point de vue du droit constitutionnel français, le Président de la république est le garant de la continuité de l'etat et du respect des traités, ceci ne vaut que dans le cas précis où il n'y a pas de changement de régime, le régime suivant étant parfaitement libre d'attribuer d'autres prérogatives au Président de la République, voire de supprimer cette fonction si elle ne lui paraît plus nécessaire. Il n'y a pas un tel caractère d'irréversibilité dans la signature des Traités qu'il doive en résulter le sentiment que le respect d'un Traité oblige un Etat à échapper à son histoire. Qu'en est-il de celui de camp David ? Le fait est qu'au jour où j'écris ces lignes, il n'a pas été dénoncé, mais qu'il a même été réaffirmé par le maréchal Tantaoui. Ici, une question se pose : à quel point ce traité s'est-il révélé un objet d'opprobre essentiel à la destitution du régime dont Moubarak était le représentant principal ? Il semble que les manifestants aient peu insisté sur l'importance de le dénoncer prioritairement ou en tout état de cause. Mais je ne me cache pas que, proférant cette remarque, je suis loin d'être au fait de tous les slogans qui ont été scandés sur la place Tahrir, notamment parce que la règle du jeu d'une information sélective fait que je reçois depuis la France des informations filtrées. Ensuite, les accords de camp david sont littéralement un accord de cesser-le-feu. Qu'avec la complicité d'un régime favorable à Israël (j'emploie ce mot de "complicité" pour adopter ton point de vue, le temps de l'analyse), cet accord de cesser-le-feu se soit étendu à une coopération économique, ce n'est qu'un avatar de relations internationales érigées indépendamment de la volonté des peuples. Cette coopération doit-elle continuer, doit-elle cesser ? C'est aux deux parties, c'est-à-dire en définitive aux deux peuples, d'en décider. La réponse n'est pas obligatoirement aussi certainement négative qu'on peut le supposer vu d'ici. Il y a pourtant de fortes présomptions qu'elle le soit, prenons-en acte, du moins qu'elle le soit à long terme, si la sensation de chantage continue d'être donnée à un peuple souverain, et d'échanges sous surveillance, quasi obligatoires, attentatoires à la souveraineté d'une des parties, ici, clairement, de l'Egypte. L'important est de sauvegarder l'essentiel. Or quel est l'essentiel ? A mon avis, trois choses : le cesser-le-feu bien sûr ; mais aussi la fin du blocus de Gaza et la libre circulation à tout pays auquel l'Etat souverain d'Egypte le permettra, si possible à tous les pays, moyennant des droits de douane qu'il appartient à l'egypte de fixer, des eaux du canal de Suez. Donc c'est plutôt une bonne nouvelle que l'Iran ait retrouvé le droit d'y circuler. Ce serait aussi une bonne nouvelle si un arrangement pouvait se trouver avec Israël.
Je développerai le même genre de théories au sujet de la relative tranquillité qui est laissée à Moubarak, réfugié dans sa résidence de Charm El-sheikh. A la limite, aurais-je envie de dire, que retirerait-on de bon à ce qu'il soit recherché, jugé et condamné ? Je sais bien que les révolutions ne s'estiment pas faites qu'elle n'aient satisfait à ces sortes de vengeance. Mais ces sortes de vengeances s'avèrent par la suite être la malédiction de ces révolutions. D'une toute autre ampleur est la restitution par l'Union européenne des avoirs qu'elle aurait injustement accaparés sur les biens de "l'Egypte longue". Cette restitution est morale, elle ne fait, comme on dit, acception de personne, et c'est en quoi on doit l'encourager. D'autre part, elle paie une dette matérielle réelle et quantifiable et non pas un dommage morale que, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, on n'a cessé de chercher à quantifier financièrement pour réparer l'irréparable. Réparer en argent du mal moral obéit à des motifs qui ont bien peu de rapport avec le dommage dont on se propose de compenser le préjudice, que ceci, qui finit par s'assimiler à un rackett, soit fait depuis plus de soixante ans par Israël envers l'Allemagne ou par l'algérie envers la France. Morale, parce que matérielle, est la restitution des biens juifs injustement captés pendant la guerre, mais immorale est la compensation par le fait qu'on abonde un etat en l'alimentant financièrement jusqu'à lui permettre d'exister et à se faire grenouille qui veut devenir plus grosse que le boeuf. Je porte la même condamnation envers l'algérie qui, jamais, ne fait le solde des bénéfices et des pillages faits pendant la période coloniale et qui, non pas sous bénéfice d'inventaire, mais contre toute volonté d'inventorier, exige de la france, au nom de la repentance, qu'elle finance au titre des réparations un Etat qui n'est même pas gouverné en bonne police financière, telle que l'argent qu'on lui donne soit redistribué à une population qui ne soit pas obligée d'avoir, pour seul horizon d'espoir, le désir de quitter un pays, le sien, qui ne lui est plus hospitalier, tout comme est condamnée au désoeuvrement et à l'oisiveté, me dis-tu, mais c'est également vrai de l'Europe, la jeunesse de l'"Egypte longue", qui a dans ses traditions d'avoir, depuis ce qu'on pourrait appeler la nuit des temps de l'humanité, su cultiver son oasis. Je ne sais pas s'il faut que je souhaite avec toi à l'"egypte longue" qu'elle montre au reste du monde que le travail doit devenir arabe. Je dirai, sans vouloir te blesser, mais au sens où ce mot désignant le caractère immémorial de l'egypte, pourrait faire consensus si personne n'essayait de le confisquer, que je souhaite à l'"egypte longue" que le travail y redevienne copte, égyptien, populaire, national, au sens non plébéien, mais pas non plus réductible à la dimension islamique de la société et de la nation. Car si tu ne souhaites au travail que de redevenir arabe, tu introduis une sélectivité racialiste dont le devoir de tout membre de l'espèce humaine qui prétend lutter contre le racisme, doit prémunir ceux qui ont même dignité d'homme, d'où que vienne la propension ou la prétention à la domination ou à l'exemplarité. Tant qu'à anticiper sur un point la réponse que je voulais te faire dans ma missive qui en sera écourtée de cette phrase, ce qui n'est pas du luxe, crois-moi, "les lumières" n'ont pas, comme tu le dis, été seulement une réaction contre l'obscurantisme chrétien. N'oublie pas que voltaire a également intitulé l'une de ses pièces hautement controversées, au point que certaines ligues musulmanes ont voulu interdire qu'on l'étudie en classe et en France : "Mahomed ou le fanatisme". Le racialisme arabe est une forme de fanatisme, comme toutes les prétentions à la supériorité de quelque modèle socioreligieux que ce soit, le modèle chrétien compris, mettons-nous bien d'accord. De mauvais esprits ont récemment avancé que l'islam évoluait constamment entre fanatisme et fatalisme. Peut-être est-il en train de nous montrer une troisième voie qui est plus fidèle à ce qu'il a souhaité faire originellement et que les péripéties d'une histoire qui l'a obligé d'être chassé dès la période meckoise du prophète l'ont empêché de réaliser. L'occidental tiendra toujours pour une propension au fanatisme dont il se méfiera le désir de faire payer au corrompu ses méfaits et captations. Je ne te dis pas que l'occidental ne connaisse pas ces désirs de se faire justice à lui-même, les temps révolutionnaires ont assez prouvé qu'il n'en était pas avare, et cela est allé jusqu'à la terreur, qui a non seulement été une épuration aristocratique, mais une épuration idéologique. Du moins, si l'on remonte aux principes, le christianisme, en remettant le jugement à la vie future et en stipulant qu'on s'en remette à Dieu pour la vengeance, afin de calmer les nerfs et les instincts des vindicatifs qui voudraient comprendre pourquoi il n'y a pas une rétribution des actes en ce monde, calme-t-il ces ardeurs. Ou, s'il ne les calme pas, au moins ne les encourage-t-il pas. Je t'entends d'ici me répondre que, par les lois de l'injonction contradictoire, en réprimant le juste désir de vengeance, il l'exacerbe au contraire. Il y a une vérité dans ce paradoxe dont tu aimes à m'accabler. L'homme est un tissu de paradoxe et, comme j'aime à le dire, entre le paradis et le paradoxe, il y a même parenté de radical. D'une certaine manière, il est radical de situer le paradis dans le paradoxe. Jeu de mots ? Pas seulement. Rien n'est simple. Nous avons, dans nos analyses, à essayer de concilier deux choses : juger l'idéalité du principe aux fruits qu'il produit réellement ; mais aussi savoir que c'est de l'origine que se tirent les conséquences. De ce second fait, une injonction d'amour ne peut, que par une perversion opérée par la nature humaine sur l'origine du précepte qui lui est adressé, dégénérer d'une injonction d'amour universel en guerre totale. Seulement, j'ai beau te parler de l'amour universel, je ne suis pas sans constater que, souvent, je m'envenime, tandis que tu me supplies de t'aimer et que, pour m'y encourager, tu m'adresses des imprécations. Je t'en adresse en retour tout en t'exhortant à ne pas céder à l'esprit de vengeance. Paradoxe !
Mais je ne peux laisser passer par exemple, sauf à le mettre sur le compte d'un certain fanatisme, que tu me contestes le droit de pleurer l'horrible massacre, par égorgement, nous y revoilà, d'un prêtre polonais dont tu me dis qu'il faut attendre l'enquête, pourquoi ? Pour savoir s'il n'a pas mérité son sort ? S'il ne l'a pas mérité parce qu'il était pédophile ? Tu le supposes pédophile ; une chose est certaine: c'est qu'il est mort égorgé. J'attends de pied ferme et l'esprit aux aguets ton article sur l'injonction d'amour universel qui se châtre au point de provoquer un excès de dépravation dans nos moeurs chrétiennes. Si tel est à peu près le fond de ce futur article, je ne puis qu'en approuver la substance. Mais en attendant, tu ne veux pas que je m'émeuve de faits, en regard desquels tu me proposes des soupçons. Que je m'en émeuve signifie-t-il que, définitivement, pour un chrétien, la vie d'un chrétien a plus d'importance que celle d'un autre homme ? Définitivement non, Croissant de lune, où prends-tu cela ? Le chrétien n'a pas dans ses gènes je ne sais quelle élection personnelle qui le ferait représentant de l'humanité. Pour le chrétien, il n'y a qu'un seul représentant de l'humanité qui est en même temps "le fils de l'homme" (bien avant qu'il soit déclaré, à la suite d'intuitions platoniciennes préchrétiennes, le Fils de Dieu). Ce seul Représentant de l'humanité qui accomplit le type de l'homme parfait, comme le fait à tes yeux Mohamed, c'est le christ. Le chrétien ne prétend pas partager la perfection messianique du christ. Tout au plus peut-il souhaiter de Lui être configuré, d'être réflecteur de sa Lumière avant, s'il croît en sainteté, d'être au moment de la mort, Transfiguré en Lui pour participer à sa divinisation. De Lui être configuré verbalement, mais surtout christiquement, en priant pour toi si tu ne le reconnais pas, pour que la Face de dieu Que tu révères soit celle par laquelle tu sois sauvé ! Il n'y a pas de représentation qui joue là-dedans ! Alors, pourquoi nous appesantir sur les chrétiens persécutés ? D'abord parce qu'ils le sont en grand nombre. Quelle que soit la gloire que connaît la Turquie, le patriarcat de Constantinople, pourtant plus ancien que l'Empire ottoman, continue d'y être confiné et d'y connaître des mesures vexatoires qui ne permettent pas le plein développement d'une religion ancienne, critère qui t'est cher et à qui tu ne peux opposer l'insupportable nouveauté exogène de l'évangélisme pentecôtiste et yankee. Le musulman renié pour se faire chrétien, quel traitement les fanatiques de ta religion lui infligent-ils ? Mais j'arrête là ma litanie. La deuxième raison qui me fait m'intéresser aux chrétiens persécutés est tout simplement le fait naturel qu'ils sont mes correligionnaires. La troisième raison qui, tout à fait personnellement, me fait te répondre à ce sujet dans le cas d'espèce de ce prêtre polonais est que je me suis toujours senti mal à l'aise devant la surrenchère que l'on fait de la persécution chrétienne comme d'une "amorce", selon ton expression que je trouve assez heureuse, si je puis dire en matière qui l'est si peu, à je ne sais quelle conversion doloriste. Je ne suis pas de ceux qui aiment égrener au quotidien le martyrologe d'hier et d'aujourd'hui, car je trouve qu'il y a là un réflexe malsain. Pour autant, dans la mesure où je me suis engagé avec toi sur la voie de ce dialogue jusqu'à en héberger l'essentiel sur un blog public, je ne voudrais pas me faire l'hébergeur d'un de nos persécuteurs, si ce n'est activement, du moins par une espèce d'apologie, ou de compréhension des motifs de ceux qui se livrent à ces exactions. Cela, au nom de l'honneur que je dois à mes frères chrétiens et non de la valeur supérieure qu'aurait leur vie fauchée par rapport à celle de tout homme qui meurt, je dois, si je me rends accessible à tes analyses au point de les héberger publiquement sous la responsabilité de mon nom ; cela, je dois le dénoncer.
Un dernier mot qui sera plus consensuel et qui concerne Jean-Paul delevoye. Je l'ai moi aussi entendu il y a huit jours sur "france cuulture", et j'ai entendu un homme aux accents d'une sincérité évidente que ses fonctions de médiateur de la République ont transformé. Et dire que cet homme a d'abord connu le parcours d'un politicien ordinaire, briguant la présidence du RPR qui lui fut refusée pour être attribuée, ça ne s'invente pas, à Michèle Alliot-Marie, sous prétexte que Jean-Paul delevoye apparaissait sans relief. C'était vrai alors. Il n'en est plus ainsi, d'évidence. La médiation lui aura fait mesurer la précarité à laquelle notre société fait face. Une précarité démunie même de langage, une précarité quasi mutique, qui fait que cet homme a appris, à se taire au moins autant qu'à parler, j'aime bien ton expression, qui rejoint une prière du cardinal verdier à l'Esprit-saint, où il Lui demande de lui inspirer ce qu'il doit dire, comment il doit le dire et ce qu'il doit taire. Jean-Paul delevoye s'imagine-t-il dans la peau d'un présidentiable ? Je crois qu'il a fait abstraction de tout carriérisme. Et pourtant, tu as raison, il faut sans doute que nous le suscitions et priions pour qu'il en ait envie, à moins qu'un Dominique de Villepin ne démontre avec une certaine constance qu'il est réellement revenu à lui-même. Le voilà qui vertèbre son programme politique, non seulement d'une compréhension de ce qui se passe dans le monde arabe qu'il connaît, ne serait-ce que par la porte d'entrée de la poésie, qui n'est pas la moins noble, mais d'une proposition d'instauration d'un revenu minimum social substantiel, lui, l'homme du CPE, juste dans l'instauration de celui-ci comme il l'est dans celle qu'il suggère de ce revenu universel. N'oublions pas cependant qu'il est aussi l'homme de "l'état d'urgence", lorsqu'éclatèrent les émeutes de la banlieue ! Qu'avait-il besoin de rechercher ce symbole ? D'après un faisceau de rumeurs concordantes (les rumeurs ne sont pas toutes fausses d'être des rumeurs), il serait aussi l'homme d'un souverain mépris qui, les pieds sur la table, traite tous ses collaborateurs et ceux qu'il observe s'agiter de "connards" qui n'ont pas de "couilles". Franz-Olivier Giesberg, relayé par Didier porte que j'aime bien, ajoute qu'il aurait également été l'inoubliable auteur de cette phrase :
"La france a envie qu'on la prenne, ça la démange dans le bassin".
Ce serait donc ça, le gaullisme, et ça peut être ça, le futur Président de la France ? Alors, Villepin ou delevoye ? Que Dieu ne nous mette pas dans l'état de n'avoir à voter pour personne ! Tu me diras que je formule une prière négative. Que Dieu nous suscite un homme ! Ou que notre pensée se fortifie au point de le susciter ou, ne craignons pas d'être mégalomanes, de le devenir !
Ton torrentiel priant avec toi pour la france et pour devenir un homme
lundi 28 février 2011
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire