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lundi 25 mars 2024

Malaise dans la victimisation

Justice au Singulier: Trop de victimes, trop de héros... (philippebilger.com)


Il y a au moins quatre choses qui me gênent dans la dérive actuelle de la victimisation-culpabilisation:


-D'abord beaucoup trop de gens revendiquent un statut de victime à partir duquel ils ne pourront jamais rien reconstruire, surtout s'ils ont subi un vrai trauma. Le statut de victime  a pris une telle importance que le mot de "résilience", comme horizon pour la victime de dépassement de son statut de victime, est devenu un gros mot.


-L'idée que la "concurrence victimaire" a été inventée par ceux-là mêmes qui, depuis la Shoah, n'entendent plus qu'il y ait d'autres victimes qu'elles-mêmes, qui seraient devenues des archétypes de la victime idéale, au moment même où ils tirent argument de l'"holocauste", mot contesté au demeurant,  pour se considérer comme des victimes représentatives de toutes les victimes, en même temps qu'ils prétendent que "qui tue l'homme tue l'humanité" (et pourtant il y aurait des victimes plus représentatives que les autres). Et s'il y a des victimes éternelles, il ne faudrait pas que les autres victimes fassent état de leur état de victime.


-Le fait qu'il y aurait des coupables absolus comme il y aurait des victimes idéales. D'autant que l'homme naîtrait coupable devant Dieu, comme m'en a fait état un pasteur souvent déjà cité par moi. Ayant été biberonné à la culpabilité, je serais un de ces coupables idéaux. Et comme cette position est intenable, j'oscille entre cette culpabilisation complaisante et un déni tout aussi complaisant, où, finalement, je ne me trouve pas si mal à peu de frais et à bon compte. Car après tout, peu de gens, dans ma situation, auraient eu mon courage et auraient fait aussi bien que moi, voire auraient fait autant d'efforts. Ben voyons! La vérité est toujours entre les deux. 


Je ne veux pas croire que les monstres ne soient pas des êtres humains qui ont mal tourné. Je ne veux pas croire qu'il y ait une humanité monstrueuse. Et si je suis un monstre, je veux continuer d'émarger à l'humanité.


-Enfin, nous sommes en manque de héros? Je ne crois pas qu'il y ait assaut d'héroïsation dans notre société. Il y a panthéonisation abusive (pour moi Robert Badinter n'est pas un héros) comme il y a eu jadis érection de saints de vitrail là où la vie des hommes n'est jamais en noir et blanc, mais toujours en blanc et noir et doit toujours être resituée dans un contexte. Le manichéisme est la même hérésie quand elle parle des êtres humains que quand elle suppose deux dieux, un dieu du bien et un dieu du mal. 


Arnaud Beltrame pouvait être un héros, comme il y eut "la Nuit des héros" présentée successivement par Laurent Cabrol et Michel Creton. Je crois aux héros du quotidien, mais je ne crois pas aux pères de famille, héros du quotidien selon Charles Péguy, car ils ont fait de leur progéniture des enfants-roiss, trop impuissants pour s'être voulus les rois d'eux-mêmes ou les "roi(s) de rien", selon l'expression de Michel Delpêche. .   


Je crois surtout que, dans notre société, tout le monde regarde ses pieds, mais presque plus personne ne regarde personne. Il y a eu un abaissement du regard qui devrait entraîner un recouvrement du regard qu'on appellera sans doute une révolution du regard, dans notre société qui ne saurait vivre sans se donner les atours de la révolution. 


Je crois surtout que notre société adore évoquer les mots des réalités dont la réalité lui manque. Exemple: le premier article de la loi Veil affirme que le droit à la vie ne saurait souffrir d'exception. Suit une vingtaine d'articles qui énumèrent les exceptions au droit à la vie. Et avec la constitutionnalisation de la "liberté d'avorter", c'est finalement le droit à la vie qui fait exception.... 

mercredi 13 mars 2024

La philosophie est un roman conceptuel

Contribution à une discussion avec des camarades commentateurs du blog de Philippe Bilger dont presque tous ont déjà été cités ici.

@Lodi | 13 mars 2024 à 07:30 et @Lucile | 12 mars 2024 à 19:43

 Merci à l'un de me trouver inspirant (c'est réciproque et j'ai publié un de vos derniers commentaires en vous citant sur ma page Facebook en contrepoint de mon ire contre la constitutionnalisation de l'avortement!) et à non point l'autre, mais  à la Dame (et la dame des pensées de Tipaza) d'être d'accord avec moi sur le côté "conceptuel" de ma définition pour une fois très économe de mots de la philosophie,  mais non sur le côté "roman", ou alors "roman historique". 

Je vais néanmoins essayer de défendre mon point de vue, non sans avoir remercié Ugo des définitions de la philosophie par les philosophes qu'il a colligées pour fonder ce débat. 

Là où il me semble qu'il y a roman conceptuel dans la philosophie, c'est que le concept se trouve dans le déroulé de l'écriture qui cherche et recueille quelque chose à l'appui d'une démonstration qui essaie de se faire jour. Tout à coup apparaît le concept dans le déroulé prospectif, qui s'enroule dans le système et trouve sa place dans l'analyse.

Car le roman est historique comme le concept a une prétention scientifique. Le roman comprend l'analyse comme il  présente un résumé du dialogue qui s'épanouira au théâtre. L'analyse se déguise en méthode scientifique (et Descartes sera très bon dans cette prétention à déduire toute la vérité de son premier doute méthodique), comme le dialogue théâtral ancrera l'épopée, la théogonie et la cosmogonie dans la persuasion des peuples. Tout dialogue a d'abord une visée rhétorique.

Dans l'épopée, les peuples inscriront leur histoire dans la légende.  La cosmogonie développera la fiction théogonique. Celle-ci est plus intéressante du point de vue romanesque: la théogonie transpose dans la métaphysique la manière dont le romancier crée ses personnages au plan poétique ou littéraire. (J'aime à dire que l'islam met des noms de personnage sur le dieu des philosophes, contrairement au christianisme qui a trop développé l'analyse en la tordant pour rester strictement conceptuel, au sens où Robert Marchenoir voudrait voir une philosophie dans le christianisme.) Le personnage théogonique est un "délire de référence" calqué sur des questions existentielles. 

La théogonie démontre encore que nos dieux sont plus dépendants de leur liturgie que la liturgie n'est dépendante d'eux, en tant que la liturgie est le théâtre de Dieu, ce qui peut paraître un lieu commun.

Mais la théogonie pousse le  concept tel qu'il se déroule dans le roman qui le fait apparaître dans sa tendance la plus allégorique. Omettons le nom des dieux en termes de personnages et  remplaçons-les par des concepts tels que "la Raison" par exemple. La Raison est un concept accrocheur par lequel on se raccroche à un monde commun qui ne fait qu'exprimer qu'on a besoin d'un "on" qui donne raison aux idées les plus communes et les plus majoritaires, grâce auxquelles on pourrait neutraliser le plus petit commun dénominateur (qui en mathématiques est le plus grand) dans notre compréhension du monde. 

La raison est le concept des concepts, mais  elle est une allégorie comme la Passion, les Idées , la Politique ou n'importe quel autre topos contemplatif. Aucun d'entre eux n'existe en dehors du langage. tous en sont dépendants. Tous s'enroulent dans le roman du verbe, et pourtant les concepts ne sont que des mots recueillis dans la poésie de l'écriture qui est un tamisage où le langage ne définit pas, mais découvre et associe pour la symbolique d'une époque donnée. 

L'encrier de Luther

Je ne connaissais pas l'épisode de l'encrier de Luther. C'est Dostoïevski qui me le fait découvrir. Et j'en apprends plus en me renseignant ici:

https://www.eleves.ens.fr/.../en_ligne/careme98/luther.html

"l'univers luthérien est habité de visions hallucinées qui distinguent en toute créature le " vieil ennemi ". On ne peut le reléguer dans son enfer : c'est une puissance réelle et permanente, le " prince de ce monde ".

Par ce personnage mythologique, Luther désigne le mal et lui donne une fonction théologique essentielle : diable (Teufel), monde (Welt), péché (Sünd) et mort (Tod) sont des termes équivalents qui tous expriment la corruption totale du monde et de l'homme qui ne fait qu'un avec lui. [...] Sa théologie du salut " postule un homme exsangue affronté à la puissance perverse du Malin. " (Jean Delumeau) " Si Dieu veut nous ouvrir le Ciel, il nous plonge d'abord en enfer. (Martin Luther) " Et Il nous en retire: "" Le combat que la loi livre à la loi pour que je sois en liberté, le combat du péché contre le péché pour que j'aie la justice, de la mort contre la mort pour que j'aie la vie, pour que je voie que le Christ est mon diable contre le diable afin que je sois un fils de Dieu " (Martin Luther)

Sainte Thérèse d'Avila a eu une vision de Martin Luther en enfer. N'était-il pas avant tout dans un enfer plein de lui-même? Et si l'enfer peut être vide, c'est qu'il n'est pas plein de nous-mêmes? Le salut ne se joue pas de Dieu contre nous ni entre nous et Dieu, mais entre Dieu et nous, de Dieuà nous. 

Or, "Le chrétien, dans la pensée de Luther, est totalement juste et totalement pécheur. Dans cet espace s'inscrit le combat spirituel du croyant, son itinéraire dramatique dans une alternative radicale et absolue, la damnation éternelle ou le salut gratuit. [...] Dans cette tension" (ou au prix de cette tension), "il puise la vitalité de sa foi." La vie du croyant " se passe, dans le gémissement du coeur, la voix de la parole, l'action du corps, uniquement à demander, chercher et supplier, pour être justifié sans cesse jusqu'à la mort, à n'avoir jamais d'assiette ferme, à ne pas se perdre dans l'habitude, à ne regarder aucune oeuvre comme l'accomplissement d'une justice acquise, mais à attendre cette justice comme quelque chose se trouvant toujours hors de portée et à être au contraire soi-même toujours dans la vie du péché " (Martin Luther) La victoire est certaine, mais en espérance."

"Le combat du chrétien, lorsqu'il s'inscrit dan le monde, devient événement. Luther comprend en effet l'histoire comme le théâtre du grand affrontement entre la Parole de Dieu et les puissances du mal." (Madeleine Wieger) #RolandKauffmann a dit un jour dans une rencontre de "la Théologie pour les nuls" que l'anthropologie luthérienne était profondément pessimiste, contrairement à ce qu'un vain peuple pense, qui pourrait aller de Michelet à tous ceux qui croient que la Réforme a été source de progrès. Luther était fait pour être contre-révolutionnaire et  le progressisme du réformisme luthérien semble fait pour être structurel comme une restructuration d'entreprise ou une gouvernance scandinave, contrairement au dilettantisme des "Gaulois réfractaires", accusés à raison d'être des pansus dépensiers.

Pour les 500 ans de la réformation, on a donné au temple St-Étienne de Mulhouse un opéra sur la vie de Luther. Une scène m'y a particulièrement choqué: à la fin de sa vie, Luther dit à sa femme Catherine, qui a quitté son couvent pour se donner à lui et qui aurait ouvert une auberge pour qu'il puisse continuer ses recherches, qu'elle ne lui avait servi de rien, comparé au Seul qui sauvait son âme.  

Le combat spirituel se ferait donc au mépris de la fraternité, dont l'enjeu serait ma réhabilitation personnelle. Il serait un enjeu entre moi et moi qui nie le prochain, qui n'est jamais qu'un "mort spirituel", en puissance, puisqu'avant de rencontrer le Christ, c'est bien ce qu'il était, me déclara un pasteur luthérien. 

Pour un catholique comme moi biberonné au sentiment de culpabilité inoculé en ma mère par son luthéranisme originaire, il y a quelque chose de terrifiant dans la théologie de Luther, et de plus terrifiant encore que mes propres "terrores conscientiae" (je dois la découverte de cette locution latine à Wilhelm Kreis à qui je suis apparenté).

ELEVES.ENS.FR

Aumnerie catholique des lves de l'ENS

ELEVES.ENS.FR Aumnerie catholique des lves de l'ENS 

vendredi 8 mars 2024

Dans nos obscurités



https://www.youtube.com/watch?v=pfin1W0v7Ts

https://www.philippebilger.com/blog/2024/03/faut-il-avoir-peur-de-ses-obscurit%C3%A9s-.html#comments

Ëtre un peu fasciné par ses obscurités comme les bourgeoises pour les mauvais garçons, c'est faire un peu partie de la droite camusienne.

https://www.youtube.com/watch?app=desktop&v=QlpmFdSInus

Reconnaître, mais ne jamais céder. Ne pas céder à la "pensée parasite" qui ne devient coupable (comme nos "rêves dont nous ne sommes pas responsables" (saint Augustin)), que si on y entre. Autrement dit, nous ne sommes pas coupables d'avoir de mauvaises pensées, nous ne sommes coupables que de leur laisser prise en y entrant, m'expliqua un jour le P. Claude Germès que je remercie de m'avoir appris cela comme je remercie la psychologue Josiane Méchné de m'avoir appris la différence entre une "pensée parasite" et une pensée dans laquelle j'entre assez pour la transformer en pulsion.

Mais nous voulons mettre du ciel dans la ténèbre. Et pour cela, nous nous fredonnons une cantilène litanique de Taisé
"La ténèbre n'est point ténèbre devant toi.
La nuit comme le jour est lumière."

https://www.youtube.com/watch?v=3tlriP3kMC8

Car il n'y a pas toujours eu séparation de la lumière et des ténèbres. Et même, Dieu, dont Jean nous dit qu'Il est Lumière comme Il serait amour, il y aurait eu un moment où Il n'aurait pas été Dieu, car Il n'aurait pas été lumière, étant donné qu'il y aurait eu un moment où Il aurait dit: "Que la lumière soit et la lumière fut" et un autre jour où il aurait séparé, comme l'allumeur du réverbère du Petit prince, la lumière des ténèbres. (C'aurait été une pensée pour Smerdiakov ou pour mon frère Gilles, qui me demanda un jour comment il se pouvait que Dieu demande à Caïn un signe pour n'être tué par personne s'il n'y avait dans le monde qu'Adam, Ève, Caïn et Abel).

"La multitude des sentiments" qui nous traversent comme la discontinuité des états d'âme qui se succèdent en nous forgent en nous une étrange continuité dans le cyclique retour des mêmes hétéronymes.

"Cette négativité de l'être donnant alors tout son sens à l'éclatante lumière de la personne offerte à tous dans son apparente normalité." (PB)
Négativité de l'être et lumière paradoxale et apparente de la personne résolvant l'équation de l'être malgré les apparences dans le retour à la normalité où parfois on la débusque.
Dans cet étrange personnalisme, pas grand-chose ne résiste au tragique de la banalité du mal et à sa fascination voyeuriste et malsaine.
Je préfère à cette vision celle d'un être fugitif aux prises avec une personnalité s'ingéniantà se faire passer pour bonhomme (ou bonne femme).

La "peur de l'extraordinaire" est l'anti-camusienne acceptation du romantisme, de l'aventure contre la fixité des commandements divins et du romanesque à nos risques et périls.

"Il y a en effet une infinie richesse, pour le développement de soi, à identifier ce dont on devrait avoir honte mais qui est indissociable de nous." (PB)
"Ne jamais joindre la honte à ses faiblesses", disait Philippe Léotard dans une émission des "Dossiers de l'écran", consacrée aux addictions.
Il faudrait faire de notre part obscure ou de notre mauvaise part acceptée et comprise "le deuil d'une absente." Pas le deuil de l'être aimé nous ayant quittés, comme le crut mon amour dont je n'ai pas fait le deuil de l'absence. Mais comme j'envie la force de JM. Le Pen qui dit dans ses mémoires en commentant son divorce avec Pierrette qui a défrayé la chronique: "Quand on me quitte, je n'aime plus." Ce qui n'empêche pas le pardon.

La passion des criminologues est faite de ce qu'il y a de criminel en eux. Et Sartre a bien conclu ses "Mots" en disant "Je suis un homme fait de tous les hommes, et qui les vaut tous, et que vaut n'importe qui." Et pourtant il n'y a pas fusion, mais coïncidence des opposés, comme, entre les individus, il y a séparation des points aveugles et coïncidence des points d'accord qui forment le "on" de la raison, contre la raison des torts (dissidence des divergences) qui séparent le "nous" du "je". 

jeudi 7 mars 2024

Le rabot de Bruno Le Maire, haro sur les malades!

Shame On #BrunoLeMaire!

Au moment où le président de la République promet150 millions aux agriculteurs, 1,5 milliards en cinq ans au titre de la Conférence nationale du handicap contre 3 milliards devant abonder immédiatement le gouvernement ukrainien pour faire face à l'offensive russe, le ministre qui promettait de "mettre l'économie russe à genoux" (laquelle se porte bien, merci pour elle!) décide de réduire par voie réglementaire les dépenses publiques de 10 milliards d'euros.

Et parmi les cibles qu'il lui paraît prioritaire de clouer au pilori, figurent les gens qui souffrent d'ALD (affections de longue durée, lesquelles sont une trentaine alors que le nombre des maladieschroniques est largement sous-évalué).

Il s'agit notamment de ne plus rembourser les frais de transport médicaux de ces malades compte tenu de ce raisonnement ubuesque qui consiste à séparer artificiellement la sphère de la maladie de celle du handicap.

(Tous les médecins et toutes les personnes confrontées à ces problématiques savent que les conditions de transports médicaux sont devenues draconiennes et ne font plus l'objet des abus qui avaient cours autrefois. La CPAM a sévi depuis longtemps et a édicté des critères hallucinants, notamment pour les transports couchés. En pratique, les personnes hors ALD ne se voient plus rembourser leurs frais d'ambulance.)

Voici donc le dilemme posé par l'Ubu de Bercy:

(vers les 25:40 mn): "Est-ce qu'il est vraiment légitime, est-ce que nous pouvons encore nous permettre de rembourser l'intégralité des transports médicaux pour 5,7 milliards d'euros par an? Est-ce que nous sommes sûrs que c'est là que la dépense est la mieux employée? Est-ce que vous ne pensez pas qu'il serait juste de se dire que nous avons engagé le remboursement des fauteuils roulants pour les personnes en situation de handicap, mais qu'il y a des fauteuils qui doivent être spécifiquement adaptés aux personnes, qui doivent être faits sur mesure pour répondre à certaines spécifications et que le remboursement là devrait être intégral?"
(Problème: #DominiqueFarrugia s'est signalé à l'issue de la Conférence nationale du handicap en démontrant que ce n'était pas le cas.)
Vous ne pensez pas que c''est plus juste et que c'est plus nécessaire et qu'il vaut mieux dégager des moyens là où c'est moins utile plutôt que de ne pas répondre à des demandes sociales qui sont légitimes?"
Cette dernière question est alambiquée, mais elle revient à dire qu'on remboursera des fauteuils roulants pour les handicapés qui seront intransportables, car on ne couvrira plus leurs frais de transport alors même que ces personnes qui devraient théoriquement bénéficier d'un meilleur accès aux soins ont en moyenne un accès aux soins inférieur à hauteur d'environ 20 % par rapport aux personnes valides? (Cf le Livre blanc produit par le RAP68 présidé par #EvelyneLamon)?


Mais pour ne pas être monomaniaque, voici les dix politiques publiques qui font l'objet de la réflexion gouvernementale pour se voir appliquer ce que le ministre se refuse à appeler des "coups de rabot":

28 mn: "Je vous donne la liste des dépenses publiques sur lesquelles nous avons commencé à travailler, sur lesquels tous les parlementaires sont invités à travailler avec nous:

-Les aides aux entreprises;
-les dispositifs en faveur de la jeunesse" (qui sont apparemment devenus inutiles, un peu comme les contrats aidés);
-les politiques de l'emploi (malgré deux réformes de l'assurance chômage);
-la formation professionnelle et l'apprentissage (tout récemment fleurons et fiertés de l'action gouvernementale);
-les dispositifs médicaux (décidément!);
-les affections de longue durée (haro sur les malades!);
-les aides au secteur du cinéma (les malades font du cinéma.)
-l'absentéisme dans la fonction publique (dans l'ordre, il y a 17 jours d'absence dans la fonction publique territoriale, 12 jours dans le privé et seulement 10 jours dans la fonction publique d'État, selon le même Bruno Le Maire);
-les mesures de maîtrise dans la programmation militaire (alors que l'armée est exsangue et qu'on envoie nos derniers matériels militaires en Ukraine);
-les dépenses immobilières des ministère en voie de programmation" (enfin une mesure qui s'applique à la réduction du train de vie de l'État, deuxième pilier annoncé de ces réductions de dépenses et qui arrivent en dernier)

Après cela, dira-t-on encore que Bruo Le Maire est un aigle?

(Voir ici:
https://www.youtube.com/watch?v=HzDW1Sz_UjE

Repris ici:

 

Faut-il s'ennuyer avec Camus ou frayer avec Sartre sur "les Chemins de la liberté?

La lecture de ce billet:

https://www.philippebilger.com/blog/2024/03/la-droite-ne-d%C3%A9teste-pas-albert-camus-.html#comments

de l'article consacré par Aurélie Raya à Catherine Camus dans "le Point":

https://www.lepoint.fr/culture/la-peste-les-confidences-de-la-fille-d-albert-camus-sur-la-serie-de-france-2--03-03-2024-2554104_3.php#11

et de la quasi totalité des commentaires du billet de Philippe Bilger m'amène avant tout, moi qui n'ai pas lu tout Camus et qui ai commencé par prendre "l'Étranger" au premier degré tant je suis prédisposé au contresens, moi qui en revanche ai aimé "la Chute" et "le Malentendu", mais qui n'ai lu ni "la Peste", ni "Noces", ni "l'Été", ni "le Dernier homme", à remercier Tipaza de me l'avoir expliqué, ou plutôt de m'avoir conforté dans l'explication que ma lecture empirique aurait moins bien formulée que lui, à savoir que Camus était, à la mode des anciens Grecs, un écrivain des limites, donc un écrivain borné, comme Élisabeth Borne était prédestinée, en politique, à ne pas faire des étincelles; un écrivain des jeux littéraires à condition de ne pas importer le théâtre dans la vie civique; un écrivain dont la principale leçon de la fable qu'est "Caligula" vous explique avec assez de réussite qu'il ne faut pas demander la lune; un écrivain guetté par l'indifférence aux idées ("la Chute") et aux hommes ("l'Étranger"), mais qui s'oblige à s'intéresser à ses semblables au risque de les tuer par erreur ou désinvolture sans regret de la vie quand il court à l'échafaud; un écrivain vous mettant en garde contre le terrorisme ("les Justes") ou le sadisme ("l'Homme révolté") pour garder les mains propres (au contraire de Sartre, l'anti-saligots qui préfère garder "les Mains sales", quoique ne s'étant pas beaucoup mouillé; un écrivain de la responsabilité; un Danton un peu dandy à la création de "Combat"; un "libertaire de coeur et un social-démocrate de raison" dont il ne fait pas bon être l'héritière comme Catherine Camus, parce qu'on s'ennuie un peu à dire oui aux uns et non aux autres, à être macroniste par défaut, à avoir un jumeau qui ne vous "rend service", étant malade, que quand il refuse la panthéonisation de son père, à essayer de coller aux traces et au train d'un "papa" qu'on a trop tôt perdu, à faire passer ses langueurs dans une bouffée de cigarette, à essayer d'être tranquille et en fin de compte à s'ennuyer un peu beaucoup, entre Olivier Todd qui vous pille et Michel Onfray, autre manuelliste de philosophie spécialisé dans les raccourcis, parce que papa, vous dis-je, n'était pas un romantique; qu'à force de s'empêcher de défaire le monde, on s'empêche d'en rien faire; on s'en remet au moins offrant qui n'est pas le moins inquiétant, on s'en remet à Macron qui rejoue l'escalade vers la Troisième guerre mondiale et certes, on est sûr de ne pas se déshonorer en restant bien centriste, mais on se sent floué, désabusé, comme quelqu'un qui n'a pas pu faire sa vie en tuant le père car héritière de profession, il nous était interdit de faire le deuil, et des journalistes venaient recueillir nos oracles pour faire parler un mort qu'on n'a pas assez bien connu, sinon que, comme Henri IV jouait au cheval avec ses enfants, le grand écrivain jouait au football avec nous, et était peu disert parce que sa mère était sourde et qu'il ne s'était jamais remis lui-même de ce silence qui était imposé à cette femme discrète et tant aimée.

Simone de Beauvoir s'était elle-même sentie flouée dans "la Cérémonie des adieux". Ferré, cet autre libertaire de coeur, dirait qu'"avec le temps on n'aime plus" et c'est dommage, parce que le stoïcisme a l'avantage de ne nous faire agir que sur ce qui dépend de nous pour garder la sérénité, mais il y a des moments où l'on se dit que la sérénité est une ambition de feuille morte, que de trop se dégager n'engage à rien et que le stoïcisme, ça vous blase.

Et pourtant j'aurais moi aussi voulu "me mesurer à l'Homme révolté ", livre d'une extrême densité, mais derrière la compréhension de tous les délires humains, je le trouve trop sage, comme une philosophie de la morale éternellement provisoire.