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vendredi 11 mai 2018

Où va l'écriture?

D'après quelques réflexions écrites hier soir à Patrice Charoulet.
Je me dis souvent que, si je reprenais des études, j'essaierais d'étudier ce que devient l'écriture avec sa collectivisation,sa démocratisation, la disparition du livre et la transformation encore indéfinie de son support ? Irai-je chercher le directeur de mémoire qui s'intéressera à ce questionnement? J'en aurais encore un autre à lui soumettre, que je trouve tout aussi stimulant. Comment l'irruption de l'audiovisuel répartit-elle l'oeuvre entre sa forme fixe et lamanière dont l'auteur la résume ou la déploie  dans ses interviews ? L'essentiel de l'oeuvre n'y est-il pas contenu ? Si oui,pourquoi continuer d'écrire ? Et pourquoi l'école enseigne-t-elle les moyens numériques d'accéder à l'écriture avec tant de parcimonie, de dégoût et de réprobation, au risque de favoriser l'extension  du domaine de l'illettrisme à la fracture numérique ?

 Quand je suivais ma formation d'écrivain public, nous eûmes un jour une conférence sur l'illettrisme. Au moment des questions, j'intervins  en disant : "Vous avez en face de vous un ancien étudiant en lettres qui n'a jamais su lire et un futur assistant des illettrés qui est illettré lui-même. Croyez-vous que ce soit possible ? Un instant, la directrice de la formation regretta de m'avoir accepté dans la promotion avant d'adhérer au panache de la question. Ça a jeté un froid, mais j'ai aimer poser la question. Les questions sont comme des mots d'enfant qui découpent en pointillé le message que notre conscience doit réaliser volontairement.

Encore une remarque à propos de l'intertextualité. J'ai En centans, nous sommes passés du livre au texte et du texte au message. Quelle ne fut pas ma surprise, en lisant le Dictionnaire des idées reçues de Flaubert dimanche dernier, de découvrir que pour Flaubert ou ses contemporains, il était très chic de dire "message" plutôt que "lettre", d'où  il valait mieux transmettre un message qu'écrire une lettre, ai-je extrapolé. Nous y sommes. De même que le nouveau roman a voulu réaliser le rêve de Bouvard et Péccuchet.

L'athéorie


En lisant la fiche Wikipédia du dictionnaire des idées reçues, j’apprends que l’auteur « utilise souvent al’infinitif à valeur d’impératif impersonnel. » Et cela me fait ressouvenir de mon adolescence où je me méfiais de la grammaire qu’on m’enseignait, et où je confondais la littérature avec la dualité des synonymes, entre lesquels je jugeais qu’il ne pouvait y en avoir qu’un de bon, l’autre étant forcément mauvais. En guise de choix du mot juste, l’exclusivité (entre autres) accordée à « manière » contre « façon », fit écrire à Nathalie G. sur le Versabraille, dans un chapitre qu’elle me consacra sous le titre « Weinspomme » : » De toute façon, le mot façon est une façon de dire manière ». Mon choix de « manière » contre façon prouvait que j’étais déjà contre la contrefaçon des génériques. À cette époque, je refusais de croire la grammaire, du moment qu’elle avalisait le style télégraphique et les phrases sans verbe, le recours au mot « ça », aux tirets et à l’infinitif détourné de sa fonction complétive ou de sujet d’une proposition qui portait son nom. En lisant cet après-midi que l’infinitif remplissait un vide de l’impératif, celui de l’impersonnel, outre le défaut de la première personne du singulier et des troisièmes personnes du singulier et du pluriel (car l’infinitif est un mode défectif), je mesurai le temps perdu.

 

Ne croyant pas à la grammaire en haine  de l’amputation du verbe conjugué, garant d’une structure de phrase où il serait actif à la place du sujet, j’ai, durant toutes mes études de lettres et encore aujourd’hui, nourri une grande suspicion contre la théorie littéraire, dont l’importance qu’elle a prise dans les études de lettres comme réflexion masturbatoire prenant la littérature pour objet transitionnel de sa propre recherche, au lieu de fouiller la mémoire ou l’esprit, s’introspectant de Gérard Genette à Maurice Blanchot, ne s’explique pas plus à l’Université qu’il n’est légitime, au lycée,  qu’on dégoûte des élèves de lire, en les obligeant à écrire des essais littéraires, et donc à faire de la critique littéraire avant d’avoir rien lu, par pur bachotage.

 

Quelle ne fut pas ma surprise, reprenant mes études à Lille et m’étant promis d’avoir moins d’œillères, de découvrir que les structuralistes étaient aristotéliciens avant que d’être marxistes. Ils inscrivaient le temps dans l‘espace du langage, c’était leur manière de le matérialiser et de le couper de l’éternité pour le perdre de mots.

 

Drôle d’érotique que celle des lettres, qui reculent les limites de la pudeur jusqu’à l’exhibition sans attentat, tout en rendant sa critique métaipsiste, abstraite et onaniste au moment même où s’effectue cet effeuillage et ce passage du stade anal au stade génital le plus cru, sur une ligne qui va de Pantagruel à histoire d’O, en pleine libération sexuelle. 

 

Mais pour moi qui ne voulais pas croire à la théorie pour faire des phrases simples ou complexes, mais jamais elliptiques, que de temps perdu ! De même que je ne m’inscrivais pas dans l‘histoire, car je refusais cette dimension cathoo-laïcisée de la culture, qui avait transformé le culte des saints en dialogue avec les grands morts. Si on faisait s’effondrer les phrases, je  ne voulais plus rien savoir, et la littérature ne devait pas me raconter d’histoires.

La vocation de Lourdes

Mon ami GEORGES me rappelle  opportunément QUE LOURDES ETAIT LA propriété d'un émir qui s'est converti sous Charlemagne, sous la condition que ses terres seraient placées sous la protection de la Vierge Marie, terres dont la toponymie, Al-Ouarda, signifiaient "la rose".  La dévotion du rosaire ne se développera que quatre siècles après la conversion de l'émir  qui possédait le château de Lourdes, comme si la vocation de cette cité, mariale par le vœu de l'émir, et dont on peut se demander pourquoi l'Eglise de France y a concentré toute sa dévotion mariale, consciemment pour la canaliser, semble-t-il, était, comme à Soufanié en Sirie, pays martyre, de favoriser le dialogue islamo-chrétien, moins pour préserver la France du danger de l'islam comme Marie l'a fait en 1947 à l'Ile-Bouchard à l'encontre du communisme, que du danger de la guerre civile.

jeudi 10 mai 2018

Pourquoi les parents d'enfants handicapés devraient abandonner le discours inclusif!

Voici un argumentaire difficile à entendre, mais qui, loin de constituer un discours régressif, peut provoquer une prise de conscience à partir de laquelle les parents concernés pourraient sortir la tête de l'eau.

D'abord les enfants "en situation de handicap" sont  handicapés,infirmes,déficients, différents. "Ensituation de handicap" est une horrible périphrase qui est née avec la loi de 2005 sur le sujet, loi qui partait du principe complètement "anti-physique" qu'il n'y a pas de déficience corporelle, iln'y a que des situations handicapantes. Le handicap passait donc d'une condition physique difficile et souvent irréversible qui vous ennuie tous les jours à une situation qu'on  serait censé pouvoir vaincre à long terme, l'être humain ne voulant plu accepter qu'il a des limites. Le passage du handicap du champ de la déficience à celui de la situation était le premier pas vers le transhumanisme. -Je ne crois pas forcer le trait et je ne suis pas sûr d'être contre le transhumanisme, tout dépend de ce qu'il deviendra. D'instinct, je suis pour le transhumanisme égalitaire et contre le transhumanisme eugéniste. Je crois que l'homme peut nepas augmenter que les privilégiés. D'accord, l'égalité ne marche pas quand il s'agit d'enrayer les maladies, mais passons.-
Du refus de la limite et de voir la condition du corps comme il est,  il en est résulté quelque chose de totalement fou: les handicapés ont prétendu convaincre les valides qu'ils étaient des valides comme les autres et qu'il suffisait de les intégrer pour s'en apercevoir. -Pardonnez-moi de préférer ne pas être banal.- D'abord, ce n'est pas vrai. Une entreprise ne peut pa embaucher 6 % de travailleurs handicapés, car son but est de faire du chiffre, d'être rentable, et les travailleurs handicapés ont beau,souvent mais pas toujours, compenser leur handicap par des qualités professionnelles, un travailleur handicapé ralentit généralement la boîte  qui l'emploie. Ne pas l'admettre relève de l'aveuglement volontaire. De plus, ce combat pour être des humains standards a obligé les adultes handicapés à se replier sur eux-mêmes, si bien que la plupart des handicapés qui réussissent professionnellement (je n'ensuis pas  et je vais finir par en être fier) le font dans le milieu du handicap. Voilà pour les adultes.
Maintenant les parents parlent au nom des enfants. Quoi de plus normal, me direz-vous, c'est ce que font tous les parents.  En eux-mêmes, les "enfants en situation de handicap" ne veulent riendu tout, sauf être regardés pour  ce qu'ils sont, avec leurs capacités et leur(s) infirmité(s). Ils ne tiennent pas spécialement à être comme les autres. Ce ne sont pas eux qui font des mains et des pieds pour être intégrés de manière inclusive dans l'école ordinaire. Ce sont leurs parents qu'on a convaincus de tenir ce discours, et on les comprend, car ce discours est consolateur. Il leur permet, au moins dans un premier temps et apparemment, de sortir de leur solitude et de l'abandon social dont ils font l'objet. Mais la politique inclusiviste a un vice. L'Etat lui fait toutes ses promesses. Mais puisque les parents veulent que leur(s) enfant(s)  soi(en)t intégré(s) dans le milieu ordinaire, il ferme tous les centres spécialisés. La conséquence, c'est que, faute de ne pas avoir leur place partout, les enfants "en situation de handicap" n'ont plus leur place nulle part.

L’IVRAIE DES IDÉES REÇUES


Je viens d’achever la lecture du dictionnaire des idées reçues de Flaubert. L’envie m’en a pris après que j’ai hasardé sur « le blog de Bilger », comme dirait Patrice Charoulet, que Flaubert ne se prononçait pas tant sur la recevabilité de ces idées ni n’incitait à toute force à démanteler ces préjugés, qu’il ne notait tout simplement que ces idées étaient reçues. Apparemment, Flaubert entendait dresser le catalogue des « Clichés de la société française » qu’il appelait aussi les « opinions chics ». C’est dire que Flaubert se faisait une idée du chic qui allait au rebours de ce que nous entendons aujourd’hui par le snobisme, puisqu’il semble bien que les opinions chics exposées par Flaubert recensent celles de la majorité un peu cultivée et bourgeoise de son temps, alors qu’aujourd’hui, le snobisme désigne l’avant-garde, et dessine les contreforts de cette noblesse « sine nobilitate » qui se croit en avance sur son temps parce qu’elle énonce et voudrait bien conjuguer des opinions paradoxales et transgressives. Or les opinions recueillies par Flaubert semblent tellement lui appartenir, pour certaines,  qu’elles pourraient dessiner le portrait moral  de ce voltairien qui se vautre, comme Rimbaud, dans certaines notations grossières comme celles sur l’odeur des pieds, mais  refuse de sentir le soufre comme « l’homme aux semelles de vent », refuse d’être « absolument moderne » et semble se réfugier dans l’hygiène et dans la santé parce qu’il l’a fragile,parce qu’il est frère de médecin, parce qu’il se prend pour l’idiot de la famille ?

 

Flaubert le pourfendeur est l’un des précurseurs du dictionnaire amoureux. L’apologie de ses petites médiocrités personnelles perce sous le dictionnaire impersonnel. Il est le précurseur de l’abécédaire et de la pensée classée. Paradoxe de l’un des plus grands prosateurs de la langue française, dont on ne cesse de parler du gueuloir, qui nous a présenté dans Madame Bovary parmi les plus beaux chefs-d’œuvre de la narration, mais qui est doté d’un caractère de nihiliste à alcoolfort, tellement qu’il collige travers et hérésies, dont il fera trois prototypes du « roman sur rien » qu’il rêvait d’écrire, avec la tentation de saint-Antoine, Bouvard et Pécuchet, et  ce dictionnaire des idées reçues avant tout par lui-même, qui n’est pas tout à faitMonsieur Homais parce qu’il ne se prend pas au sérieux comme le pharmacien, mais qui a quand même, lui qui éprouve de l’aversion à ce que l’on tonne contre les forts en thème,  un scientisme et un voltairianisme à dégoûter Baudelaire, sans parler de son amitié pour George  Sand.  « On s’ennuie en France parce que tout le monde y ressemble à Voltaire », écrivait l’auteur de fusées.  « La dame Sand est le prud’homme de l’immoralité. […] Elle a le fameux style coulant, cher aux bourgeois. Elle est bête, elle est lourde, elle est bavarde. Voir la préface de Mademoiselle La Quintinie, elle prétend que les vrais chrétiens ne croient pas à l’enfer. Elle a de bonnes raisons pour vouloir supprimer l’enfer. »

 

Flaubert ne le supprime pas. Deux de ses trois livres nihilistes, les idées et la tentation, sont inachevés, comme si la mort avait aggravé l’achèvement nihiliste et la disparition du bourgeois de Croisset dans le refus du déclassement et l’absence de radicalité, car Flaubert n’est pas Sénécal. Il connaît l’enfer du cynisme et du paradoxe, celui-ci ne consistant pas tant à professer une opinion provocatrice, différente et contradictoire, qu’à endosser dans son corps la pensée qui répugne à son esprit : le cynisme est d’abord intérieur. L’intelligence de Flaubert répugne à tant d’idées graveleuses, conservatrices et grasses, qui sont pourtant les siennes et qu’il serait inutile de déraciner, car colliger les idées reçues n’est pas dénoncer la doxa.

 

mardi 8 mai 2018

Macron le complexe entrumpé dans l 'Orient compliqué

Quelle défaite pour "la diplomatie cajoleuse" (Bruno Jeudi) de Macron, maître du monde. Rien ne servait de se faire remonter le col de la chemise par Donald Trum qui assurait dans sa conférence de presse qu'Emmanuel Macron (sou-entendu était tellement c.... qu'il) ne pouvait pas se douter de ce qu'il allait faire. Quelques jours avant ce voyage où notre président allait se faire amidonner, son altesse compléxissime essayait de nous expliquer qu'il s'était joint à Donald Trump et à Teresa May dans une frappe en Sirie déjà  indirectement dirigée contre l'Iran pour mieux battre Daech que cettte frappe ne visait paas et que Bachar venait de battre dans la Ghouta orientale. Macron le lyrique s'était associé à cette frappe bien qu'il ait dit dans un autre discours qu'il n'avait pas de ligne rouge et n'avait que des horizons.  Mais voilà, Macron n'aimait pas quand il avait piscine. Une petite voix chantait en lui "Va y avoir du chlore, Bachar c'est Smoky!" Macron, notre roitelet  à la mémoire d'éléphant, ne se souvenait pas de Colin Powell. Et,à la veille de fêter les cinquante ans de mai 68, il ne se souvenait pas que Daniel Cohn-Bendit se plaignait à l'époque que la police asphyxiait les étudiants avec cette arme chimique contre laquelle la France n'avait pas encore signé de convention, sachant que l'idée ne serait jamais venue à De Gaulle de frapper la Sirie. Moins subtil, Netanyahou rejoua le rôle de Colin Powell et lors d'une conférence de presse, ouvrit son placard en disant: "Tout est dans mon sac.
-Et qu'y a-t-il dans votre sac?
-La preuve que l'Iran ne respecte pas l'accord anti-nucléaire.
-Mais vous-même, n'avez-vous pas l'arme atomique?
-Nous ne sommes pas assujettis aux traités de non prolifération, nous ne sommes pas un Etat comme les autres, nous sommes un "peuple d'élite, sûr de lui et dominateur!"
Teresa May fait face aux mêmes contradictions qu'Emmanuel Macron, maître du monde, au moment où elle met en œuvre le Brexit pour redevenir l'œil de Moscou des Etats-Unis par anti-poutinisme. Il est donc peu cohérent de s'opposer à Trump après venir de s'allier avec lui contre l'Iran, contre la Sirie, avec l'Arabie sahoudite, Israël, al-Nostra, Al-Qaïda et Daech en frappant Damas. S'il y a là anti-géopolitisme, la France et le Royaume-Uni le partagent largement avec la Commission européenne et à tout prendre, Angela Merkel, ancienne partisane d'un accueil inconditionnel des réfugiés politiques,met plus d'âme dans la géopolitique européenne que les euratlantistes du "vieux monde" qui croient appartenir au nouveau monde parce qu'ils sont des alliés de l'ancien Nouveau-Monde. (Macron tutoie les premiers de cordée à qui il disait dans l'agiographie de Bertrand Delais sur Manu enfant roi diffusée hier soir: "Tu peux aller conquérir les Indes pourvu que tu créées des comptoirs à ton retour pour faire travailler l'équipage". (Citation à peu près textuelle.) Macron tutoie Colomb parce qu'il tutoie Collomb.
Je remarque aussi que les idées simples sur l'Orient compliqué de l'Otanie préfèrent la politique de l'Arabie sahoudite à celle del'Iran ou du Qatar (qui ne sont pas tout à fait les mêmes). L'Otanie préfèrent que la Sirie ne  bénéficie pas d'un Etat laïc et que l'Egypte voie un "frère musulman" élu démocratiquement être renversé, si cela peut permettre aux chrétiens d'Orient d'être protégés.

Enfin, qui sont les vrais multilatéralistes dans le monde? Trump s'en prétendait le champion pendant la campagne qui a assuré son élection. Macron disait s'envoler vers lui pour aller le lui prêcher. Mais la Russie se montre plus respectueuse de la multipolarité du monde, sans parler de la Chine, qui voudrait que les échanges mondiaux soient adossés à une monnaie mondiale qui prenne en compte les réalités économiques de chaque pays  sans reposer sur la domination unilatérale du dollar. Et pourtant la Chine ne déclare pas la faillite des Etats-Unis, dont l'économie repose sur une montagne de dettes dont elle détient l'essentiel des devises.

mercredi 2 mai 2018

Peter Sloterdijk, l'Europe et la civilisation occidentale


Peter Sloterdijk à Dominique de Villepin, cité par Bruno Lemaire dans Des hommes d’Etat : « Les Américains veulent retrouver le dopage par la religion. Nous, les Européens, nous sommes des dépressifs modérés, parce que nous avons compris que la mélancolie n’excluait pas la création. Regardez #Angela Merkel,  c'est tune mélancolique énergique, elle a la mélancolide des lèvres qui descendent. Nous avons aussi fait la paix avec le mépris. Nous nous sommes résignés à cette idée terrible. Maintenant il nous reste à désapprendre une chose, la psychanalyse, parce qu’on ne souffre pas que du manque d’amour. On souffre aussi du manque de fierté. Il faut moins d’amour et plus de fierté."

 

La fierté apartie liée avec l’honneur. La psychanalyse nous ayant appris à déshonorer nos parents, nous avons perdu l’honneur, en tant que civilisation en malaise. Notre malaise vient aussi du sentiment de culpabilité. Celui-ci est l’exercice du sentiment judéo-chrétien devenu introspectif à défaut de s’inscrire dans l’action. L’Europe juge la civilisation occidentale sur laquelle elle n’exerce plus d’action ni de volonté de puissance, au contraire des Etats-Unis. La conscience d’une civilisation à propos de sa mort procède d’un renoncement à son irresponsabilité, qui est la condition cynique de son existence, de son développement et de sa survie. L’introspection européenne et son sentiment de culpabilité ont réduit ses questions existentielles à la critique de sa faculté de juger et de ses préjugés. Le choix du signe au détriment du sens conduit au nihilisme gestuel de l’art contemporain. Le nihilisme européen est le signe du renoncement de l’Europe à sa civilisation et le synonyme de la (et de sa) décivilisation.