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mardi 13 août 2019

Patrick Buisson ou la versatilité des profondeurs

Commentaire à un billet de Philippe Bilger sur l’union des droites : https://www.philippebilger.com/blog/2019/08/union-des-id%C3%A9es-ou-d%C3%A9sunion-des-personnes-.html

"Cette désunion des personnes révèle cruellement là où le bât blesse : on discute des publics à atteindre, des citoyens à convaincre, libéraux, couches populaires, conservateurs..."

Cher Philippe, J'allais commencer par vous dire que l'union des idées était impossible, tant "les droites" sont multiples par essence dans l'"union" envisagée. Mais les quelques principes que vous mettez en exergue cèdent à ma critique et présentent moins un programme politique qu'une esthétique de la droite, son manuel de savoir-vivre et de civilité à la tête de l'Etat.

Quant à Patrick Buisson qui catalyse cette recherche des publics en l'appuyant sur une recherche des idées qui pourraient à la fois plaire à ces publics, et tout de même reconstruire une nation digne de ce nom et fidèle à ce qui la cimente, c'est un sondeur. Il saute dans les profondeurs entre les concepts qu'il passe en revue comme des obstacles au rythme de la versatilité de l'opinion qui doit se saisir de la communauté d'intérêts entre les "classes inférieures" et la petite bourgeoisie pourréaffirmer une communauté de destin sur la foi de valeurs désertées par la bourgeoisie et chouannement gardées comme leur bien élémentaire, un peu comme le chapelet serait la prière des pauvres, contre la bourgeoisie émigrée, par la plèbe, cette éternelle abandonnée, proie de l'immigration grand-remplaciste et de l'émigration bourgeoise.

Nicolas Sarkozy avait su s'entourer d'hommes intelligents et Patrick Buisson n'était pas le moindre. Entre Henri Guaino et lui, le président à talonnettes était bien encadré. Guaino lui est resté fidèle, lui dont Sarkozy refusait qu'on l'exfiltre de son conseil. Il voulait le garder parce qu'il était "fêlé". Buisson, plein de ressentiment, devait le traiter de "golden boy de la politique".

Mais "le mauvais génie"(?) de la droite avait une boulimie d'activités. Lots de consolation, diriger la chaîne "Histoire" et bâtir des films documentaires ne suffisait pas à le tirer de peine. Les documentaires de Buisson sont à l'image de ses analyses, équilibrés. Ils sont d'une grande exhaustivité historique, exposent tous les faits sans occulter ceux qui desservent la cause embrassée par le documentariste, ce qui nous change et nous sort du journalisme ordinaire, et feignent de n'être pas de parti pris, mais dissimulent leur point de vue comme le levain dans la pâte documentaire.

Cependant l'activisme du documentariste devait lui faire retrouver le cambouis du marigot politique pour y remettre les mains et rechercher dans ces bas-fonds providentiels une nouvelle personnalité sur qui jeter son dévolu et que coacher. C'est ici que les ennuis recommencent pour Patrick Buisson.

Quelle mouche l'a piqué de prendre Wauquiez au sérieux et de s'imaginer que quiconque pourrait durablement croire aux balivernes de ce faux jeton, qu'on prendrait aisément pour un premier de la classe aussi falot que faillot, qui ne serait pas dénué d'intelligence, mais aurait bâti sa réussite en subtilisant les notes de colle des vrais bons élèves tout en les dénonçant quand un mauvais coup ayant été commis, le professeur chercherait un responsable qui se dénonce, sinon il punirait toute la classe...? Première erreur de casting que le choix de Wauquiez par Buisson,l'âme en peine, cherchant à se recycler et voulant trouver de la peine à se donner pour un homme à modeler.

Si ce n'est pas Buisson qui a conseillé à Wauquiez de choisir Bellamy comme tête de liste de la droite aux européennes, ce choix ressemble tellement à un conseil de Buisson qu'on croirait le lui entendre souffler en trompe-l'oeil. Mais bellamy n'est pas à la hauteur des espérances placées en lui par son improbable mentor dont il entraîne la chute pardémission. Comme il a fait se rétamer son camp, Buisson, dont Bellamy incarnait pourtant la ligne, libérale, sociale et conservatrice, renie la ligne et le choix de Wauquiez.

Il revient à ses premières amoures et s'isole dans le bastion lepéniste jamais en mal d'une querelle d'Atrides, hier entre le père et la fille, aujourd'hui entre la nièce émergente et la vieille tante indigne qui ne veut pas se retirer du jeu bien qu'elle ait largement démontré son seuil d'incompétence dans le débat d'entre-deux-tours de l'élection majeure dont elle était l'out-sider. Son instinct ne trompant pas ce limier de Buisson, il choisit d'abord la nièce et sa jeune beauté, d'autant qu'elle aussi incarne sa ligne. Puis il la renie, explique "Le Figaro", elle et lui jouant à contre-emploi.

Dans "La cause du peuple", Buisson expliquait que la reconquête du pouvoir serait l'afaire de cinquante ans. Il reproche à la nièce d'avoir la vue longue et de ne pas avoir une stratégie pour 2022, mais de réunir des personnalités pour plus tard dans un remake de "La droite hors les murs" imaginée, avant Robert Ménard, par "le club de l'horloge".

Il dîne avec la tante et la félicite d'ambitionner de réunir sous sa férule identitaire les blessés de la gauche et les imprécateurs des soupes populaires accusant les étrangers de leur voler leur pain. Il applaudit sa nouvelle jument de retour de théoriser le front des populismes. Il y vient trop tard. Ce front n'était pas sa ligne, mais il était dans sa ligne de mire, puisque cet ancien conseiller de l'ombre de Sarkozy avait approché Mélenchon et que "La cause du peuple" ne cesse de parler le marxien au service du conservatisme que l'auteur appelle "le populisme chrétien", qui serait maintenant, à l'en croire, un simple avatar de la doctrine sociale de l'Eglise.

lundi 5 août 2019

Quelques pourquois économiques

Pourquoi ceux qui investissent dans la pierre préfèrent-ils laisser leurs logements vides que prendre le risque d’avoir des locataires qui leur laissent des impayés ? Pourquoi les écologistes continuent-ils de préférer construire des logements sociaux qu’appliquer la loi de réquisition des logements vides ?

Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il excepté l’investissement sur la pierre de l’abrogation de l’ISF ? Pourquoi ne lui fait-on pas grief de décourager l’investissement patrimonial, comme on a reproché à Roger Quillot qui peut-être en est mort, d’avoirtué l’immobilier en étant soi-disant trop favorable aux locataires ? Pourquoi le président de la République a-t-il donné par là le signe que la politique de la France se fait à la corbeille ?

Pourquoi faut-il reconnaître l’économie de marché au point d’approuver les marchés non seulement dans leur court termisme, mais aussi dans leur manière deprovoquer des crises économiques à chaque fois qu’ils s’affolent et sont pris de psychose collective ? Pourquoi l’actualité fait-diversifie-t-elle pour faire de la psychose une catégorie du politique au détriment de l’analyse qui n’aime pas les chiens écrasés ? Pourquoi la démocratie est-elle « le gouvernement du présent », selon l’heureuse formule de Charles Maurras ?

Pourquoi le capitalisme assume-t-il d’être la nationalisation des pertes et la privatisation des profits ?

Pourquoi la loi de l'offre et de la demande privilégie-t-elle l'offre au point de créer des besoins artificiels et ignore-t-elle la demande de continuer à produire un bien que l'offre veut remplacer ou a transformé en le mettant à jour? Pourquoi feint-on de croire par fidélité à Borjès et à sa "bibliothèqe de Babel" qu'Internet est une bibliothèque universelle et éternelle alors qu'il est soumis à un bug, une panne comme au bon vouloir de ceux qui l'administrent?

Pourquoi la République qui est la chose du peuple doit-elle être présidée et gouvernée par des corps intermédiaires qu'on appelle des "partenaires sociaux"? Pourquoi ne peut-on trouver nulle part une version écrite du "pacte républicain" et pourquoi le contrat social doit-il être non écrit selon Rousseau, alors que "l'expression de la volonté générale" ne fait aucun cas des lois non écrites défendues par Antigone et illustrées par toute l'œuvre de Sophocle?

Pourquoi existe-t-il une bureaucratie libérale dont la Commission européenne est l’emblème, et le libéralisme ne pourrait-il pas mourir de sa bureaucratie ? Si oui, pourquoi la mort du libéralisme ne pourrait-elle pas entraîner la mort du capitalisme ?

Pourquoi Jésus est-Il libéral, comme l’a montré Charles Gave, alors que le libéralisme est la politique du renard dans le poulailler, qui remise la charité au terrier du plan personnel, très loin du politique, mais prétend que les missions régaliennes de l’Etat sont d’assurer la sécurité de la propriété privée ?

Pourquoi le christianisme, qui se prétend la civilisation de la personne, n’assume-t-il pas le préjugé libéral de la libre disposition du corps, qui n’est que la conséquence de la liberté d’adhésion que le Créateur a accordée à la créature et dont Il a fait en quelque sorte une des, sinon la condition du salut ?

Pourquoi la liberté laissée à la créature humaine ne s’étend-elle pas au corps politique, la démocratie ne consistant pas à « mettre la vérité au voix », mais à mesurer le positionnement du corps politique (l’homme est un être positionnel) et son degré d'adhésion, à la fois vis-à-vis de ses conditions actuelles et éventuellement vis-à-vis de la Volonté de Dieu s’il existe et s’il est une Révélation qui permette de la connaître?