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samedi 17 avril 2010

Défense de Michel Onfray contre Elisabeth Roudinesco

Michel Onfray se prépare à publier un livre intitulé "LE CREPUSCULE D'UNE IDOLE" (en librairie à partir du 22 avril. Le prolifique auteur du "TRAITE D'ATHEOLOGIE" et de la "CONTRE-HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE" y déboulonne les mythes attachés à la biographie de Freud sans cesser de se revendiquer de l'héritage des maîtres du soupçon, de Nietzsche en particulier. Michel Onfray s'attaque à la statue du commandeur. Il n'en faut pas plus pour mettre Elisabeth Roudinesco en fureur. La psychanalyste n'a visiblement pas "tué le père"…

Le moins qu'on puisse dire est qu'Elisabeth Roudinesco, si elle est une historienne rigoureuse, n'est pas un modèle de tolérance. Le livre "LE CREPUSCULE D'UNE IDOLE" serait-il "truffé d'erreurs" ? Les analyses que fait Mme Roudinesco sur quelques thèses d'Onfray le sont aussi. En voici quelques-unes, principalement relevées au début de l'article, après quoi je ne saurais deviser d'autorité avec une spécialiste si au fait de son sujet, Freud, que Mme Roudinesco :

1. Où Mme roudinesco trouve-t-elle un principe de préfiguration chez Onfray, qui est un philosophe sans téléologie, pour qui rien n'est écrit d'avance puisqu'il n'y a pas de Dieu pour forger un destin ?

2. Onfray serait-il le premier à parler d'islamofascisme ? a l'opposé et de façon tout aussi sotte, Jules Moneroe a bien comparé le communisme à "l'islam du XXème siècle". Quoi qu'il en soit, ceux qui accusent l'islam de fascisme, mot-valise dans lequel on met n'importe quoi, oublient que le fascisme est totalement dépourvu de dimension théocratique. Or l'islam poussé dans ses retranchements islamistes, connaîtrait précisément une dérive théocratique et donc ne saurait être fasciste.

3. "Fondateurs d'un monothéisme axé sur la pulsion de mort, les juifs seraient donc les premiers responsables de tous les malheurs de l'Occident." Il est vrai qu'Onfray, parmi toutes les religions en général, prend en grippe le monothéisme. Mais où peut-on trouver trace d'antisémitisme dans son "TRAITE D'ATHEOLOGIE" ? quand Onfray veut mettre une religion à l'épreuve de sa critique, c'est le christianisme qu'il cloue au pilori, et il est vrai que cette posture-là est moins dangereuse, le christianisme ayant, pour ainsi dire, dans ses statuts de tendre l'autre joue.

4. Dans ce même ouvrage, Onfray prônerait, selon Mme Roudinesco, "une religion solaire, hédoniste et païenne habitée par la pulsion de vie". Or Onfray ne prône pas de religion du tout. L'accuser de paganisme, c'est le mettre de mèche avec la nouvelle droite, ce que Mme Roudinesco ne se prive pas de faire dans la suite de son article. Onfray ne saurait être païen puisqu'il est athée, bien que sa définition de l'athéisme ait laissé par mégarde une brèche ouverte à la foi :

"L'athée, écrit Onfray, c'est l'homme libre devant dieu".

Pardon ? Il y a un dieu devant Lequel être libre ? Mais les croyants n'affirmeraient pas autre chose en parlant de "sainte liberté des enfants de Dieu" qu'ils exercent devant leur père. Onfray aurait mieux fait de dire :

"L'athée est un homme libre de dieu".

5. Que Freud ait été accusé de pastiche, Elisabeth Roudinesco n'en fait pas mystère dans sa propre "HISTOIRE DE LA PSYCHANNALYSE EN FRANCE". Mais ce qui peut être écrit sous sa plume perd toute légitimité quand cela passe sous celle d'Onfray. De même, que Freud n'ait pas beaucoup aimé son père qu'il accusait de servilité coupable, Elisabeth Roudinesco le relève en détails, quand elle raconte la frustration éprouvée par Freud devant son père descendant du trottoir et ôtant son chapeau au passage de plus puissant catholique que lui dans cette vienne qui n'a pas coupé le cordon avec cette religion dominante. Et c'est en assistant à cette scène, nous dit Mme Roudinesco, que Freud rêvera d'être un Hannibal conquérant l'Occident, mais un Hannibal vainqueur cette fois pour de bon de la romanité.

6. Enfin, était-il acceptable que Freud se place en position d'analyste de sa propre fille sans entrer avec elle dans une relation impossible de manipulation sans exemple ? Que la cure ait duré quatre ou dix ans ne fait rien à l'affaire. Mais il faut dire que l'inventeur de la psychanalyse, qui a toujours supposé le miroir de l'analysant, s'est montré bien peu regardant sur la présence de ce miroir en faisant son autoanalyse. Le père de la science nouvelle n'a pas vraiment montré l'exemple... vous me direz qu'il pouvait faire ce qui lui chantait puisqu'il était le père. Par exemple, la cure de Gustav Mahler se déroula en quatre heures, au cours d'une simple promenade. Et voici Mahler délivré, si tant est que ce soit la fonction de la psychanalyse de guérir ses patients et de délimiter le seuil entre "le normal et le pathologique", qui a tant intéressé Georges Canguilhem, dont Elisabeth Roudinesco fut l'élève admirative...

6. Liaison ou pas avec Mina Bernays, Freud est en tout cas parti en voyage avec sa belle-sœur, et la chambre de Mina communiquait avec la chambre conjugale du ménage de Sigmund et de Martha chez qui Mina vivait, occasionnant au couple une dépense dont il arrivait à l'inconscient du rêveur Sigmund Freud de déplorer l'excès.

7. qu'Onfray puisse citer favorablement des analyses empruntées à Pierre debray-rizzen a de quoi le condamner définitivement aux yeux de Mme Roudinesco, elle à qui "le club de l'horloge" auquel elle décoche une flèche décerna le prix Lissenco...

Freud est-il blanchi par le sectarisme de Mme roudinesco et sali par les approximations d'Onfray ? Il faut reconnaître à tout fondateur de théorie le droit d'être paranoïaque. Freud ne l'a pas plus été que saint-Paul. L'ennui avec cet homme qui prétendit lever le voile sur l'inconscient des humains était que cela ne débouchât point sur "le sentiment océanique" qu'il récusait comme la plus dangereuse des "illusions". quand Socrate citait l'oracle de Delphes afin d'inviter quiconque à se connaître, c'était pour découvrir "l'univers et les dieux". Les mystiques chrétiens. Lancèrent la même invitation : mais c'était pour que l'âme s'humiliât devant dieu. Freud, défrichant d'inconscient, ne fait jamais que proposer une variation sur le même thème, seulement voilà : il n'aime pas la musique, et ce sceptique ne voit dans l'inconscient qu'une occasion de remonter de la reptilité magique à la rationalité réaliste, celle qui ne prend pas pour satisfiable "le principe de plaisir". si Freud doit être regardé comme un pervers, ce n'est pas, en tout cas, un pervers licencieux.


NB : on peut lire le livre de mon maître (au sens professoral, mais non dogmatique) rené Pommier qui vient de publier chez Bernard de fallois un brûlot intitulé :
"SIGMUND EST FOU ET FREUD A TOUT FAUX"…

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