Au début de septembre, flânant pitoyablement sur un trottoir de la rue de sèvres dans l’espoir d’acheter le nécessaire de toilette que je croyais avoir oublié chez moi, je fais la connaissance d’un petit gars qui me ressemble, par la spontanéité avec laquelle il s’offre à m’aider parce que, pourquoi pas… ? Nous déambulons dans le magasin, il fait les rayons, choisit pour moi les articles les plus adéquats, nous payons, nou sortons et puis je lui propose de lui offrir un coup pour le remercier et par-dessus tout parce que j’aime ces rencontres de hasard par quoi la vie nous téléguide, quand on la laisse faire, vers ceux dont la présence nous correspond et que la nôtre attire par affinité réciproque. Nous commandons le premier demi, nous nous racontons un peu nos vies. Tout à coup, je lui demande comment il s’appelle. Il me répond :
« Augustin ! »
C’est presque un cri d’étonnement qui s’arrache de moi :
- Ah… ! Sais-tu que tu portes le nom de la personne à la fois la plus harmonieuse et la plus tourmentée que le monde ait peut-être jamais portée ? »
- Pourquoi ? »
- Parce que Saint-augustin a trouvé en Dieu l’hôte intérieur qu’il abritait sans le connaître, « plus intime à moi-même que moi-même », disait-il, et qui lui a répondu :
« Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà trouvé » ; parce que ces noces d’amour au sein d’une intériorité se sont traduites par le dialogue intime qu’est ce formidable livre des « CONFESSIONS » où Saint-Augustin raconte à dieu l’odyssée de son âme et la formidable théodicée grâce à laquelle son cœur n’a plus été en peine de rien ; livre où encore, il fait de la philosophie devant Dieu, c’est devant Lui qu’il réfléchit, c’est devant lui que sa pensée balbutie et progresse jusqu’à des fulgurances inégalées, au point que s’impose comme une évidence à qui le lit qu’il y a quelqu’un au centre de cette conscience que je tutoie, que celui à qui je parle est Dieu parce qu’Il est ma voix intérieure, qu’Il a choisi de faire de mon cœur sa demeure et, quand il est venu y habiter, mon cœur débordait de ce que Dieu lui fût apparue comme ayant juste la taille convenable pour se coucher en lui, S’étendre en lui, en en faisant le tour sans détour, en l’emplissant, mais sans débord. Au point que, dans cette félicité de sérénité, tout son être placide pouvant remuer de toutes ses facultés décuplées et tranquilles, ce puits de science se serait écrié :
« Aime et fais ce que tu veux ! »
Mais, quelques livres plus loin, le même saint-augustin, voulant concilier libre arbitre de l’homme et presscience de dieu, s’enchevêtre dans une théorie de la prédestination si impossible à démêler que Calvin et le jansénisme se perdront dans ses fils. Mais surtout, voyant combien ne cesse de se ramifier dans la bible la « CITE DE DIEU » qui finit par être un tout petit réduit et le précarré d’un tout petit nombre d’élus, il envoie tous ceux qui n’en seraient pas, fussent-ils ses compagnons, ses semblables, des gens avec qui il aurait mangé et bu, croupir dans un enfer de consomption éternelle, où la flamme brûle toujours, mais ne consume jamais, vacille toujours et ne s’éteint jamais. Et son intimité de Dieu ne lui fait pas voir que, de lui, s’est retirée toute angoisse pour le prochain qui n’est pas admis, à son exemple, au paradis des délices qu’il a la chance de connaître, de l’intimité avec le Créateur. Le suprême écartèlement de cette harmonie se trouve précisément dans l’apparent ou tacite retrait total de cet angoisse.
- A la fois en harmonie et écartelé, c’est exactement ce que je suis, me répond l’augustin qui est assis en face de moi, mille quatre cent quatre vingts ans plus tard, sur la terrasse du balto, rue de Sèvres à Paris, . Il développe, et je vois que c’est vrai…
mercredi 24 novembre 2010
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