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vendredi 25 novembre 2011

L'intégration scolaire précoce

Chers amis,

N'est-il pas un peu tard pour aborder un sujet si sensible ?

Et peut-on encore inverser la tendance ?

De fait, nous avons beaucoup, sur cette liste, évoqué des préoccupations d'adultes.

Or, pour m'être entretenu ce matin avec un professeur en SAAAIS, pour avoir encore présent à l'esprit l'aveu que me fit la dernière directrice de l'école où je suivis ma scolarité jusqu'en 4²ème, je ne crois pas abusif de conclure un peu témérairement des acteurs de la vie scolaire qui ce que pensaient les acteurs de la vie scolaire qui s'en sont ouverts à moi de l'intégration des jeunes enfants, que celle-ci est loin d'être une réussite, mais qu'il ne faut surtout pas le dire, pour ne pas froisser l'education Nationale, ni les parents d'élèves.

La première a fait de l'intégration précoce des enfants handicapés un dogme, sous l'influence des seconds. On ne peut pratiquement plus s'y déclarer opposé sous peine de passer pour quelqu'un qui défendrait la discrimination. Or les acteurs de l'Education Nationale, les enseignants qui se trouvent avoir dans leur classe un élève déficient visuel, non seulement ne connaissent guère sa problématique et les ressources qui pourraient lui permmettre de poursuivre une scolarité normale, mais ne se montrent guère assidus lors des sessions de sensibilisation marathon qui sont organisées pour mieux les faire appréhender l'univers de leur élève, et ne sont jamais sanctionnés lorsqu'ils n'y participent pas.

Quant aux parents, qui ont obtenu de haute lutte de pouvoir mener une vie familiale normale avec leur enfant aveugle ou malvoyant de naissance, ils l'ont fait sans savoir qu'ils ne connaissaient pas les bases palliatives du handicap visuel, non sseulement le Braille, la géométrie ou la géographie adaptée, mais les moyens sensorimoteurs d'acquisition de l'autonomie pour un enfant déficient visuel, de la locomotion à la psychomotricité, à l'apprentissage du toucher et de l'habileté dans les travaux manuels.

Les élèves qui, très tôt, sont immergés dans le grand bain du milieu ordinaire, doivent montrer beaucoup de dextérité pour acquérir instinctivement des stratégies de contournement des obstacles qui se lèvent sur le chemin de leur acquisition du savoir, à commencer par le tableau noir.

Ces élèves, en sus, sont dans la situation d'un quasi "travail des enfants", certes pour leur compte, dans la mesure où ils font une quadruple journée : la journée scolaire proprement dite, les heures de permanence consacrées au travail avec leur professeur de SAAIS et leur Auxiliaire de Vie scolaire, le temps long du ramassage scolaire et les devoirs à faire à la maison.

La plupart des acteurs de la vie scolaire avec qui j'ai parlé conviennent que les élèves déficients visuels devraient suivre leur scolarité dans un Institut spécialisé durant les années du primaire, pour acquérir les bases qui leur sont propres et ne pas connaître l'épuisement et le combat dès la petite enfance, puis être intégrés, certes le plus tôt possible, mais chacun en son temps.

Est-il désespéré de faire entendre raison en haut lieu aux parents comme à l'education Nationale et de revenir sur ce dogme créateur d'anarchie scolaire qu'est la scolarisation obligatoire de tous les élèves, sans discrimination, dans des classes ordinaires ?

J'espère que non.

Toutefois, je suis conscient qu'il fautmitiger ce point de vue d'une nuance importante.

A vrai dire, nous sommes au milieu du gué, et il est trop tôt pour savoir si cette forme d'intégration obligatoire et précoce va développer l'intégration sociale ou non. C'est de fait la seule chose qui compte.

Quand ma génération est sortie de l'INJA (je suis né en 1973), on disait qu'une personne sur dix s'intégrait un emploi. Bref, la scolarité profitait selon sa suite logique à un dixième à peine de ceux qui l'avaient suivie. Il faut nuancer le bilan humain d'un bilan social pour lequel on n'a pas le recul nécessaire. Or la probabilité va dans le sens de prévoir que, plus tôt on aura côtoyé les autres, mieux on saura s'intégrer à leur monde et plus on se rapprochera de la normalité, qui n'est pas un horizon indépassable, mais avoir accès à un "bonheur normal" (l'expression existe, elle n'est pas de moi) est tout de même souhaitable.

En attendant qu'on ait pris ce recul peut-être faudrait-il proposer une "scolarité à la carte" sans abandonner, ni l'une, ni l'autre des deux possibilités de scolarité, mais en proposant la meilleure réponse en fonction de l'élève et du souhait de ses parents, à qui la société n'a bien sûr pas le droit de confisquer leur autorité.

On peut craindre que cette multiplicité de l'offre ne soit jugée trop complexe par les autorités de tutelle qui auraient à l'avaliser. Or, dans toute autre domaine, la sagesse du législateur veut que l'on propose ad experimentum, pour expérimentation, un nouveau modèle avant de l'évaluer. Cette coexistence des deux modèles avant qu'on soit en mesure de dresser le bilan social qui évaluera le modèle de l'intégration scolaire obligatoire pour tous les élèves dans le milieu ordinaire est donc de pure et simple sagesse législative.

Julien weinzaepflen

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