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vendredi 27 janvier 2012

Jeanne d'arc et robespierre

Torrentiel,

Sans tenir pour la monarchie constitutionnelle, sans être monarchiste, tu approuves et éprouves, m'écrivais-tu ce 21 janvier, de la nostalgie ou de la compassion pour la décapitation de Louis XVI, dont tu es pour que l'on fasse mémoire.

Bien, mais, qu'eut-il fallu faire du roi et de son engeance? En son temps, le patriotisme était bien né et mature, l'esprit dynastique n'était pas complètement mort, mais perdait de sa pertinence. Ce roi n'était pas un sot, je ne suis pas sûr qu'il ait agi, confiant dans son droit dynastique. S'il a fui sous l'influence de la reine, vers les frontières de l'ennemi, on ne peut pas, en toute rigueur, lui laisser le bénéfice du doute, il savait les conséquences de sa fuite, il savait ou devait savoir, qu'il sustentait l'inimitié contre la France. Que me chantes-tu là, Torrentiel? Que fallait-il faire en toute justice, et tu élèves au rang de martyre, un gouvernant insuffisant! Allez, mettons que ce soit de l'histoire fiction, mais qu'eut-il fallu faire?

Le traumatisme que tu atribues à cette action, je ne le connais pas, n'étant pas autochtone. Tu vois, certaines choses me manqueront toujours, quoi que je fasse. Ce traumatisme, j'en prends acte, mais il y a des arrachements nécessaires, des ruptures bénies. Bonne est la douleur qui libère et fait changer d'état. Il fallait bien, que ces choses fussent. Or, tu ne tiens pas pour la royauté constitutionelle, alors, qu'aurais-tu fait? Je n'ai pas, moi, cette filiation, ce vécu, ça n'est pas mon histoire, je suis ignorant de ces choses. Puis-je me permettre quelques remarques?


Mettons que je prenne Louis XVI, comme un gouvernant et la royauté héréditaire comme une gouvernance. Il est permis de juger un gouvernant failli, et là-dessus, je suis très sévère. Il est permis de juger une gouvernance faillie, rendue impropre aux temps nouveaux.

L'indulgence, ne convient qu'aux délits et crimes ordinaires, de droit commun. Il est permis d'alléger les peines, si on pense ne pas nuire au bien commun. Mais, grand Dieu! Quelles sont les circonstances atténuantes d'un gouvernant? En cette occurrence, ne parles pas d'indulgence ni de pardon, alors que tu sais, qu'il s'agit d'un parti-pris. S'il arrive, comme à présent, concernant certains gouvernants Arabes, qu'ils bénéficient d'immunités qui s'étendent visiblement, jusqu'à une partie des trésors volés, avec la complicité des puissances, ce n'est hélas que concessions et accomodements, rien d'autre. Il est advenu, dans l'histoire de la France, qu'un roi traître subît un châtiment aproprié, parce qu'on avait le moyen de l'apliquer. Trouves-tu rien à redire à ça? Dans la mesure où un bon gouvernant, reçoit de son peuple, des louanges et témoignages d'amour, extrêmement agréables, dont nous n'avons aucune idée, dont n'aproche que le sort heureux de certains artistes, dans cette mesure, il est juste qu'un gouvernement failli ou insuffisant, subisse le blâme public, sans atténuation. Ma haine des mauvais gouvernants, je ne veux pas qu'elle s'atténue, je la nourris volontiers, si graves sont leurs fautes. Je n'admire pas l'émir Abdelkader, coupable d'échec militaire. Je maudis le Khalife El-Moutawakil, dont l'incurie fut telle, qu'on ne s'avisa de l'arrivée des Tartares, que lorsqu'ils se sont trouvés à trois jours de marche de Bagdad! Je crie à la face des gouvernants insuffisants, qui ne sont pas assez dévoués à leurs peuples! Un bon gouvernant abdique devant l'échec. C'est à grand-peine que le peuple d'égypte et toute la Nation, retint notre grand raïs Nasser, après l'échec de 67! Que fût-il advenu, si ton roi, suivant l'Autrichienne, se fut réfugié chez l'ennemi de la France? Où commence le mal d'un gouvernant, la tyrannie? Elle commence exactement à l'instant où il goûte un repos indû, où le sort du peuple ne le tourmente pas assez et ne trouble plus son sommeil. La tyrannie commence lorsque le gouvernant ne soufre pas assez, oui, c'est cela, qu'il ne soufre pas ce qu'il faut, au service des citoyens. Tu trouves tolérable que ton roi soit faible, et que l'Autrichienne l'ait entraîné, et te voilà bientôt versant des larmes sur son sort. Trêve de sentimentalité, Torrentiel! Le sort d'un peuple ne doit pas dépendre de faiblesse ou force d'un roi, ni de ses états d'âmes. Voilà pourquoi, le pouvoir personnel, doit être réduit le plus possible, au profit de mécanismes de prises de décision moins incarnés, d'appareils.

Et puis bon, je vais être plus grave, pour être d'accord ou pas d'accord. Ton roi tint encore des propos de cours, à l'heure suprême, s'est enquis de je ne sais quel marquis ou cardinal. Trait d'esprit et mièvrerie, page qu'il fallait tourner avec violence. Puis, le pire est qu'il s'est prétendu innocent, l'âme tranquille, chargeant son peuple d'accusations. Et ceux qui se croient des bonnes âmes, nous ressacent ce trait, d'une écoeurante ambiguïté. Il eût dû confesser ses tares et faiblesses, se flétrir et s'exécuter lui-même, ton roi! Ne me reproches aucune dureté de coeur, tout au contraire. Transiger c'est être peu sensible au sort commun. Si ces propos font mal à l'âme, je ne veux pas m'en excuser.

Où vois-tu du paradoxe, entre l'amour de la sainte pucelle, et l'exécution d'un roi faible, donc criminel? Au temps de Jeanne, le patriotisme consistait à tenir pour le roi légitime contre l'usurpateur étranger. Est-ce du royalisme? Tu m'as fait part, qu'il lui confia le royaume, puis qu'elle le lui rendit, pourvu qu'il exerce son règne sous la loi du roi des cieux. N'est-ce pas qu'elle entendait que le roi exerce son pouvoir, dans les limites des volontés divines, étant sujet d'un plus grand que lui? N'est-ce pas, en germe, une proto-constitution? Si on admet le principe de constitution, ou de loi supérieure, on arrive nécessairement, à ce que le gouvernant doit être choisi parmi les plus conformes à cette loi supérieure. La notion de constitution ou loi supérieure, est la génèse même, du passage de la royauté à la république. La pucelle fut livrée par le roi, et souffrit sa passion sans ambiguïté ou manque de rigueur. Sa douceur n'est pas suspecte, cette dame est limpide comme la justice.

Pour moi, le second héros de la France, est Robespierre. Une France embourgeoisée, ambiguë, corrompue par suite d'une longue prospérité, couvre de blâme cet homme pur, tout comme elle délaisse la sainte pucelle. Ce gouvernant sut tenir la France, que la faiblesse des traîtres eut livré aux ennemis qui l'eussent démembrée, se partageant ses dépouilles. Par la colère de Dieu, il a forgé dans les épreuves la force de la liberté, il a imposé à l'Europe cohalisée le sentiment d'impuissance face à la France libre et nouvelle. Dieu vient en aide aux agissants.


Rodomont à l'âpre justice.

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