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mardi 11 décembre 2012

Entretien sur l'Esprit, deuxième contribution, ma réponse à benoîte.

chère benoîte, Je m'attendais à être décontenancé par votre texte, la distinction "Esprit-Saint" et "Saint-Esprit" n'est pas si commune, mais je dois dire que je suis étonné, voire même désharçonné, au-delà de ce que j'imaginais. Tout d'abord, cette distinction, êtes-vous bien sûre que l'eglise la fasse ? Si vous prenez la version actuelle du symbole de Nicée, le "credo" nous y fait dire : "Je crois en l'Esprit-Saint" ; si vous prenez la version vieillie du symbole des apôtres, la formule portait : "Je crois au saint-esprit" (un peu comme on aurait pu dire "je crois au Père Noël"…), ce qui fait que la version a été remplacée par : "Je crois en l'Esprit-saint", car la ficelle était grosse et allait au-delà d'une erreur de traduction, d'autant que le latin distingue, à ma connaissance, le "Dominum vivificantem" de Nicée (que vous définiriez comme l'esprit-Saint, si je vous suis) et le " spiritum sanctum" du symbole des apôtres (qui relaie leur expérience du saint-Esprit). Ce qui me désharçonne est que vous êtes sans doute la personne qui a donné la définition la plus belle de la sainte Trinité que j'aie jamais lue : "Dieu s'engendre fils de Lui-même", je croyais que vous aviez continué : "par le saint-Esprit", mais non : il y a une cohérence de votre pensée : Il ("Dieu…) s'engendre fils de Lui-même par l'action... du saint-esprit." Ce qui est troublant est qu'aussi bien quand vous parlez du saint-Esprit que de l'esprit-Saint, vous qui avez donné cette définition magnifique de la trinité, vous paraissez presque sortir l'Esprit-Saint de la trinité, ne plus en faire qu'une action dans le premier cas, une intelligence de la mission apostolique dans le second cas, où vous annoncez presque explicitement que, ce qu'ont reçu les apôtres, ce n'est pas la Troisième Personne de la trinité. Or je crois qu'on pourrait vous répondre, si l'on reprend et accepte votre distinction, si on parvient à en situer profondément les sources dans la théologie la plus ancienne de l'eglise, que le Saint-Esprit est en tout cas la troisième Personne de la trinité, en tant qu'elle est configurée à la nature humaine du christ, tandis que le saint-Esprit serait davantage configuré au verbe. l'intelligence et l'action sont confondues par Bergson comme les premiers attributs de l'être humain, qui commence par trouver le verbe avant d'être en capacité de nommer, de même que les noms propres seront ce que sa mémoire perdra les premiers. Or, intelligence et Action sont volontiers identifiées au verbe divin, qui est à la fois Action et sagesse. Vous savez sans doute que, pour les orthodoxes, la sagesse n'est pas l'identifiant de Jésus, mais celui de l'Esprit-Saint, Lequel est "le féminin de dieu", donc est inactif, puisqu'Il n'est pas le principe masculin créateur (je fais ici un détour par l'Inde). Vous avez l'air de préférer la dialectique ténèbres-Lumière, être-néant, chair-esprit en vue de la réunification du corps-esprit, à une manière de dire qui séparerait davantage, ou attribuerait telle qualité à chacune des Personnes, des hypostases de la Trinité. Par exemple, comment comprenez-vous que "Dieu est esprit" ou que "l'esprit est vie", "la vie étant la Lumière des hommes" - moi aussi, cette phrase m'a toujours frappé, et je vous suivrai volontiers pour dire que le prologue de saint-Jean nous éclaire plus que la genèse, à moins qu'il soit un abrégé de la genèse, dont il faudrait que nous trouvions le décalque terme à terme, ce que je crois. - ? Parce qu'au moins, une chose paraît certaine dans la genèse : c'est que "l'esprit planait sur les eaux" (donc à la fois circulait, mais pas comme un principe actif), puis a insufflé la vie ; mais avant cela, "la Lumière" a été une créature, à laquelle ensuite, Il a plu à dieu de s'assimiler, au moins allégoriquement, mais tout de même au point de faire de la Lumière un attribut divin, puisque Saint-Jean a défini dieu comme amour et Lumière. Vous mettez souvent l'accent sur la Lumière ; et en vous lisant, me venaient ces belles paroles de cette litanie de tayzé : "Ma ténèbre n'est point ténèbre devant Toi. La nuit comme le jour est Lumière." Ah, si seulement nous pouvions être devant dieu des êtres d'avant la séparation du jour et de la nuit, osant la fruition du paradis déjà retrouvé plus qu'en espérance par la rédemption, au point de vivre nus à la face de dieu, dans un sentiment d' innocence recouvrée, en même temps que notre esprit cesserait de mettre dieu en procès et acquiescerait à l'Innocence fondamentale de la sainte enfancedivine. Je vais paraître me contredire, mais Une autre chose m'étonne dans vos propos : vous reprochez aux chrétiens une trop grande "obsession du péché" ; vous êtes plutôt mystique, en ce sens que vous approchez de la réalité de "l'Union à dieu" ; or les mystiques se sont toujours distingué(e)s par le très grand sens qu'ils avaient de la gravité du péché. Une gravité source de réparation presque perpétuelle. Une réparation que nous devons avant tout à dieu, dans la mesure où, dit le vieil acte de contrition, "le péché Lui fait horreur". Dieu a horreur du péché, et c'est même ce qui crée entre Lui et nous un principe de séparation. Remarquez qu'à titre personnel, vous compensez ce qu'on pourrait percevoir en vous comme un "déficit du sens du péché" par une très grande crainte révérencieuse devant la Sainteté de dieu. C'est cette crainte qui vous fait me trouver léger d'avoir osé ajouter, dans "LA MESSE DES AFFAMES" quelque chose aux paroles du "notre Père", dont il faut tout de même se souvenir que dieu ne l'a pas prié, comme vous me le disiez ; s'Il l'a prononcé, c'est pour nous apprendre à le prier, ce n'est pas la même chose. Le "nous" du "notre Père" est celui des disciples et se distingue du "Je" Absolument singulier de la relation Père-fils, laquelle nous est constamment présentée en saint-Jean, tellement bilatérale qu'on n'est pas étonné, à la vérité, que les chrétiens, après avoir reçu l'Esprit-saint dans un violent coup de vent et avant qu'Il ne les console, n'aient pas vraiment su où Le mettre et n'ont rien trouvé de mieux à En dire que c'était l'amour qui Unissait le Père et le fils, comme si, même par analogie, on pouvait supposer que l'amour Qui cimente une relation eût une vie indépendante de celle-ci. Pour ma part, j'ai une certaine difficulté avec le fait qu'on ramène trop facilement notre religion à l'idée d'un dieu Personnel, et je me suis laissé aller à dire il y a quelques jours aux personnes avec qui j'étais que je préférerais de beaucoup que l'on parlât des trois Hypostases divines en nous réservant à nous, pauvres masques, toujours désireux de tracer un sillon dans l'histoire, l'appellation de personnes. Les trois hypostases divines sont trop consubstantielles les Unes aux Autre pour consentir à être appelées Personnes, si ce n'est pour nous être apparentées, et pour permettre que notre religion soit la seule, me répondit-on, qui permît d'établir un pont entrel'humanité et la divinité. Voici qui peut nous faire davantage toucher du doigt à quoi se rapporte l'esprit (sans que demeure pertinente, souffrez que je le conteste, votre distinction entre Esprit-saint et saint-esprit) et quelle est la Nature de la troisième Personne de la trinité : Dieu Est esprit et vie, l'Esprit est la vie de dieu, la vie est ce qui permet aux éléments d'entrer en relation, c'est de même par l'Esprit que nous sont insufflées la première comme la "seconde vie" qu'est le salut, l'Esprit est donc ce qui a permis au Père et au fils d'entrer en relation, car c'est tout uniment la vie divine. Dans l'esprit, la vie est la qualité commune intérieure au Père et au fils, Dont le Premier engendre le second, à l'intérieur d'une même vie qu'ils partagent. et en eux, ce principe de vie se confond avec l'amour. C'est en ce sens que vous avez peut-être raison de dire que le péché contre l'esprit se rapporte à refuser la vie divine. Mais je le formulerai plutôt ainsi que je ne reprendrai votre affirmation, que le péché contre l'Esprit consiste à ne pas reconnaître l'Action salvifique de dieu, car le salut n'est pas facile à reconnaître. Vous raisonnez come s'il était déjà transmis jusqu'aux extrémités de la terre. Beaucoup d'hommes ne comprennent pas l'économie du salut, ni pourquoi elle se superpose à la vie de simple créature, à moins que, selon vous, l'inconscient ne soit déjà le réservoire du salut, en quoi vous seriez en contradiction avec Jung - on en a le droit -, pour qui "l'inconscient n'était pas dieu". Tout au plus était-ce le vide qu'a laissé dieu, le vide qui est en attente que dieu vienne y occuper toute la place. Ce qui est sûr, c'est que, si le christ, "Elevé de terre", est désormais en mesure d'attirer tout à Lui, c'est qu'il y a quelque chose de l'inconscient, ou pour être moins restrictif, de l'inconscience de l'homme, qui lui appartient déjà et que le péché contre l'esprit pourrait se ramener à ne pas aimer la vie, à se complaire dans la pulsion de mort en feignant de ne pas trouver de valeur à la vie. Je dois dire que vous m'avez fait clarifier mes idées sur l'esprit, et j'ai déjà beaucoup médité sur cette troisième Personne de la trinité. Bien à vous Julien

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