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mercredi 3 avril 2024

Nicolas Sarkozy, antécédent de Donald Trump...

Je ne sais pas pourquoi je me suis demandé aujourd’hui quel était l’antécédent de Donald Trump et pourquoi je me suis désolé que ce ne soit pas Jean-Marie Le Pen, sur lequel j’avais écrit en 2002 un « Journal politique » que je ne désespère pas de corriger et de publierun jour. J’aimerais tellement que tout vienne de France… Mais non. JMLP est un solipsiste insolite produit par le génie français. Donald Trump est un patron de night-clubs et de casinos pouvant être récupéré par les évangélistes américains. Ces deux populismes sont fondamentalement différents. Le populisme américain n’a pas besoin d’aimer le peuple américain, il n’a besoin que de faire corps avec son rêve ou avec sa « way of life ». Le populisme français à la sauce frontiste s’est lui-même défini comme un exercice de tribun de la plèbe, c’est-à-dire qu’il est inconsistant et impuissant. Le populisme africain qu’on voit émerger au Sénégal au jour où j’écris ces lignes paraît procéder d’un véritable amour du peuple.

 

Mais je n’oublie pas ma question d’origine : quel est l’antécédent du trumpisme ou à quoi et à qui peut-il être comparé en France ? Il me semble que « Sarko l’amerlo » comme on l’appelait avant qu’il ne devienne président de la République était un trumpiste avant la lettre. Tellement intuitif qu’il a rebaptisé son parti »les Républicains » avant que Donald Trump ne transforme le parti républicains à son image « énergéticienne », comme disait Tony Blairà propos de Nicolas Sarkozy.  

 

Le trumpisme repose sur un culot démagogique inouï : »Même quand j’ai perdu, je dois dire que j’ai gagné », le persuadait l’avocat qui l’a le plus influencé avant de le lâcher. C’est le summum de la dénégation. Nicolas Sarkozy était un peu dans cette manière de fonctionner, qui émaillait ses interviews de questions moins oratoires que dialectiques et rhétoriques, et destinées à amener les journalistes dans son giron.

 

Le trumpisme est un antisionisme, croyaient les soraliens. Erreur fatale : c’est un likoudisme multilatéral et pragmatique. C’est un anti-atlantisme, croyaient-d’autres et sur ce point, ils avaient raison. C’est une apologie, non pas de l’isolationnisme, mais du multilatéralisme.

 

Au contraire, le parti démocrate américain est intrinsèquement néo-conservateur. « L’Amérique continuera à diriger le monde », se réjouissait Bil Clinton à l’orée de son mandat. « L’Amérique » que Donald Trump voulait plus grande « est de retour » « pour diriger le monde », prévenait Joe Biden en guise de bonne nouvelle pendant la campagne qui l’a fait élire.

 

Donald Trump n’aurait pas déclaré la guerre à la Russie. Nicolas Sarkozy non plus. C’est sur ce point qu’il a cessé de cautionner le macronisme. Nicolas Sarkozy était aussi russo-réaliste que son ex-premier ministre François Fillon. Ce n’est pas lui qui aurait accepté que Vladimir Poutine ne soit pas invité pour commémorer le soixante-dixième anniversaire du Débarquement de Normandie.

 

À l’opposé, François Hollande s’est montré d’emblée néo-conservateur et on peut se demander pourquoi. Je n’ai pas la réponse, mais j’observe que François Mitterrand nous a engagés corps et bien dans la Première guerre du golfe. Jacques Chirac a refusé la logique qui consistait, entre la première en 1991 et la deuxième en 2003, à y engager la France au nom de la cohérence entre les deux « séquences » et on tient ce retrait pour son plus grand acte politique.

 

François Hollande s’est montré néo-conservateur jusque dans son néo-colonialisme centre-africain ou malien. Emmanuel Macron s’inscrit dans la suite de François Hollande sur la conflictualité politique (« nous sommes en guerre », a-t-il répété comme lui). On pourrait donc croire qu’il parle le même langage. Mais justement, ce qui distingue l’apparente hésitation macronienne du néo-conservatisme assumé de son prédécesseur, c’est le langage.  Emmanuel Macron feint de parler le langage du multilatéralisme, mais est tout aussi néo-conservateur ou néo-colonialiste que le président qui l’a formé et promu. Mais son double langage et cette différence entre les intentions et les paroles dans un monde qui va vers des populismes qui aiment le peuple et ne méprisent pas les autres nations l’ont démonétisé. Emmanuel Macron déclarait que l’Otan était en état de mort cérébrale tant que Donald Trump était au pouvoir. Joe Biden a trouvé un moyen de ressusciter l’Otan dans la guerre en Ukraine et Emmanuel Macron a mordu à l’hameçon. Que dira-t-il quand et si Trump sera réélu, tellement Harpagon que l’OTAN ne lui paraît pas une donnée stratégique de sécurité, mais que, menace-t-il, si les alliés ne payent pas, il soutiendra et encouragera Poutine à les attaquer ?

 

La France s’est construite comme une sociale-démocratie conflictuelle, contrairement à l’Allemagne, mais n’a jamais été une démocratie directe. Les Gilets jaunes ont déploré cet état de fait. Le philippisme (du nom d’Édouard Philippe) cherche à refonder la droite sur la sociale-démocratie municipale et corporative. La démarche est honorable, mais elle est anachronique. Quand nous sortirons de la guerre d’Ukraine, les démocraties devront se refonder sur un populisme qui aime le peuple sans être xénophobe. La droite philippiste est d’un légitimisme suranné.Mais Édouard Philippe a le mérite d’être un honnête home, contrairement au président qui l’a mis en selle. 

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