Discussion hier avec un ami dont, ne sachant pas s’il souhaite être cité, je tairai le nom à moins qu’il ne se nomme lui-même. Il me demandait raison, pour simplifier, de mon parti pris pacifiste et par ricochet poutiniste par la force de la loi qui veut que nos moins pires ennemis sont nos amis tactiques ou stratégiques d'un moment puisque nous partageons provisoirement le même but de guerre oudans mon cas de paix. Il m’a poussé dans mes retranchements et nous avons eu une bonne discussion. Lui croit à la menace russepuisque ce sont les services secrets qui le disent. Moi, je crois à la Russie éternelle, éternellement menaçante et je n’identifie pas de menace russe plus forte aujourd’hui qu’elle l’a toujours été et le sera toujours.
La politique trumpiste est une grande inconnuemarquée du sceau de l’imprévisible. Trump est à la main de Poutine et Poutine n’est pas à la main de Trump malgré ses foucades qui se sont avérées ce qu’elles étaient, incapables de résoudre en vingt-quatre heures un conflit qui, lui président, ne se serait pas ouvert, tant Poutine n’aurait rien osé prendreà Trump comme (sic) « il a pris la Géorgie à Obama et l’Ukraine à Biden » et non aux Géorgiens ou aux Ukrainiens.
Le projet civilisationnel de Poutine se limite à vouloir reconstituer l’aire russe. « Ce qui veut dire que, sous prétexte qu’il y aurait des russophones dans un pays, on serait condamné à laisser Poutine envahir ce pays ? » C’est la limite de mon pacifisme et c’est en effet le point commun que Poutine a avec Hitler, sauf que lui était un envahisseur force-né, qui envahissait moins pour reconstituer une Germanie fantasmée que par goût de la guerre totale. La limite qu’on devait opposer à Hitler était la Pologne et en cela, les anti-Munichois avaient raison. Je prétends que la limite qu’on doit opposer à la Russie est la même, mais pas les pays Baltes, dont il n’est pas tout à fait à exclure que Poutine veuille les envahir, la vraie question étant : quelle réponse internationale concertée, donc onusienne et issue d’une ONU qui se comporte en vraie démocratie des nations, sans membre peermanent au Conseil de sécurité créant un pôle dictatorial dans cette démocratie des nations, doit-on opposer à Poutine pour qu’il cesse ses menées invasives ?
Cette réponse n’est certainement pas belliciste et belligène et ne repose pas sur l’inflation de l’armement européen. Comment la même Europe qui n’aimait pas la guerre des étoiles de Reagan qui s’en est pourtant servi comme un levier pour se débarrasser du soviétisme, trouverait-elle dans cette résurgence anachronique du reaganisme une réponse adaptée à la situation internationale qui colle notre nez au guidon ?
La réponse n’est pas dans l’’armement européen, mais il faut pourtant une
réponse, même si je n’ai pas réponse à tout. Mon ami me force à en inventer une dans l’urgence
de la conversation, sans quoi je ne serais qu’un bau parleur. Et soudain je
trouve ceci : « Tu te rappelles qu’à Mastricht, Mitterrand et Kohl parlaient
d’élargissement européen en ayant en point de mire l’intégration de la Russie,
que cette intégration se fasse directement dans la confédération européenne ou
prenne la forme de coopérations renforcées. Tu conviens toi-même que nous avons
très mal négocié le respect du peuple russe après le traumatisme soviétique consécuutif
à la chute du mur de Berlin." Jepense que nous aurions dû dissoudre l’OTAN
en même temps que se dissolvait le pacte de Varsovie, mais nous n’avons pas
abordé cela dans la conversation. « Cette page est tournée, me dis-tu, et
ce qui est raté est raté. Et pourquoi donc ? D’abord je pense qu’une page
ne se tourne jamais. Si nous voulions sortir de l’antagonisme par le haut,
plutôt que de menacer « en Européens » (selon la nouvelle sémantique de Macron, donc comme il dit) la Russie contre laquelle nous ne ferions pas le
poids, nous pourrions raviver cette proposition qui était la fine pointe, car
la pointe utopique de Masstricht, et proposer à la Russie et à l’Ukraine d’intégrer
notre espace européen commun. Qui peut prétendre que Vladimir Poutine ne l’accepterait
pas, en l’état où en sont venues les choses ? Je raisonne peut-être en
diplomate du café du commerce, mais la diplomatie, ce n’est pas jeter de l’huile
sur le feu, c’est chercher et trouver des solutions constructives.«
Nous sommes sortis tous les deux contents de la discussion. « De
la discussion jailit la lumière » est un adage que j’aime bien répéter. « Mais
elle est devenue très difficile dans ce qu’est devenue notre démocratie. »
« Parce que tout le monde croit que la démocratie est un combat de coqs où
quelqu’un doit absolument l’emporter et que l’autre n’est guidé que par la certitude
d’avoir raison et d’imposer sa conviction à son contradicteur. Moi, je me fiche
d’avoir raison. J’ai à cœur de dire ce que je pense et de tenir à ce que je
pense. Cela me suffit largement. La démocratie n’est pas la victoire de l’un
contre l’autre puisqu’on ne l’emporte jamais que provisoirement, mais une
conversation parfois polémique, car on tient à ce qu’on pense, où l’on cherche
la vérité. »
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