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mercredi 13 mars 2024

L'encrier de Luther

Je ne connaissais pas l'épisode de l'encrier de Luther. C'est Dostoïevski qui me le fait découvrir. Et j'en apprends plus en me renseignant ici:

https://www.eleves.ens.fr/.../en_ligne/careme98/luther.html

"l'univers luthérien est habité de visions hallucinées qui distinguent en toute créature le " vieil ennemi ". On ne peut le reléguer dans son enfer : c'est une puissance réelle et permanente, le " prince de ce monde ".

Par ce personnage mythologique, Luther désigne le mal et lui donne une fonction théologique essentielle : diable (Teufel), monde (Welt), péché (Sünd) et mort (Tod) sont des termes équivalents qui tous expriment la corruption totale du monde et de l'homme qui ne fait qu'un avec lui. [...] Sa théologie du salut " postule un homme exsangue affronté à la puissance perverse du Malin. " (Jean Delumeau) " Si Dieu veut nous ouvrir le Ciel, il nous plonge d'abord en enfer. (Martin Luther) " Et Il nous en retire: "" Le combat que la loi livre à la loi pour que je sois en liberté, le combat du péché contre le péché pour que j'aie la justice, de la mort contre la mort pour que j'aie la vie, pour que je voie que le Christ est mon diable contre le diable afin que je sois un fils de Dieu " (Martin Luther)

Sainte Thérèse d'Avila a eu une vision de Martin Luther en enfer. N'était-il pas avant tout dans un enfer plein de lui-même? Et si l'enfer peut être vide, c'est qu'il n'est pas plein de nous-mêmes? Le salut ne se joue pas de Dieu contre nous ni entre nous et Dieu, mais entre Dieu et nous, de Dieuà nous. 

Or, "Le chrétien, dans la pensée de Luther, est totalement juste et totalement pécheur. Dans cet espace s'inscrit le combat spirituel du croyant, son itinéraire dramatique dans une alternative radicale et absolue, la damnation éternelle ou le salut gratuit. [...] Dans cette tension" (ou au prix de cette tension), "il puise la vitalité de sa foi." La vie du croyant " se passe, dans le gémissement du coeur, la voix de la parole, l'action du corps, uniquement à demander, chercher et supplier, pour être justifié sans cesse jusqu'à la mort, à n'avoir jamais d'assiette ferme, à ne pas se perdre dans l'habitude, à ne regarder aucune oeuvre comme l'accomplissement d'une justice acquise, mais à attendre cette justice comme quelque chose se trouvant toujours hors de portée et à être au contraire soi-même toujours dans la vie du péché " (Martin Luther) La victoire est certaine, mais en espérance."

"Le combat du chrétien, lorsqu'il s'inscrit dan le monde, devient événement. Luther comprend en effet l'histoire comme le théâtre du grand affrontement entre la Parole de Dieu et les puissances du mal." (Madeleine Wieger) #RolandKauffmann a dit un jour dans une rencontre de "la Théologie pour les nuls" que l'anthropologie luthérienne était profondément pessimiste, contrairement à ce qu'un vain peuple pense, qui pourrait aller de Michelet à tous ceux qui croient que la Réforme a été source de progrès. Luther était fait pour être contre-révolutionnaire et  le progressisme du réformisme luthérien semble fait pour être structurel comme une restructuration d'entreprise ou une gouvernance scandinave, contrairement au dilettantisme des "Gaulois réfractaires", accusés à raison d'être des pansus dépensiers.

Pour les 500 ans de la réformation, on a donné au temple St-Étienne de Mulhouse un opéra sur la vie de Luther. Une scène m'y a particulièrement choqué: à la fin de sa vie, Luther dit à sa femme Catherine, qui a quitté son couvent pour se donner à lui et qui aurait ouvert une auberge pour qu'il puisse continuer ses recherches, qu'elle ne lui avait servi de rien, comparé au Seul qui sauvait son âme.  

Le combat spirituel se ferait donc au mépris de la fraternité, dont l'enjeu serait ma réhabilitation personnelle. Il serait un enjeu entre moi et moi qui nie le prochain, qui n'est jamais qu'un "mort spirituel", en puissance, puisqu'avant de rencontrer le Christ, c'est bien ce qu'il était, me déclara un pasteur luthérien. 

Pour un catholique comme moi biberonné au sentiment de culpabilité inoculé en ma mère par son luthéranisme originaire, il y a quelque chose de terrifiant dans la théologie de Luther, et de plus terrifiant encore que mes propres "terrores conscientiae" (je dois la découverte de cette locution latine à Wilhelm Kreis à qui je suis apparenté).

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