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samedi 18 février 2012

La névrose comme guérissoire, ou les prescriptions de Jean-claude Liaudet

Je viens d'écouter une des interviews les plus hallucinantes qu'il m'ait été données d'entendre.

Il s'agit d'une interview donnée par Laurence Luret, dans le cadre de son émission "parenthèse" sur "france inter", réécoutable ou podcastable sur le site franceinter.fr, du psychanalyste Jean-claude Liaudet, qui vient de faire paraître un ouvrage intitulé :
"La névrose française" publié aux éditions Odile Jacob.

en gros, il s'agit d'expliquer que le français est à la fois en dépression, dans un deuil qu'il refuse de "faire", collectivement celui des "trente glorieuses", et dans une relation délinquante à la loi (le Français est donc collectivement un délinquant).

Il y aurait une pathologie individuelle qui s'intriquerait avec une pathologie du collectif.

Le collectif devenant délirant, se retournerait de manière oedipienne en haine de l'ennemi extérieur (l'europe, qui viendrait lui voler sa "mère patrie",) et de l'ennemi intérieur (après le juif durant la seconde guerre mondiale, l'étranger considéré comme sexuellement plus "puissant que lui: Jean-claude Liaudet donne l'exemple des Noirs tels que se les représente la fédération française de football).

Donc la réaction nationaliste, dans son avatar frontiste, antieuropéenne malheureusement xénophobe, on ne peut le nier, est d'emblée dépolitisée comme pathologique.

Selon l'auteur, il n'existe que deux régimes : le régime républicain, névrotique, qui a une relation trop obsessionnelle avec la loi, et un régime transgressif, soit un régime pervers, qu'aurait illustré Nicolas sarkozy en 2007, pour avoir fait l'apologie de la transgression (dans un entretien accordé à Michel Onfray dans "Philosophie magasine").

Prescription de l'auteur : "Mieux vaut revenir à une bonne névrose", c'est-à-dire à un régime républicain à danger minimal.

Ou comment être passée des "trente glorieuses" et de leur frénésie libertaire heureuse et fastueuse, non seulement à une exaspération réglementaire, mais à une pathologisation de la politique, disqualificatrice du peuple, qu'il vaut mieux à tout prendre aveugler (le remède oedipien) et endormir (par l'analgésie médicamenteuse) plutôt que de risquer que son "délire" ne le fasse exagérément attribuer un caractère hostile à ses persécuteurs éventuels, dans un ressaisissement paranoïaque, comme si toute geste héroïque n'était pas paranoïaque.

Voudrait-on que s'arrête l'aventure française qu'on ne s'y prendrait pas autrement.

Et voudrait-on accentuer la démoralisation des individus qu'on insisterait davantage encore, si on le pouvait, sur leur caractère maladif, la maladie étant plus accentuée par son diagnostique que par son déni, lorsque les signes n'en sont pas cliniquement attestés et incontestables.

2 commentaires:

  1. Croissant de lune é acrit:

    Sur ce que tu viens d'écouter, fais la part du verbalisme, surtout en matière de psychanalyse. Tout ça veut tout dire et rien dire. On en fit autant des Arabes. On a dit, depuis les années 70, que le Tunisien est malade, que l'égyptien est malade, eh puis après?


    Pour moi, on peut retenir jusqu'à un certain point, que la santé d'un corps social est la résultante de la santé des éléments qui le composent. Peut-on dire que la France est plus malade que l'Amérique? Je demande à voir.


    Pour décider si une personne est malade, je retiens un signe important, la déréalisation. L'individu déréalise, il n'a pas une analyse suffisamment proche de sa réalité. En même temps, quelles que soient ces perceptions du réel, ses comportements d'adaptation seront eux-mêmes peu rationels. Ses objectifs sont imprécis, il n'est pas sûr qu'il soit toujours dans l'instinct de préservation, par exemple. Un malade, pour moi, est une personne irrationnelle. Irrationnelle, quand bien même elle se croirait rationaliste, puisque le rationalisme n'est pas la rationalité. Il est possible qu'un corps social reflète graduellement et collectivement cet état de choses, en tenant bien compte, que la personne collective n'est pas la synthèse de personnes égales, les élites y jouant un rôle majeur, apparemment, du moins. La santé mentale des élites est difficile à apréhender. Notre Ibnou-Khaldoun, définit comme malade, celui qui, du fait de ses comportements inapropriés, ne sera pas capable de subvenir à ses besoins. Il faut bien entendre que subvenir à ses besoins ne se limite pas au simple travail, on est d'accord.


    Est-ce que la France est malade? Je crois que le Français tend à déréaliser, c'est évident. Est-il rendu à un point patologique? Je l'ignore, qui peut en décider, qui pose le diagnostique? Le regret des trente glorieuses est naturel, ce serait préoccupant si on ne regrettait pas un passé heureux. Je crois que le Français souffrait moins, en ces temps. Au contraire, ne pas regretter le bien serait un mauvais signe. La révolte envers des communautés minoritaires qui ont une force excessive, n'a rien de toxique, selon moi. La capitulation devant l'injustice est au contraire, un mauvais signe. L'hostilité à l'Union Européenne, ou sa critique, n'a rien que de rationel. Ce qui le serait moins, c'est de mélanger toutes ces phobies sans hiérarchies dans leur gravité. Il y a aussi, la résignation ou l'indifférence, mauvais signes. Le Français a une tendance excessive, il me semble, à se vivre comme faible, éventuellement victime. C'est une tendance probablement naturelle, qui semble s'accroître. La féminité générale, le rôle excessif de la femme, choses qui tendent à s'accroître, ne disent rien qui vaille.


    Alors, les réactions hostiles envers la mondialisation, l'Europe ou les migrants, laquelle ne devrait pas être aussi indistincte, ne relève pas à priorie, de la mauvaise santé. Du moment qu'on démontre que telle attitude est salutaire, je ne vois pas pourquoi elle serait psychiâtrisée. L'injonction d'aimer la mondialisation et tout ça, je ne vois pas en quoi ce serait rationel. Le Français a le droit d'exister en tant que France, fût-ce au travers de mécanismes extérieurs intelligibles, dans lesquels il jouerait son rôle. L'hostilité envers le migrant, elle-même n'a rien d'irrationel, on doit interroger sa rationalité voire sa moralité, mais rien de plus. On peut être malveillant, avoir des intentions mauvaises, sans être fou pour cela. Le fils de pute qui, l'été dernier, a fauché la vie de tant de beaux jeunes gens en Norvège, n'est pas pou moi, un fou, jusqu'à preuve du contraire. Le beur, qui en 2002, a frappé d'un couteau le maire de Paris, ne devait pas être interné, et le fut par abus, il me semble. Curieusement, on s'en tint là, on ne parla plus de lui.

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  2. (Suite)

    Est-ce qu'un pays, un corps social, peut un jour devenir incapable de se protéger et de se nourrir, faute de comportements rationels adaptés, sans égard à ses ressources? Pas impossible, des exemples vont dans ce sens, dans l'histoire. Le règne Ottoman s'éteignit cénile, comme l'empire de Chine. Dans ces cas, c'était clairement les dirigeants qui se trouvaient malades, plutôt que les peuples. Est-ce qu'un peuple tout entier, ou en grande partie, peut l'être? Je le crains. En France, les comportements irrationels, les choix toxiques vers l'échec, d'un grand nombre de jeunes, tendent à le faire croire. Ah, cette idée selon laquelle tout nous est ouvert, qu'on fait sa vie, qu'on peut tout faire, me semble relever de la maladie. Il suffirait que les jeunes de France fassent des choix plus solides, pour que dans l'ensemble, la France retrouve une meilleure santé. Le comportement au travail et dans la vie, il y a beaucoup de signes toxiques. Cela semble tenir au vécu d'une longue prospérité, c'est peut-être inévitable. Je proposais moi, des perspectives à la France, qui me semblent crédibles, jouables. Oui, la France pourrait inventer cette sorte d'hégémonie positive, donc transitoire, cet impérialisme de l'égalité, qui veut authentiquement faire de l'autre son égal, lui conférer de la force. Il semble qu'il n'y a plus dans la concurrence entre puissances, que cette carte à jouer. Par ce qu'elle est, la France est la meilleure candidate. Cela rendrait un niveau de prospérité probablement égal ou supérieur à ces trente glorieuses. Il y a un problème évident, les puissances se trouvent contenir des populations en situation de surformation, dont ils ne savent que faire. Il y aura concurrence à ce poste, seul le Français est assez généreux pour le concevoir. Hormis cela, à terme, je ne vois pas que l'Occident retrouve globalement de la prospérité, il semble condamné aux dérives oligarchiques sournoises. C'est probablement dans ce sens, qu'il faut décrypter ton psychianaliste, qui tend à limiter les voeux du peuple dans ses fourches caudines, ce qui lui semble acceptable. Donc, l'alternative est simple, soit la France s'empare de cette place naturellement acquise, d'impérialisme positif, celui qui te fait construire des bombes chez toi, et elle le ferait, en se désolidarisant d'un Occident déjà peu solidaire, ou bien le peuple de France perdra d'une manière ou d'une autre sa souveraineté, au moyen de menées oligarchiques sourdes et invisibles.

    Croissant de lune.

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