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jeudi 27 mars 2025

La protection de l'enfance

Quant aux enfants, « le Figaro » nous apprend que le nombre des enfants placés en vingt ans a cru de 40 %. Ce n’est pas un bon signe pour la société française, identifie le quotidien du matin. Ni cela, ni le fait que les enfants de France semblent frappés d’une épidémie d’hyperactivité et de troubles de l’attention, de TDH ou de traits autistiques si difficiles à diagnostiquer qu’on les appelle TSA et que l’autisme est devenu un spectre. (Cela dit, je préfère les spectres en psychiatrieà des assignations à résidence auxquelles on condamne les malades à vie.) Il y a vingt ans, une médium assez barrée d’ »Ici et maintenant » Monique Guérin, nous promettait des « enfants indigos » pour cette génération. Comme ils sont enfermés dans la coquille et dans le carcan d’un système scolaire qui n’a aucune intention de les comprendre ni de s’adapter à eux, les éduque au moins-disant et ne leur inculque que « la prévention des conduites à risques », leur agressivité se développe en réaction à ce système et leurs traits autistiques sont peut-être le versant incarcéré de cette épidémie d’inadaptation sociale et dintelligence allant trop vite et trop impérieusement droit au but. Robert Kennedy junior me semble dire quelque chose dejuste, non pas quand il affirme que les vaccins ont fait croître l’autisme dans des proportions hallucinantes (la modification génétique qu’a sans doute exercée ces vaccins n’a pas eu le temps de se révéler), mais que ce phénomène qui frappe près d’un enfant sur quatre, si je ne donne pas des chiffres fantaisistes, et fatigue des parents qui ne savent plus comment réagir tout en restant d’une incroyable patience, ce qui est un des facteurs expliquant l’accroissement du noombre de placements en masse, est un des traits majeurs et tus de l’évolution des générations, auquel il faut ajouter, last but sadest, le fait que la mortalité infantile, cet « indicateur fétiche » d’Emmanuel Todd, ait cru en France de 3,7 à 4,1 pour mille. Or le démographe a observé que la mortalité infantile était un des indices presque toujours certains de déperdition pour ne pas dire de décadence très profonde d’une société. Déperdition au sens de déperdition de l’énergie, car « la mortalité infantile était très faible sous Staline », et décadence comme perte des valeurs qui font qu’à la fois on ne veut plus faire denfants, on ne sait plus comment les faire, on n’a pas envie de les mettre au monde pour qu’au choix ils accroissent la charge de la terre ou soient désespérés, ou on n’a plus l’énergie de cette abnégation : « La mortalité infantile est passée en Russie sous la mortalité infantile américaine », a-t-il noté, voyant là un des facteurs de prévisibilité de sa défaite de l’Occident.

 

 

Et quant aux enfants, « le Figaro » nous apprend que le nombre des enfants placés en vingt ans a cru de 40 %. Ce n’est pas un bon signe pour la société française, identifie le quotidien du matin. Ni cela, ni le fait que les enfants de France semblent frappés d’une épidémie d’hyperactivité et de troubles de l’attention, de TDH ou de traits autistiques si difficiles à diagnostiquer qu’on les appelle TSA et que l’autisme est devenu un spectre. (Cela dit, je préfère les spectres en psychiatrieà des assignations à résidence auxquelles on condamne les malades à vie.) Il y a vingt ans, une médium assez barrée d’ »Ici et maintenant » Monique Guérin, nous promettait des « enfants indigos » pour cette génération. Comme ils sont enfermés dans la coquille et dans le carcan d’un système scolaire qui n’a aucune intention de les comprendre ni de s’adapter à eux, les éduque au moins-disant et ne leur inculque que « la prévention des conduites à risques », leur agressivité se développe en réaction à ce système et leurs traits autistiques sont peut-être le versant incarcéré de cette épidémie d’inadaptation sociale et dintelligence allant trop vite et trop impérieusement droit au but. Robert Kennedy junior me semble dire quelque chose dejuste, non pas quand il affirme que les vaccins ont fait croître l’autisme dans des proportions hallucinantes (la modification génétique qu’a sans doute exercée ces vaccins n’a pas eu le temps de se révéler), mais que ce phénomène qui frappe près d’un enfant sur quatre, si je ne donne pas des chiffres fantaisistes, et fatigue des parents qui ne savent plus comment réagir tout en restant d’une incroyable patience, ce qui est un des facteurs expliquant l’accroissement du noombre de placements en masse, est un des traits majeurs et tus de l’évolution des générations, auquel il faut ajouter, last but sadest, le fait que la mortalité infantile, cet « indicateur fétiche » d’Emmanuel Todd, ait cru en France de 3,7 à 4,1 pour mille. Or le démographe a observé que la mortalité infantile était un des indices presque toujours certains de déperdition pour ne pas dire de décadence très profonde d’une société. Déperdition au sens de déperdition de l’énergie, car « la mortalité infantile était très faible sous Staline », et décadence comme perte des valeurs qui font qu’à la fois on ne veut plus faire denfants, on ne sait plus comment les faire, on n’a pas envie de les mettre au monde pour qu’au choix ils accroissent la charge de la terre ou soient désespérés, ou on n’a plus l’énergie de cette abnégation : « La mortalité infantile est passée en Russie sous la mortalité infantile américaine », a-t-il noté, voyant là un des facteurs de prévisibilité de sa défaite de l’Occident.

 

Les parents qui veulent encore faire des enfants ne savent plus les élever, car ils tombent en adoration devant eux et en font des « enfants rois ». Les enfants n’ont pas à tomber en adoration devant leurs enfants, ils doivent les élever. Aujourd’hui les enfants ont fait leur et de bonne heure la question de l’anarchiste qu’ils posent sans ambages à leurs parents : « Qui t’a fait roi sur moi ? » et le père – celui qui dit la loi, surtout à son fils. À sa fillec’est plus difficile, il en a fait sa reine : le père est au moins autant amoureux de sa fille que la fille de son père –devrait lui répondre : « Cela ne te regarde pas », non pas pour conserver son statut de patriarche et son ascendant sur son enfant, mais pour le bien de l’enfant, dans l’intérêt de l’enfant, pour lélever.

  

jeudi 20 mars 2025

L'avenir européen de l'Ukraine et de la Russie

Discussion hier avec un ami dont, ne sachant pas s’il souhaite être cité, je tairai le nom à moins qu’il ne se nomme lui-même. Il me demandait raison, pour simplifier, de mon parti pris pacifiste et par ricochet poutiniste par la force de la loi qui veut que nos moins pires ennemis sont nos amis tactiques ou stratégiques d'un moment puisque nous partageons provisoirement le même but de guerre oudans mon cas de paix. Il m’a poussé dans mes retranchements et nous avons eu une bonne discussion. Lui croit à la menace russepuisque ce sont les services secrets qui le disent. Moi, je crois à la Russie éternelle, éternellement menaçante et je n’identifie pas de menace russe plus forte aujourd’hui qu’elle l’a toujours été et le sera toujours. 



La politique trumpiste est une grande inconnuemarquée du sceau de l’imprévisible. Trump est à la main de Poutine et Poutine n’est pas à la main de Trump malgré ses foucades qui se sont avérées ce qu’elles étaient, incapables de résoudre en vingt-quatre heures un conflit qui, lui président, ne se serait pas ouvert, tant Poutine n’aurait rien osé prendreà Trump comme (sic) « il a pris la Géorgie à Obama et l’Ukraine à Biden » et non aux Géorgiens ou aux Ukrainiens. 


Le projet civilisationnel de Poutine se limite à vouloir reconstituer l’aire russe. « Ce qui veut dire que, sous prétexte qu’il y aurait des russophones dans un pays, on serait condamné à laisser Poutine envahir ce pays ? » C’est la limite de mon pacifisme et c’est en effet le point commun que Poutine a avec Hitler, sauf que lui était un envahisseur force-né, qui envahissait moins pour reconstituer une Germanie fantasmée que par goût de la guerre totale. La limite qu’on devait opposer à Hitler était la Pologne et en cela, les anti-Munichois avaient raison. Je prétends que la limite qu’on doit opposer à la Russie est la même, mais pas les pays Baltes, dont il n’est pas tout à fait à exclure que Poutine veuille les envahir, la vraie question étant : quelle réponse internationale concertée, donc onusienne et issue d’une ONU qui se comporte en vraie démocratie des nations, sans membre peermanent au Conseil de sécurité créant un pôle dictatorial dans cette démocratie des nations, doit-on opposer à Poutine pour qu’il cesse ses menées invasives ? 


Cette réponse n’est certainement pas belliciste et belligène et ne repose pas sur l’inflation de l’armement européen. Comment la même Europe qui n’aimait pas la guerre des étoiles de Reagan qui s’en est pourtant servi comme un levier pour se débarrasser du soviétisme, trouverait-elle  dans cette résurgence anachronique du reaganisme une réponse adaptée à la situation internationale qui colle notre nez au guidon ? 


La réponse n’est pas dans l’’armement européen, mais il faut pourtant une réponse, même si je n’ai pas réponse à tout.  Mon ami me force à en inventer une dans l’urgence de la conversation, sans quoi je ne serais qu’un bau parleur. Et soudain je trouve ceci : « Tu te rappelles qu’à Mastricht, Mitterrand et Kohl parlaient d’élargissement européen en ayant en point de mire l’intégration de la Russie, que cette intégration se fasse directement dans la confédération européenne ou prenne la forme de coopérations renforcées. Tu conviens toi-même que nous avons très mal négocié le respect du peuple russe après le traumatisme soviétique consécuutif à la chute du mur de Berlin." Jepense que nous aurions dû dissoudre l’OTAN en même temps que se dissolvait le pacte de Varsovie, mais nous n’avons pas abordé cela dans la conversation. « Cette page est tournée, me dis-tu, et ce qui est raté est raté. Et pourquoi donc ? D’abord je pense qu’une page ne se tourne jamais. Si nous voulions sortir de l’antagonisme par le haut, plutôt que de menacer « en Européens » (selon la nouvelle sémantique de Macron, donc comme il dit) la Russie contre laquelle nous ne ferions pas le poids, nous pourrions raviver cette proposition qui était la fine pointe, car la pointe utopique de Masstricht, et proposer à la Russie et à l’Ukraine d’intégrer notre espace européen commun. Qui peut prétendre que Vladimir Poutine ne l’accepterait pas, en l’état où en sont venues les choses ? Je raisonne peut-être en diplomate du café du commerce, mais la diplomatie, ce n’est pas jeter de l’huile sur le feu, c’est chercher et trouver des solutions constructives.« 

 

Nous sommes sortis tous les deux contents de la discussion. « De la discussion jailit la lumière » est un adage que j’aime bien répéter. « Mais elle est devenue très difficile dans ce qu’est devenue notre démocratie. » « Parce que tout le monde croit que la démocratie est un combat de coqs où quelqu’un doit absolument l’emporter et que l’autre n’est guidé que par la certitude d’avoir raison et d’imposer sa conviction à son contradicteur. Moi, je me fiche d’avoir raison. J’ai à cœur de dire ce que je pense et de tenir à ce que je pense. Cela me suffit largement. La démocratie n’est pas la victoire de l’un contre l’autre puisqu’on ne l’emporte jamais que provisoirement, mais une conversation parfois polémique, car on tient à ce qu’on pense, où l’on cherche la vérité. »

  

mardi 11 mars 2025

La fenêtre d'Obertone

Je croyais que la fenêtre d’Obertone était la fenêtre de Laurent Obertone qui n’a pas donné son nom à cette fenêtre, mais  a choisi ce nom en fonction de cette fenêtre, même s’il a ouvert cette fenêtre en jetant de l’huile sur le feu, avec sa France orange mécanique, comme le fait « CNews » du matin au soir. »France inter » a consacré hier une émission à la fenêtre d’Obertone. Elle désigne la réflexion d’un lobbyiste qui s’est penché sur l’acceptabilité des idées pour donner plus de visibilité aux siennes.

« Le seul fait qu’on puisse en débattre rend une idée acceptable », constate-t--il. Selon moi, il ne devrait pas y avoir de débat interdit en démocratie.

Plus que de fenêtre, il faudrait parler d’échelle. Avant d’être acceptée, une idée gravit une échelle qui monte du scandale qu’elle provoque à la banalité, en passant par tous les espaliers intermédiaires.

« France inter » avait invité un sociologue qui voulait écrire un livre sur la fenêtre d’Obertone, mais fut bloqué dans son travail, car il ne parvenait pas à trouver comment la fermer. Pour « France inter » et ceux qui sont invitées sur cette station de service public (loin de moi de vouloir la « basher » comme les Gilles-William Goldnadel et autres apprentis-sorciers deCauseur), les idées qui n’auraient jamais dû être acceptées concernent la banalisation de la xénophobie chère au RN et avant cela les idées qui voudraient réguler l’immigration ou sous-tendraient implicitement ou explicitement comme Bruno Retailleau, à ne pas convenir comme autrefois Bernard Stasi, qu’elle est systématiquement une chance pour la france.

Une de mes amies pseudonomysée Régane, avait écrit un livre, Sa sœur, dont le passage le plus poétiquement sublime s’intitulait la Faim en état de synthèse, mais dont le principal intérêt sociologique consistait selon moi  à montrer quelque chose que j’avais connu dans mon enfance, bien que l’auteure provînt d’un milieu plus huppé, à savoir qu’entre la poire et le fromage, la bourgeoisie convenait qu’il y avait des faux chômeurs qui profitaient du système. Cete idée a passé la fenêtre d’Obertone jusqu’à la direction de France travail où on passe désormais son temps à traquer les faux chômeurs, ceux qui ne recherchent pas activement un emploi et ne sont pas convaincus que le travail n’est pas une émancipation, mais au mieux une occupation alimentaire et au pire un esclavage, quand ce qu’on fait ne nous intéresse pas.

Les médias sont très prééoccupés par l’éventualité que le RN qui n’a plus aucun contenu idéologique puisse un jour siéger à la tête de la France. Or l’idée qui est en train de passer la fenêtre d’Oberrtone est que peu importent les événements qui peuvent justifier l’escalade qui fit entrer notamment l’Europe dans la Première guerre mondiale dont la suivante fut la conséquence, »la Russie est devenue une menace pour la France et l’Europe » et il faut envisager de faire la guerre à la Russie, même si peu importe que les populations européennes soient en voie de paupérisation : il faut réarmer l’Europe jusqu’à la guerre des étoiles au moment où les États-Unis, non pas se pacifient, mais sont dans des logiques de conflits plus localisés et veulent éviter la guerre mondiale, quels que soient les défauts et la vulgarité de Donald Trump. 

vendredi 7 mars 2025

Jean-FrançoisColosimo ou la liberté de l'analyse... iconoclaste

Jean-François Colosimo : « Le pape François institue l’état d’urgence permanent »

 

Quand j'écoute opiner et phosphorer Jean-François Colo            simo sur bien des forumset analyser l’actualité sur bien des plateaux, je me demande toujours où est vraiment cet homme et quelle est non pas sa colonne vertébrale, mais son idée fixe, principale, directrice. Cet article du « Point » va-t-il m’en apprendre plus sur lui ? Et si j’analyse l’homme d’un point de vue médiologique pour parler cuistrement comme si j’étais un spécialiste des schémas d’analyse et de la pensée de Régis Debray, l’homme des jeux de mots, du Sentier lumineux, des dynasties bourgeoises et de Dieu, un itinéraire, je me demande pourquoil’ordre des prêcheurs lui a confié la direction des éditions du Cerf. Pourquoi n’ai-je pas posé la question au frère Éric de Clermont-Tonnerre que j’ai pourtant eu la chance et l’occasion de rencontrer quand j’étais formé par lui et d’autres au sein de l’École de prédication que ce spécialiste de l’homéleutique  fonda avec quelques autres ?

 

Mais c’est Jean-François Colosimo qui commence par analyser. Et par analyser le pontificat de François : « Le pontificat de François est à la fois de suture et de rupture. De suture, car il parachève la réception de Vatican II en redoublant la priorité accordée par le concile aux pauvres et aux périphéries. »

Les pauvres étaient-ils vraiment la priorité du Concile Vatican II ? Descendre de leur piédestal était la priorité de prêtres qui voulaient « décléricaliser » le modèle sacerdotal, sous l’influence de dom Elder Kamara et pour employer un vocabulaire cher à françois. »Les périphéries » étaient la priorité du Concile en ce sens que cette assemblée d’évêques a voulu s’adresser à elles en cessant de leur jeter l’anathème. Les Pères conciliaires ont voulu s’adresser aux gens considérés comme hors de l’Églisecomme à des pairs.

« De rupture, ce pontificat, parce qu'il inaugure un exercice de la papauté fondé sur une immédiateté, simplicité et proximité radicales. »

Benoît XVI a commencé à débreefer ses voyages dans son avion de retour au risque de faire des gaffes et François est allé très loin dans la liberté de l’interview.

«  De Benoît XVI, on se souviendra de la renonciation et de François, de l'apparition. » « Bona sera ! Et Pascale Clarck de commenter le « bon appétit ! » de son premier angélus du dimanche suivant : «Roger vous offre l’apéro et François vous souhaite bon appétit. »

Quant à Benoît XVI, ce pape qui n’a jamais trouvé ses marques, je me souviens d’Anne-Lise, cette candide au pays du catholicisme, allant assister à la canonisation de son ancêtre pour faire plaisir à sa grand-mère et voyant ce pape enféré dans ses fanfreluches et à qui on devait tout apporter, le caricatura ainsi :

« Un pape qui se prend pour un roi ! »

 

Journal d'Anne-Lise, invitée à la canonisation de son ancêtre au Vatican. | France Inter

 

» [François] restera comme le premier pape non-européen depuis le VIIIe siècle, marquant le basculement du centre de gravité de l'Église catholique du Nord au Sud. »

Il était temps.

 

« François n’a pas révolutionné la doctrine mais modifié la méthode. »Dire cela, c’est en faire un pape qui abandonne la scolastique pour épouser une sorte de carthésianisme fraternel ou bienveillant, qui ne doit pas rester que d’affichage. La scolastique, c’était un discours sans méthode qui prétendait, comme les théologies naturelles antécédentes, rendre compte de l’univers. Le Discours de la méthode de Descartes renverse la charge des priorités. Priorité à la méthode et tant pis pourl’univers. Priorité aussi au discours avec une méfiance pour le langage !

« [François] a inversé le schéma de la confrontation entre l'Église et le monde : la miséricorde de l'accueil doit précéder l'attestation de la vérité, la première devenant la condition de la seconde.

 

« Chaque pape imprime son style sur les relations internationales. Celui de François se fonde sur le lien personnel et direct avec les dirigeants mondiaux : il les interpelle et les tutoie comme s'il les recevait à confesse, et eux sont comme ramenés à leur limitation lorsqu'au détour d'une phrase il se métamorphose soudainement en pasteur universel du troupeau humain. »

François tutoie les dirigeants du monde au risque de la mondanité spirituelle. Il les tutoie comme il tutoie tout le monde au risque de faire croire à un « toulemondisme » démagogique où, en réalité, le pape dit à tout le monde ce que les dirigeants du monde ont envie d’entendreconfesser de sa bouche.

 

« François va laisser une Église [en] vaste chantier. » La modification de sens éventuel de l’appréciation de l’analyste est entre [mes] crochets. Ou, pour le dire en utilisant la question du journaliste Jérôme Cordelier qui interviewe notre analyste, François a fracturé l’Église comme un chef de chantier creuse des tranchées.

 

Et voici que succède une belle formule de Jean-François Colosimo invité à se rapprocher de lui-même pour nous en dire pluset se confier : « Dans le christianisme, il n'y a que des convertis. On ne choisit pas le verbe qui a pris chair, on le rencontre. Et sur la croix en gage de la résurrection. La métanoïa, le « renversement » dans le grec de l'Évangile, s'oppose à la paranoïa, le délire proprement infernal de l'autosuffisance, la croyance bête comme l'est le diable de se prendre pour un dieu. »

 

Mais le Dieu de Jésus-Christ n’est pas seulement celui des « perdants de l’histoire », comme le voudrait la kénose souffreteuse d’un Occident décadent. C’est aussi « la Providence de l’histoire » d’un Bossuet qui le remet au centre du jeu et qui nous rend respectables par cette autre périphérie du christianisme qu’est l’islam, si nous Le confessons autrement que comme un aveu de faiblesse. La « folie de la Croix » n’a rien d’une abdication nihiliste a priori.

« La vie du monde ne repose pas sur l’action de beaucoup, mais sur la contemplation de peu ». Donc elle ne repose certainement pas sur ce commentaire ni sur ceux, pléthoriques, de Jean-François Colosimo décryptant l’actualité du monde. L’actualité n’est qu’un présent sélectionné, revenons vers l’inactuel anhistorique ! Il n’est pas sûr qu’il n’y ait pas, dans ce déjugement, le désengagement de la contemplation nécessaire à la réconciliation qui nous fait défaut.

 

« Qu'est-ce que le miraculeux ?

Concevoir chaque individu qui s'avance devant vous comme une épiphanie invitant à la communion. »

Et non pas, comme je l’ai fait si longtemps, l’appréhender avec crainte comme le danger d’une contamination démoniaque. Ici me revient cette parole de mgr Gaillot proférée sur Radio ici et maintenant, radio on ne peut plus périphérique parce qu’associative, originale  et marginale, parole qui a définitivement changé mon appréhension de la rencontre : « Quand on a peur, on n’est pas libre et quand on est libre, ça fait peur ! » « Laissez passer l’homme libre », disait le frère Luc incarné par Michaël Lonsdale dans des Vivants et des dieux.

J’ai dit, à deux jours de sa mort, à un prêtre qui avait la même voix que Michaël Lonsdale et qui, en dix ans, était devenu un « homme libre » qu’il aurait pu prononcer cette parole du frère Luc. Et ce prêtre de me répondre : « C’est incroyable que vous me disiez cela parce qu’à l’instant même où vous me le dites, je vois physiquement Michaël Lonsdale passer sous mes fenêtres pour aller déjeuner au Vauban. (Il avait fini ses jours comme aumônier des Petites sœurs des pauvres, avenue de Breteuil.)

Le miracle de la rencontre, le fin mot des surréalistes, Dieu comme j’y crois ! Et quand on se rencontre sans se juger ni même anticiper de transformation souhaitable ou nécessaire, le miracle de la conversion peut se produire. Ce toucher du salut est, à l’échelle individuelle et personnelle, le plus beau miracle qui soit.

Et de ce miracle on passe au témoignage. Il y a une sainteté du pauvre par identification du Christ qui transfère Sa Personne dans la sienne. Mais mon regard peut aussi sanctifier celui que je rencontre : « La manière dont, au sens propre, je vous envisage vous dit quelle est pour moi la face de Dieu. » C’est on ne peut plus levinassien.

 

  

jeudi 6 mars 2025

L'hystérie de la nouvelle course aux armements

"Maintenant que la nécessité d’un réarmement massif est posée" ("la Lettre du Figaro"), est posée par qui, pourquoi, en fonction de quelle hystérie collective qui, tout à coup, de façon concertée ou déconcertante, pique l’intégralité du monde politique international en prenant les populations à revers ?

 

L’Europe de la défense est censée s’imposer parce que « la Russie serait devenue une menace pour la France et pour l’Europe » sous prétexte que Sylvester Stalone veut signer la paix avec le Staline pragmatique et trop froid pour mettre le monde à feu et à sang ?

 

Revoilà la course aux armements, mais sans guerre idéologique, sous prétexte que l’inéluctable est arrivé : l’Ukraine n’a pas remporté une guerre perdue d’avance face à son agresseur, qui a fait un coup de poker en l’agressant au risque de se mettre à dos toutes les grandes puissances du monde (entendre par là les puissances pesant le plus symboliquement, l’Amérique et l’Europe pesant plus que la Chine). Mais voilà que la démocratie américaine tombe ouvertement dans le suprématisme décomplexé, ce qu’autrefois on appelait l’impérialisme, sans pouvoir vraiment documenter ce qui se sédimentait sous cette suspicion de désir hégémonique.

 

L’Ukraine joue un incompréhensible double jeu : ell se montre capitularde face au « roi des capitalistes » qui veut lui piller sa souveraineté économique alors qu’elle s’accroche à un fantôme de souveraineté politique qu’elle refuse d’abdiquer en faveur de la Russie. Elle se montre capitularde face à Trump et va-t-en-guerre face à l’Europe qui ne lui demande aucune contrepartie, face à l’Europe exsangue qui ne sait pas comment, endettée jusqu’au cou, elle va financer sa nouvelle danseuse meurtrière, mais qui compte sur la docilité de ses concitoyens à qui on refait le coup de la panne et le coup de la peur pour, du moment que la menace plane sur ce qui n’a jamais été menacé, taire toute velléité de contester la pertinence des obsessions hystériques et provisoires de nos despotes forcément éclairés puisqu’ils sont à la tête des grandes démocraties mondiales… 

lundi 3 mars 2025

Considérations impériales

Je postai hier matin sur  ma page Facebook:

"Je lis sous la plume de l'éditorialiste de mon journal local" (Laurent Bodin dans "l'Alsace" d'hier, navire amiral du groupe EBRA comme je l'ai appris ici même grâce à Serge Hirel):

"Confrontée à la réécriture de l’histoire par un Trump refusant jusqu’à reconnaître que la Russie est le pays agresseur de l’Ukraine, l’UE doit prendre ses responsabilités." 

Qu'en comprendre? Que l'UE doit être seule sur le front avec l'Ukraine dans une guerre contre la Russie? Seule, sans qu'à aucun moment Zelensky que Trump a humilié vendredi dernier ne lui ait proposé de transférer l'accord qu'il s'apprêtait à  signer avec Trump sur l'exploitation de ses "terres rares", accord par lequel il donnait le meilleur de sa souveraineté économique à l’Américain pour que lui soit conservée une fantomatique souveraineté politique?" Et ce alors même que le blé et les pommes de terre ukrainiennes réduisent considérablement les marges de manoeuvre de notre agriculture, ce qu'a révélé leur jacquerie d'il y a un an, calmée par l'action conjuguée de Gabriel Attal et d'Annie Genevar, tous les deux ayant pris fait et cause pour cette corporation qu'ils connaissaient mal et à laquelle ils se sont attachés.

« C’est un nouveau chapitre de l’histoire de l’Europe qui s’ouvre avec le désengagement militaire annoncé des États-Unis », poursuit Laurent Bodin, qui, au passage, est un analyste remarquable. « Pour reprendre l’expression employée par Emmanuel Macron en novembre 2019, l’Otan est bel et bien en « état de mort cérébrale ». 

Ah bon ? Pourtant Poutine reprochait à l’Ukraine de vouloir intégrer cette organisation cliniquement morte. 

« L’Otan est plus que jamais une coquille vide, dès lors que les USA entendent s’en désengager. Il appartient donc aux dirigeants européens de trouver les moyens de véritablement construire une Europe de la Défense, non pas sur le papier mais sur le terrain. »

Littéralement, ça veut dire que l’Europe qui s’était fondée en vue de la paix, se refonde ou se maintient, se rebooste par et pour la guerre. Car qu’Emmanuel Macron ne nous parle pas de « paix durable »! Quoi qu’on pense de ces manières de voyous par lesquelles Trump et Poutine négocient l’avenir de l’Ukraine sans le protagoniste principal de cet avenir, ce qu’ils visent est un cesser-le-feu, un armistice, au prix qui n’est pas mince de la capitulation de l’Ukraine, là où le Premier ministre britannique ne propose qu’une trêve d’un mois pour y voir plus clair et la proposition se défend."

L'humiliation de Zelensky a été un électrochoc de malséance par lequel Trump a montré beaucoup de sa vraie nature. Mais il ne faudrait pas passer de l'humiliation à la consolation. Dans notre diplomatie à touche-touche où les gouvernants de ce monde se tutoient et sont dans une vaste colonie de vacances où on se cause, on se cause plus et on se fait des coups tordus, on passe de l'humiliation à la consolation en oubliant le rapport de force. Mais la diplomatie des colonies de vacances qui côtoie simultanément ladiplomatie néocoloniale et honteuse de Donald Trump est une diplomatie où l'on met un bavoir à l'enfant qui a trop pleuré. C'est une diplomatie du bavoir, pas de l'arbre à palabre, une diplomatie où nul ne se pique d'être cohérent. 

Je discutais hier avec un commerçant de 47 ans, donc de quatre ans plus jeune que moi. Notre stupéfaction commune pouvait se formuler ainsi: le monde dans lequel nous sommes nés était structuré par leconflit américano-soviétique. Qui aurait pu imaginer que ces deux blocs se coalisent pour emm... le reste du monde? Qui aurait pu prédire que la première démocratie du monde, précédéed'un siècle et demi par le premier régime parlementaire dont la démocratie américaine était la fille, aurait à sa tête un Le Pen français non seulement beaucoup moins cortiqué que le vieux lion colérique et sanguin qui vient d'avaler son bulletin de naissance, mais dont l'entourage, Bannon, Musk ou Vance à des degrés divers, n'a aucun complexe à afficher des accointances ouvertement nazies ou néonazies (l'AFD soutenue par Musk et par Vance)? Et le but de la guerre en Ukraine selon Poutine serait de dénazifier celle-ci avec les nouveaux (ou anciens) amis qu'il s'est faits? 

samedi 1 mars 2025

IL faut consoler le général Volodimyr

Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Dans la démocratie émotionnelle et la diplomatie grand public et cablée,, il faut passer d'une "séquence" à l'autre."Séquence émotion": hier, Trump a méchament humilié volodimyr. "Dans l'émotion", le président américain s'est aperçu que le président ukrainien n'était pas "prêt pour la paix". Zelensky se trouva émotionnellement dépourvu d'être si soudainement fourbu. Avant de quitter les États-Unis, il transita par "Fox news" et dit "Merci" au Donald puisqu'apparemment c'était ce que J.D. Vance reprochait à sa servilité  d'avoir manqué à la merci de son créancier. 

Et puis Zelensky s'envola pour chez M. Starmerqui l'aime presque autant que M. Johnson. Le Brexit, ça sert à soutenir les pays que les États-Unis trouvent trop embarrassant pour les garder comme des alliés directs, l'Angleterre restant l'oeil de Moscou ou plutôt la mère des pelgrims du May Flower s'étant enfuis avec la destinée manifeste de faire des îles britanniques la Rome troyenne ignorée de l'empire d'outre-Atlantique comme Rome était la mère de la Méditerranée. 

Ah, que Volodimyr était triste quand il débarqua chez Keir. Il lui réclama un kir pour se dérider un brin. Keir lui offrit un kir sans connaître le chanoine dijonais, de l'argent et un sommet dès le lendemain avec tous les partenaires européens que Keir , délivré des normes de l'ancienne organisation qu'il avait quittée, pouvait traiter à son gré par-dessus la jambe ou d'égal à égal. L'argent, les obligés européens de Keir le prêteraient de gré à gré et à volonté au général Volodimyr, sans lui demander de plan de financement pour sa victoire assurée pourvu que la planche à billets ne s'arrête jamais de lui distribuer des billions,de dollars. 

Macron qui serait du somet voulait bien renoncer à l'austérité de la baisse des dépenses excepté pour un "quoi qu'il en coûte" ukrainien. Et tout le monde se préparait à  le réconforter à l'avenant, au trébuchet d'espèces blingblinguement sonnantes, sans jamais lui demander: "Mais dis donc, Volodi,, comment comptes-tu mettre l'argent que tu amasses au service de ta guerre afin de la gagner? Il serait indécent de te demander comment tu comptes nous rembourser, mais tu es parti chez le Donald en te préparant à le laisser exploiter tes terres rares, donc à te dépouiller come l'aurait fait Vladimir, mais en te conservant ton intégrité territoriale. Donald aurait exploité tes ressources minières ou fosciles et tu ne nous aurais pas intégré dans le deal. Tu nous demandes du blé en nous refourguant le tien, en laissant notre agriculture exsangue et sans nous faire gagner un centime d'euro sur l'exploitation de tes richesses insoupçonnées, et tu aurais signé au bas d'un parchemin pour que le Donald te prenne ta souveraineté énergétique en te garantissant un contrôle fantomatique sur ta souveraineté politique. 

Tu fais pleurer dans les chaumières européennes sur l'exsanguinité de ton pays, mais tu nous aurais dépouillé sans vergogne et sans t'excuser comme tu as finalement dit merci au Donald de t'avoir abreuvé de miliards sans plan de financement. Si c'est comme ça que nous traite l'ami ukrainien que tu prétends être, nous allons finir par croire qu'il vaut mieux être tes ennemis américains. Bon ça, nous ne te le dirons pas tout de suite par décence, mais gage que l'histoire qui te jugera ne te loupera pas."  

vendredi 28 février 2025

Trump contre Zelensky ou l'électrochoc de la malséance

"Je me suis trompé sur Donald Trump parce que j'ai supposé que la confiance du peuple américain le conduirait sur des chemins à la fois personnels et politiques moins singuliers, plus heureusement traditionnels. Elle l'a fait dériver encore davantage", écrit Philippe Bilger dans son billet:


Justice au Singulier: Comment je me suis trompé sur Donald Trump....


En 2016, des experts comme au hasard Anne Sinclair, Christine Ockrent ou Gérard Araud, n'auraient pas misé un kopek sur la victoire de Donald Trump. Ils se sont moins avancés en 2024, mais sitôt l'élection constatée, ils ont fait une prédiction juste : dans la mesure où il n'a rien à perdre, le second mandat de Trump sera plus radical que le premier. Le premier mois de sa présidence le démontre. 

Les présumés spécialistes de la mentalité américaine ont fait une autre anticipation qui, celle-là, me paraît de jour en jour plus hasardeuse: autant le premier mandat de Trump serait sans lendemain comme s'est avéré celui d'Obama à leur grande déception, qu'ils avaient pris pour le messie et la montagne de métissage qu'était censée être Obama a accouché de la souris néo-sécessionniste et néo-falknérienne du milliardaire Trump, négociateur sans autre morale que celle de la victoire, autant le second mandat de Trump marquerait les États-Unis d'une empreinte indélébile et il y aurait un héritage à capter, qui pourrait être assumé, soit par Elon Musk (ce qui est impossible: n'étant pas né aux États-Unis, il ne pourra pas devenir président des États-Unis non plus que ses homologues des GAFA qui ont trop putassièrement tourné casaque pour caresser dans le sens de son poil narcissique le puissant du moment pour conserver quelque crédibilité s'ils voulaient se faire élire à la tête de la fédération), soit par l'un de ses fils (Trump a ce point commun avec Le Pen et tous les vaniteux charismatiques d'avoir la fibre dynastique), soit par James David Vancequi pour l'heure se montre à la hauteur du job. 

Et pourtant je crois que la pérennité du trumpisme est une erreur en raison précisément de la plus grande radicalité de ce second mandat. On ne peut pas gouverner  cavalièrement et continuellement un des pays les plus puissants du monde.  Poutine a fait la même erreur en ne mesurant pas combien, en agressant l'Ukraine, il se mettrait à dos, non pas certes la majorité de la population mondiale, mais les pays les plus puissants du monde et on ne gouverne pas impunément contre les puissances. Cela revient à avoir tout le monde contre soi. Trump s'asservit désormais au leadership poutinien en passe de remporter sa guerre en Ukraine et les États-Unis avec lesquels nous étions dans un rapport de "vassalité heureuse" (E. Macron) se vassalisent à Poutine, hier encore l'ennemi public mondial n° 1, mais Trump opère ce tournant de façon si vulgaire que cela rend sympathique la cause ukrainienne, même à ceux qui, comme moi, sont le moins convaincues par le bien-fondé du basculement de l'Ukraine de son aire naturelle russe dans le camp occidental temporairement dévitalisé de son hégémon. 

Comme quoi on a beau savoir que la guerre et la paix nechoisissent pas leur camp pour les bonnes manières des soudards, la bienséance compte et la diplomatie a beau avoir terriblement changé à l'ère des contradictions permanentes de tous les dirigeants du monde qui ont perdu toute colonne vertébrale ("Zelensky est un dictateur mal attifé, mais je vais le recevoir à la fin de la semaine, m'emparer de ses terres rares et l'obliger à signer un cesser-le-feu avec Poutine. Et puis non. Il m'a manqué derespect, je renonce aux terres rares et je le vire de la Maison blanche". "Il ne faut pas humilier la Russie, mais Poutine m'a humilié en me recevant à l'autre bout d'une table de cinq mètres de large alors que je venais lui apporter la bonne parole et que moi, je l'avais reçu à Versailles. Je renonce à lui sauver la face et je vais devenir le plus solide des soutiens ukrainiens"), on ne se fait pas à ce changement ni au fait que, pour éviter un nouveau Wikyleaks, on ait remplacé de longs memorenda à la M. de Norpois par des simili-câbles en manières de communiqués rageurs sur X ou sur Social Truth de Potus en personne.

En parcourant les différentes dépêches qui relatent "l'échange tendu" entre Trump et Zelensky, j'en tire trois enseignements:


1. Trump n'a pas le minimum requis d'entregent  pour assurer le "droit des gens", comme on appelait la diplomatie dans un langage un peu châtié, soutenu, traditionnel et désuet. Son côté primaire ressort et ilui importe plus de parler du « stupide président Biden » ou de ce qui se passait « au sortir de la salle de bain  d’Hunter Biden » que de signer l’accord pour exploiter « les terres rares » tant convoitées  de son hôte ukrainien qu’il traite comme le plus méprisable des manants. Dès lors, il est mal inspiré de reprocher à Zelensky de n’être pas « prêt pour la paix ». La paix est encore moins le sujet du Donald.

2. Jean-Luc Mélenchon peut plastronner : « En humiliant Zelensky, Trump prouve qu'il n'a rien à faire du soi-disant accord avec Macron », il a raison, Macron a fait du vent, comme d’habitude.

3. Et Georgia Meloni ne réagit pas, mais propose la seule chose intelligente que j’aie lue ce soir : après avoir elle aussi « demandé à Macron «à quel titre» il s’était rendu à Washington lundi pour discuter avec Trump », elle « plaide pour un sommet «sans délais» entre les États-Unis, l’Europe et leurs «alliés» » pour décider de l’avenir de l’Ukraine.


Car faut-il et peut-on compter sur l'Europe seule? Seule la détermination des dirigeants européens à s'emparer de l'abandon de l'Ukraine pour fonder une Europe de la défense et de la sécurité commune et à contrer les droits de douane des États-Unis et de la Chine pour mener une politique commerciale à la fois agressive et protectionniste, dira si le fédéralisme européen a de l'avenir. Cette crise pourrait être son momentum, mais outre qu'il paraît arriver bien tard, l'Europe se fonderait en s'engouffrant dans la brèche d'un antagonisme commePhilippe de Villiers prétend que c'était l'idée de Jean Monnet. Mais surtout elle renoncerait définitivement à être une Europe de Brest à Vladivostok comme le traité de Maastricht ne prétendait pas liquider d'un seul coup sa vassalité américaine, mais la réunion de l'Europe à la Russie était son horizon amoureux caché, comme il était celui, fasciné et redouté, de cet orthodoxe russe qu'était Dostoïevski, plus encore en délicatesse avec le camp jésuite et le catholicisme romain qu'avec le socialisme et le camp libéral européens. 

mardi 25 février 2025

Bayrou, Mediapart, Bétharam et Sauvé, la sinistre conjuration des tristes sires

Les investigations de Mediapartont toujours un à propos journalistique indiscutable, mais elle obéissent à un calendrier qui est rarement innocent et à une éthique dont on voit mal la cohérence. Mediapart donne par exemple dans le journalisme d’anti-corruption d’argent et désormais de mœurs, un journalisme dégenré, un peu mélenchoniste, mais plutôt en délicatesse avec les insoumis, macroniste en cas d’urgence, sociétaliste entoute circonstance, mais bien peu cohésif, et jamais fâché de dégommer un type dont la tête ne lui revient pas: hier Fillon ou Rugy et aujourd’hui Bayrou, quitte à s’affranchir du principe de responsabilité, car dégommer aujourd’hui Bayrou pour le plaisir de le dégommer n’est pas fait pour veiller sur la stabilité d’un pays qui n’a pas besoin de se casser la figure  en allant de crise en crise dissolutoire ou ministérielle, mais Mélenchon et Plenel ont un point commun : ce sont des parlementaristes fanatiques, des anti-présidentialistes (pour Plenel, il est contre l’élection du président de la République au suffrage universel), donc l’instabilité ministérielle ou le retour à la IVème République ne les dérangent pas, ils leur permettent même de dénoncer plus de tambouille politique qui alimente leur fond de commerce.

 

Affaire Bétharram-Bayrou : la mécanique du silence | Mediapart

 

Ceci étant posé en préambule, si Bayrou doit être soutenu pour le moment, sa cause n’est pas bonne. Bayrou est un Béarnais qui a soutenu Bétharam comme il a soutenu la communauté des Béatitudes tout en souhaitant que le drapeau français ne soit pas mis en berne à la mort de Jean-Paul II ou que sa maison de Bordère ne soit pas filmée,nichée au pied de l’Église comme elle l’est en réalité, dixit Carl Zéro qui se souvient et qui le connaît bien. Bayrou a soutenu Macron car c’est le précurseur du « en même temps ». Ce démocrate-chrétien voudrait passer à la fois pour un ultracatho et un ultralaïque.

 

Ce serait un peu nul, mais ça resterait son problème si le scandale dans lequel on l’englue à contre-temps et pour le faire tomber ne démontrait l’abjection d’un milieu catholiquequi minimise chaque scandale pour ne pas le dramatiser ; qui, confronté à celui de Bétharam, se prévaut de la « perfection » d’un enseignement pour continuer de promouvoir une éducation paramilitaire qui est à la notabilité provinciale et assise du Béarn ce queRiaumont et ses enfants martyrs d’un scoutisme dévoyé sont au traditionalisme réfugié au pays de « Bienvenue chez les ctis ».

 

Bayrou, c’est la réaction (pas au sens réactionnaire ) quand on ne peut plus mettre la poussière sous le tapis, et quand on en est là, c’est la surréaction en pseudo-empathie avec les victimes qui devrait inspirer du dégoût à celles-ci d’accepter un tel défenseur de la onzième heure qui prétend se refaire la cerise sur leur dos et sauver une place qu’il a si longtemps convoitée.

 

Et c’est enfin l’ultime turpitude : « l’appel à Jean-Marc Sauvé » qui répond « présent » à sa demande, Jean-Marc Sauvé dont j’ose dire que c’est un autre Bayrou d’un style qui ne vaut pas mieux, tellement imbu de l’autorité morale incontestable qui serait la sienne que, dans la série À voix nue que France culture lui a consacré, il a osé dire qu’il a eu l’intuition, quand ces affaires d’abus sexuels ont éclaté au grand jour grâce à la Parole libérée voulant réagir contre Bernard Preynat et le silence du cardinal Barbarin qui l’avait remis en responsabilité et au contact des enfants, que c’est à lui que les évêques allaient demander de traiter la question et qu’ils ne pourraient pas faire appel àquelqu’un d’autre, il en a fait part à son épouse en se rasant. C’est un catholique àgéométrie variable comme François Bayrou, favorable à la sédation de Vincent Lambert et vent debout contre la crise des abus dans l’Église au point de prétendre la traiter avec un agenda caché et en faisant de la statistique de cochon et d’extrapolation. Et selon moi il achève de se déshonorer en acceptant de répondre à la sollicitation du Premier ministre qui veut sauver la peau du soldat Bayrou. Décadence infiniment désinvolte, sinistre et cynique de tristes sires du catholicisme zombie ou détaché, jouant les parangons de vertu ! Les Tartufes sont de tous les temps. 

vendredi 21 février 2025

Noi, Nanacron, nanaguerre!

Noi, Nnacron, n’a pas perdu naguère, nananère !

 

Quand noi, Nacron, n’a entendu que NaTrump na voulait nadire à naPoutine : « Nanou, Nadimir, naon est tout d’accord avec natoi,

 

Noi, Nacron, n’ai réuni nal’Europe et na potentats de PopOTAN, n’a remué du popotin et du papotin n’ai dit : « Nan, mon Canard, nan mon  Canard à n’orange, na faut pas toujours mettre du jus d’orange dans navodka ni te faire, mon Dony, n’avocat de Noutine. Nard Noutine is Nothing, mon Nanar Nony. »  Na n’était a navodka, tirelirelire ; na n’était a navodka, na nous tirons pas de là. »Noi n’avoir dit ça, croix de noix, crois de fer… »

 

Nalors, noi, Nanacron, carrément, n’avoir réuni n’Europe. Noi, Nanacron, n’avoir été contre le naBrexit,mais n’avoir quand même demandé à Keir de na venir à na l’Nénysée. »Nakeir na est venu et nany Ursula, et nana M. le necrétaire nénéral ne Popotan (n’en emporte le vent). Nêne si noi n’avoiroublié de naire nenir les nefs d’État de Neuneurope qui ne nomptaie pas ninitairenent. Noi, Nanacron, ne narler qu’avec les nens qui nomptent.

 

Noi, Nanacron, nes ai faits nevenir et nêne renenir. Net moi n’ai dit : « Ne n’en nais nire à non Canard Donald : « Ne sois na faible nevant Noutine. Nais tanévolution norange comme Nenensky. »

 

N’espère que Noutine ne va pas dire à non Canar de ne népondre : « Na Nacron, n’y a tout dit, Il a tou dit tout dit tout dit tout dit ; Na Nacron, Il a tout dit Il a tout dit c’que j’lui avais dit.» N’espère que Non Noutine n’y n’aura noublié que noi Nacron n’ai nassé à na télé nomment je nui ai crié dessus au téléphone.

 

Chœur Montjoie Saint-Denis • Il A Tout Dit

 

 

- Noui, mais Nanoutine, là n’ai tout dit nanon Canard de ce que noi n’allais lui dire.

- Non Canard il aurait dit que si n’avais déjà tout dit, c’était na la peine que je vienne, sauf pour que non Canard il m’époussette comme nananernière fois. Na poussette, na poussette ! Na moi veux me refaire épousseter.

- Na cassette, na cassette ! Non Canard y ne veut nanais payer. »

- Et tu seras prrrrivé de desserrrrt, n’a crié Nanoutine en ne disant : »On va te mettrrrre en bout de table et tu aurrras le drrrroit de te tairrrre et de mettrrrre ta bavette. –

- Tu as des pellicules, Nananule, n’a dit non Canard, je t’offre for you to be free en cadeau un shampoing antipelliculaire . Bon come back chez toi ! »

 

-Na moi, va dépenser plein n’argent pour faire naguère. »

«  Mais tu n’as pas d’arrrrgent, petit prrrrolétaire. »

« Noi, na va dire à na concitoyens que na peux rien donner pour na retraites ou pour na de non pays, na que na donnerai tout pour Nukraine et pour non Volodymir que tous vous délaissez. Na pas moi délaisser Volodymir, nananère. Na ne perdrajamais nes ners, enfin na guerre, enfin non nombril, enfin na m’avez nombrilcompris. Car nombril=compris. Noi ne serai namais pris, nande de nal appris.» 

mardi 11 février 2025

Tombeau de mgr Richard Williamson

Je suis un drôle de zèbre, même si j’ai une âme religieuse. Quand je suis malade, couché ou paresseux, quand je cuve ou que j’incube, quand j’ai envie de ne rien faire, ce qui entretient ma léthargie et ma neurasthénie est le contenu de vidéos des radicalisés de la pensée close et ayant été malade une bonne partie de la semaine dernière, ces vidéos ont fait mon pain quotidien. Jusqu’à écouter une apologie de mgr Williamson dont il m’arrivait de lire les commentaires elleison que je trouvais d’une grande élévation intellectuelle et spirituelle, mais qui sentaient le soufre. Son apologie émanait d’un prêtre français passé dans sa résistance et qui semble vivre en Belgique. »Il était la douceur incarnée, maissavait taper du poing sur la table », résumait-il. Tissier de Maleray et Williamson constituaient la phalange intellectuelle des quatre évêques sacrés voici trente-cinq ans. Les continuateurs de l’œuvre de mgr Lefebvre ont déjà perdu deux de leurs évêques sur quatre et ne sont pas pressés d’en sacrer deux autres, comme si cette continuité de l’œuvre n’était pas le premier, mais était le cadet de leurs soucis. Mgr Williamson a lui nommé pas moins de six évêques et peut-être davantage. Avec ou sans la volonté du pape, le fait de sacrer un évêque est un acte valide quand celui qui le sacre est lui-même  évêque.

 

L’apologète de mgr Williamson dégageait leprofil spirituel deMgrrLefebvre et Williamson. Pour mgr Lefebvre, « Dieu était indépendant » et c’est ce qui fascinait le maître d’Écône. « Nous sommes « ab aliis » quand Dieu est « a se », complétait-il. La devise de mgr Williamson aurait pu être : « Ut veritas ». Une vérité qui faisait volonteirs fulminer celui qui « ne manquait pas d’énergie ».

 

Et de signaler un sermon pour des ordinations à Écône, en 2002, je crois. Le thème en était l’encyclique Pascendi . Comme j’ai lu cette encyclique et que je la crois un document très important, très fin, très subtil, comme par ailleurs, je voulais écouter la voix de mgr Williamson et savoir s’il y avait de la vodka dans cette voix, comme le jour où il donna son interview en Allemagne ou au Danemark qu’on ressortit après la levée des excommunications et où il tint des propos révisionnistes ou négationnistes qui jetèrent une ombre sur l’acte de Benoît XVI et firent préférer à l’évêque qu’on le jette de la barque pour qu’il entre dans le ventre de la baleine s’il était un obstacle à la réconciliation, pour toutes ces raisons, j’ai écouté ce sermon.

 

Je l’ai écouté et je l’ai aimé. Il paraît que Dieu vomit les tièdes. Si j’en suis un, je ne le suis pas sur le plan intellectuel. J’aime ceux qui manient des idées fortes qui entretiennent en eux le souffle chaud d’une vapeur capable de leur faire prendre le train et de faire circuler la machine.

 

Dans ce sermon, mgr Williamson commençait par faire référence à des paroles de Notre-Dame d’Akita promettant d’engloutir le monde sous un déluge de feu si celui-ci continuait de s’enfoncer dans des péchés qui croîtraient en gravité et en nombre. Dieu ne s’était-Il pas repenti du déluge et n’avait-Il pas promis de ne plus jamais recourir à une telle submersion ? Mgr Williamson était connu pour attacher du prix aux apparitions mariales et aux plus catastrophistes et controversées, Garabandal, Fatima et Akita, là où les prêtres de l’ »Église conciliaire » ou de l’Église main stream, de l’ »Église bolchevique «  entendue comme majoritaire , ne citent presque jamais de révélations privées qui ne sont pas objets de foi, préférant s’en rapporter à « la Parole de Dieu », Parole de Dieu qu’ignorait superbement mgr Williamson dans sonsermon, lequel est une conversation, à la différence d’une homélie qui est un commentaire de la Parole de Dieu. Mais les prêtres qui n’ont que le mot de « Parole de Dieu » à la bouche seraient bien embêtés si Dieu venait leur parler en personne et bousculer leurs habitudes de se saisir du corpus de ce qu’Il a dit sans être jamais contredit par Celui qui n’inspire plus que dans des locutions intérieurs au pouvoir discrétionnaire extrêmement discret. Mgr Williamson à l’inverse en pince tellement pour la catholicité de l’Église qu’il préfère la Tradition aux Écritures et qu’il ne lui paraît pas très nécessaire de se référer à celles-ci. Pour les uns, Dieu parle de manière à ne plus pouvoir être sollicité dans un quotidien où Il aurait envie de dire des choses actuelles et pour l’autre, IL continue de parler à ses « voyants ». Dans les deux cas, la Parole de Dieu est hors-sol.

 

Dans son sermon, mgr Williamson va au cœur du réacteur de l’encyclique Pasciendi et rien que pour cette raison, on est frappé de la pénétration de son esprit. Pasciendi va décrire et décliner toutes les figures de chercheurs modernistes (l’historien, le théologien),mais chacun d’entre eux est dépendant du « philosophe moderniste », dont le déconstructionnisme avant la lettre ne va plus le faire croire au surnaturel, mais au « phénoménisme agnostique » : les apparences ne sont plus trompeuses et la foi ne peut plus les qualifier. « Ceci est un principe négatif », note mgr Williamson ; mais come la nature a horreur du vide, ce principe négatif doit être contrebattu par « l’immanence vitale », qui garantit le développement interne du dogme par le croyant et par le théologien, en fonction du vide creusé par le besoin inassouvi du « phénoménisme agnostique » et que doit désormais remplir  le dogme, qui n’est plus que la friandise dont l’enfant a besoin puisqu’o l’a délesté d’un bien plus fondamental qui remplissait sa vie spirituelle. Je suis l’auteur de la métaphore sur la friandise, mais je la crois fidèle à une époque devenue encore plus feuerbachienne que la pente quifait de moi un chrétien pas loin d’être allégorique, qui a beau jeu de dire qu’on n'abrite sa foi qu’à l’ombre d’une théologie négative, souffrît-elle de puiser dans l’idéalisme occidental un surcroît très ordonné de pulsion de mort.

 

Et mgr Williamson d’ajouter que les tenants du phénoménisme agnostique ont renié la nature et l’ont laissée pour morte. Ils voient le monde par intention. Donc ils peuvent dire que « deux et deux font quatre » pour ne pas devenir fous, mais cette manière de garder un rapport au réel est subordonné au fait que deux et deux pourraient tout aussi bien faire cinq, pour peu que je le décide, car « le monde ne vaut que par la façon dont je l’intentionnalise », me disait Mademoiselle Labesse à la Sorbonne, et j’avais envie de lui faire une honte de cette idée saugrenue enla provoquant : »Imaginez que je décide que, pour me rendre à votre cours, il n’y a pas cinq marches descendantes, mais seulement quatre. Je pourrais bien me retrouver les quatre fers en l’air et vous ne seriez pas fière si, m’étant fait très mal, je disais au médecin que je me suis rapporté à vos principes sur l’intentionalisation du monde.

 

Mgr Williamson disait que les « phénoménistes agnosticiens » sont de mauvais arithméticiens, comme la plupart de ceux qui ont gardé la foi aujourd’hui, qu’on ne peut pas accuser de l’avoir perdue, « ils peuvent être braves et sincères et il faut faire envers eux preuve d’une véritable charité, il faut beaucoup les aimer », bien que le vice de leur raisonnement dont ils sont assez peu responsables, car ils sont des enfants de leur époque, tienne à ce qu’ils peuvent penser « en même temps » que deux et deux font quatre et que deux et deux font cinq. « Car la foi est pour nous aussi indiscutable que l’arithmétique et si nous ne voulons pas que la foi soit une arithmétique, nous sommes perdus et nous sommes errants. Nous pourrions devenir fous si notre instinct desurvit ne nous ménageait pas quelques points d’ancrage. Mais nous ne savons pas qui nous sommes, caril nous plaît d’avoir une doctrine flottante là où nous devrions aspirer à avoir la foi comme on connaît l’arithmétique.»

 

Eh bien cette idée-là me plaît. Quand je regrette que ma foi vacille, c’est un véritable regret. Et quand je constate que les croyants mes contemporains ne savent plus à quel saint se vouer, s’ils croient en la Création ou en l’évolution, en un Dieu vrai ou en un Dieu mythique, en un Dieu vivant ou en un Dieu parodique, quand je vois que les prêtres ne savent plus sur quel pied danser, qui ils sont  ni à quoi ils servent,

Ça me fait de la peine et j’identifie avec mgr Williamson que c’est parce qu’ils croient « en même temps » que deux et deux font quatre et pourraient bien faire cinq. Décidément, le « en même temps » n’a pas fait du mal qu’en Macronie.

  

samedi 1 février 2025

BHL, la déprise?

Je suis en train de me laisser surprendre par BHL en entrant dans ses livres. Se laisser surprendre, se méprendre et se déprendre, ce pourrait bien être le cheminement de tous ses lecteurs qui ne sont pas par principe ses adversaires idéologiques. Car pour se déprendre et reconnaître sa méprise, encore faut-il ne pas avoir un mépris de principe.

 

J’aborde la troisième partie de son Cadavre à la renverse qui désigne la gauche où « son entrés les ver(t ?)s », prédisait Sartre, et je lui vois faire l’apologie du libéralisme après l’ouverture  du parti socialiste à l’économie de marché, car il y a une « métaphysique » de « l’argent ». La critique du libéralisme s’est substituée à « la rupture avec le capitalisme » du cagoulo-sociali-pétainisme Mitterrand.

 

Voici ses deux dernières sortie entendues ce soir sur BFMTV .

 

1.       « Voir la foule applaudir les prisonniers libérés est très inquiétant pour l’avenir de la société palestinienne. » Dont acte, voir une société applaudir ses libérateurs libérés est inquiétant. « La société palestinienne applaudit à la libération d’assassins », s’insurge Bernard Henri Lévy. « Mais tous ces prisonniers ne sont pas des criminels de droit commun », ose opposer timidement Alice Darfeulle. Et pour cause :  j’ai appris à béthanie, par un patron de restaurant chrétien palestinien qui avait été lui-même incarcéré, qu’environ 45 % des Palestiniens avaient été enfermé dans les geôles israéliennes au moins une fois dans leur vie. « Mais les Palestiniens de compromis ne sont pas assez mis en valeur, » avance encore Alice Darfeuille. « Qu’ils se mettent en valeur eux-mêmes ! » réagit BHL. « Et comment donc ! Chaque fois qu’un chef d’État se rend dans la région, il rend visite à Mahmoud Abbas. » Selon BHL, un Palestinien de valeur est donc un collaborateur sans légitimité démocratique. Car il fallait absolument organiser des élections à Ramallah pour remplacer Yasser Arafat par Abou Mazen, tempêtait Israël, la seule démocratie de la région. Mais quand le Hamas les a remportées, il n’en a plus été question.

 

2.        « Il faut contraindre le Hamas à reconnaître sa défaite. » Donc il faut le guillotiner symboliquement. Pourtant l’auteur de la Barbarie à visage humain se disait, non pas contre-révolutionnaire, mais opposé à la Révolution au nom de l’anti-dialecticisme, car la dialectique compte pour rien les vies humaines.

 

« En Israël, la vie n’a pas de prix. C’est pourquoi on a libéré mille prisonniers palestiniens en échange de la libération du « soldat Gilad Shalit ». La vraie traduction n’est pas :»En Israël, la vie n’a pas de prix », mais : »Une vie israélienne vaut mille vies palestiniennes. 

 

« Si j’étais israélien », soupire BHL comme s’il ne l’était pas, je ferais la révolution.

 

« « il faut dénazifier le Hamas », mais il ne faut pas dénazifier l’Ukraine. La société palestinienne n’est pas nazie et il y a des nazis en Ukraine, mais il faut dénazifier Gaza et il ne faut pas dénazifier l’Ukraine, car sa nazification est un faux prétexte de la guerre russeo-ukrainienne Et si la nazification du Hamas était un faux prétexte, non pas des horreurs de Gaza qui sont la riposte onze-septembriste israélienne au 7 octobre, mais du but de guerre afficher par Netanyahou : « éradiquer le Hamas. » Désolé, Bernard, mais l’éradication, c’est nazi.

 

Israël est un territorialisme déguisé en universalisme pour ne pas prendre les habits du nationalisme. BHL aussi, qui peut défend les universaux, mais le masque tombe promptement, il suffit de le mettre en cohérence avec lui-même. BHL défend de même lelibéralisme, car il a de l’argent, et BHL n’est pas contre « les intellectuels petits bourgeois » qui faisaient passer des nuits blanches à Simone de Beauvoir car elle en était une. Il suffit d’un peu de hontepour la misère humaine dont nous sommes tous responsables, et il est normal que BHL soit un privilégié qui peut devenir la voix des sans voix, comme s’il lui arrivait de penser contre lui-même. 

jeudi 30 janvier 2025

La PQR et le groupe EBRA

Je profite de l'encre que fait couler la démission de Philipe Carli, son président qui a "liké" les "posts" et les "status" de gens infréquentables au grand scandale de "Mediapart" qui a demandé sa tête, pour appler mes éventuels lecteurs à l'aide et  à tirer d'un mauvais pas l'ignorantin que je suis. Au-delà des raisons économiques, pourquoi la PQR s'est-elle concentrée dans un groupe comme le groupe Ebra au point de risquer d'y perdre son soupçon d'indépendance et son intérêt tout relatif pour la défense des terroirs? Comment ce groupe s'est-il constitué pour "radicaliser la France", la vouer à l'hégémonie du parti radical, de manière inversement proportionnelle à la radicalité de ce "bloc central" ou de ce "socle commun", selon la ruse sémantique éculée qui fait dire aux mots de "radical" le contraire de ce qu'ils est censé signifier, cette ruse ayant fait l'objet de sarcasmes tellement séculaires que je m'en voudrais d'insister en disant qu'à ce compte, la France doit  être déradicalisée et immunisée contre les risques de séparatisme distillés par ce parti, dans des "thérapies de conversion" animées par Dounia Bouzar et financées par Manuel valls au grand dam d'Hugo Micheron...?

Quels ont été les ressorts de la transaction à l'origine dugroupe Ébra? Quels en sont les acteurs? Je les imagine des magnats de l'ombre et sans influence, mais qui sont-ils? 


Accessoirement,la "concentration médiatique" d'une grande partie de la PQR dans le groupe Ebra n'a jamais  fait l'objet de l'ire de ce grand pourfendeur de la concentration des médias qu'est  François  Bayrou le centriste, notre Premier ministre de la dernière chance. Mais je ne pousserais pas la candeur jusqu'à demander pourquoi cette restructuration sans bruyants milliardaires aux commandes n'a pas l'air de le défriser ni à supposer acidement que c'est parce que "l'argent" qui n'a pas d'odeur " ne doit pas guider les consciences", comme il aime à le répéter ces jours-ci, au risque de froisser Bernard Arnault en se mettant un dernier ennemi dans son escarcelle sans que ses dénégations sur "les entreprises qui ne doivent pas servir de cible" ne fassent retomber la colère de la plus grande fortune de France depuis que son détenteur, aux premières loges de l'intronisation du 47ème président des États-Unis, a vu l'Amérique de Trump luipromettre d'être un paradis fiscal si, au lieu de "Choose France", il y transfère la "french touche" et la légende du luxe de Paris à New York en "[oubliant] Palerme" comme l'héroïne d'Edmonde Charleroux la Marseillaise, plus marseillaise que Macron, l'amoureux de Marseille qui va sauver le Louvre en refaisant une beauté à l'entrée des artistes et en instaurant la "préférence nationale" ou à tout le moins européenne sur les billets d'entrée pour préserver notre "exception culturelle française", ce qui va provoquer le rapatriement de la Joconde en Italie et lui attirer la grève des touristes ou pis encore, une bronka comparable à celle du "Sacre du printemps"-la-Redoute, et une crise aussi grave que celle des Gilets jaunes... Décidément, Macron n'en rate pas une, mais pourquoi le groupe Ebra? 

mardi 28 janvier 2025

BHL et son grain de folie

Je me dissocie de Genau, mon intuitivement vénéré confrère organiste bien que je ne l'aie jamais entendu ni lui moi, il vaut mieux pour lui, quand il dit (sur le blog de Philippe Bilger, tremplin de mon exploration et de mon approfondissement du "nouveau philosophe") que cet entretien ne donne pas envie de lire BHL. À moi si et c'est sans doute le plus beau compliment que je puis faire à Philippe, car rares sont les émissions qui m'ont donné envie d'acheter des livres, surtout à moi qui dois me les faire adapter pour me les rendre acessibles, de sorte que je vais au bout de la logique improvisatoire et afirme contre BHL que l'oralité d'un auteur contient au moins autant que ce qu'il a écrit, et ne le contient pas en sous-entendus ou en voix intérieure qu'une exposition du Centre Pompidou datant de 1986 avait entrepris de restituer, mais contient l'oeuvre en parorles, en prolongements, en rythme spontané, au point que l'université devrait consacrer des thèses à étudier comment s'articulent l'oral et l'écrit chez tous les auteurs qui ont parlé après avoir écrit, répondu à des interviews et greffé sur leur livre originel des paroles palimpsestes. 

J'ai entrepris de lire BHL. J'en suis à la seconde moitié de "Ce Grand cadavre à la renverse". Écriture nerveuse, parfois somptueuse, entraînante, qui est loin de montrer que bHL "est une boussole qui indique le Sud", comme le dit bêtement Florian Philippot, mais n'en accuse pas moins ce qui n'est pas un moindre défaut: très jeune, BHL a eu des idées justes, mais une pensée de vieux. Les Nouveaux philosophes ont antéposé cet adjectif oxymorique pour cacher leur vétusté juvénile. L'énergie que BHL investit dans son style transmue en or romantique un fond tristement réaliste. BHL héroïsait et romantisait son père pour ne pas entrer dans l'aventure. Quand on n'a pas voulu faire la révolution à quinze ans, on a plus sûrement manqué sa vie que si on n'a pas de Rolex à 50 ans. BHL est un Séguéla, un publiciste de la philosophie réaliste. Son style fait rêver, sa personne fait parler, mais ses idées ramènent sur le plancher des vaches. Que tant d'énergie soit mise au service de tant de réalisme est pardonnable à l'âge qu'il a. Mais ce n'était pas un laisser-passer pour entrer dans la carrière. Puisqu'on n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans et qu'on ne peut laisser dire à personne que vingt ans est le plus bel âge de la vie, vingt-huit ans, l'âge où BHL a publié "la Barbarie à visage humain", n'est pas l'âge d'être réformiste en chantant "On the road again" pour se donner des airs de Jack Kerouac à qui il a consacré un de ses blocs-notes du "Point" comme s'il en avait été le compagnon fidèle."

"La Femme de trente ans" dépeinte par Balzac en aurait cinquante aujourd'hui. Quand il commença sa vie publique, Jésus n'était plus un jeune homme. BHL a fait le jeune homme en se disant déjà désenchanté d'un mai 68 dont il fut un des premiers à faire retomber le souffle libertaire avant que beaucoup trop d'épigones ne lui emboîtent le pas jusqu'à former une galaxie de nouveaux réacs. Hier, BHl était un jeune vieux qui tintinabulait de par le monde, comme le jeune reporter de guerre, en disant: "Calmez-vous, les gars" et en se revendiquant de la tradition des Comités de vigilance;  aujourd'hui, il a plus de souffle, mais il n'a pas changé. Il n'a pas basculé comme un vieux pêt de la gauche vers la droite. C'est un vieux jeune qui exprime avec juvénilité de vieilles idées qui n'ont pas l'intrépidité de l'avenir. La forme enjouée de ses textes écrits au cordeau, c'est sa folie qui remonte à la surface, mais elle est un peu seule. 

lundi 27 janvier 2025

Surpris d'être moderne

Quand Bernanos écrit qu'"on ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l'on admet pas d'abord qu'elle est une conspiration contre toute forme de vie intérieure" , ça me paraît excessif, mais Bernanos est coutumier de ces exagérations fécondes. Je dirais plutôt que la civilisation moderne induit une transformation de la vie intérieure. 


Prenons le silence. Une des plus belles définitions que j'en ai trouvée se trouvait dans un livre de Michèle Reboul, "l'Invisible infini". Elle le définissait comme l'écoute du frémissement de la feuille ou même du frémissement sans complément de détermination. Mais qu'il soit l'écoute du frémissement en fait déjà une écoute de quelque chose. Ou même que "le silence qui suit du Mozart est encore du Mozart" sous-entend qu'il n'y a pas de silence qui ne soit préposé à une musique intérieure antéposée sous-entendue. 

Je me souviens d'une émission sur Brassens que donaient ses amis, au premier rang desquels Pierre Nicolas. J'étais dans la voiture de mon père et nous l'écoutions ensemble. C'était peu après la mort de Brassens. Pierre Nicolas disait que, dans les chansons de Brassens, le jazz était sous-entendu. Le silence est plein de sous-entendus. Aujourd'hui, nous faisons moins silence, mais nous entendons mieux tous ces sous-entendus. 

L'intelligence des enfants souffrant, selon Robert Kennedy jr., d'une épidémie de troubles du spectre autistique (TSA),  ou d'hyperactivité, ou que les tenants du New age appellent des "enfants indigos"va plus facilement droit au but que les reliquats d'esprit d'analyse qui nous ont été inculqués par une éducation en transition entre tradition et modernité, entre humanités et appels à la créativité. 

Notre capacité à ingérer de la réalité et donc notre attention sont augmentées grâce à ces prothèses, nos ordinateurs, nos Smartphone qui nous font certes avoir une moindre intériorité directe, mais davantage participer au monde ou à la Création, et donc participer de la télépathie générale qui est le courant communionnel qui relie toute la Création. Tout cela grâce à des prothèses ou à une intelligence artificielle dont j'ai trouvé malin de la part du Premier ministre actuel, François Bayrou, de dire dans sa Déclaration de politique générale, qu'il ne savait ni si elle était intelligente, ni si elle était artificielle. 

Nos prothèses font-elles de nous des personnes augmentées? Elles nous permettent, au gré de l'usage que nous en faisons, d'accroître nos capacités d'attention ou de nous disperser. Que nous soyons dotés de prothèses ne fait pas nécessairement de nous des hommes-machines ou des robots, comme le prédisait Bernanos dans son dernier ouvrage "la France contre les robots". Nous ne le devenons que si nous décidons collectivement de raisonner comme des robots, à base de protocoles, de procédures ou de process.

La transformation de notre civilisation me semble nous inciter à nous interroger sur la notion de personne. C'est cette notion qui est en train de s'élargir et de s'approfondir. Il n'y a plus un homme standard qui dit "on" comme il se disait "homme" avec une réminiscence du son primitif et d'un retour à la maison ("Et wants to return at home"), il y a un "je" en constante inter-action avec les autres et avec des choix qui le déterminent à savoir s'il se place du côté de Dieu, du côté des autres relativement au bien commun, du bon côté de lui-même ou du côté obscur de sa force intérieure ou des forces qui le déterminent ou par lesquelles il est agi, du côté égoïste ou, ce qui revient au même, du côté d'un monde impensé ou du côté de rien du tout. 

A cet égard, il me paraît intéressant que des gens qui paraissent aussi peu dotés de surmoi que Donald Trump ou Elon Musk fassent beaucoup référence à Dieu. Ils le font peut-être pour complaire à une clientèle, mais à leur insu ils approfondissent la notion de personne, en-deçà et au-delà de la notion d'"homme augmenté" et même en-deçà de la notion de valeur. Ils incitent à reconnaître, en-deçà de toute valeur, la valeur absolue de la personne dont il faut penser l'éventuelle augmentation comme n'étant pas incompatible avec la divinisation.  Trump, Musk et Poutine, si mal qu'ils gouvernent (mais leurs détracteurs gouvernent-ils beaucoup mieux?) ressuscitent la personne, car ils la réintroduisent dans ces choix qui font l'histoire. C'est une "liseuse" (expression idiomatique du lieu cité infra) du "Forum catholique", la bouquetière Glycéra dont j'ai parlé dans mon "Apologie d'une intériorité", qui m'a rendu attentif à ce que révélait de la personne l'mergence de figures comme Donald Trump ou Vladimir Poutine. Mais dès que s'est posée la question du clonage, je supportais mal que l'Église se dresse d'instinct vent debout là contre, car même un clone n'aurait pas la même histoire que celui dont il reproduirait le patrimoine génétique à l'identique. Sortir les clones a priori de l'humanité par refus du transhumanisme reproduit la même erreur que celle qui avait sorti de l'espèce humaine les enfants nés de FIVET après avoir stigmatisé les "enfants naturels". 

Le matérialisme n'est pas le contraire du spiritualisme. Gustave Martelet s'est sans doute montré un peu naïf de placer l'esprit après Bergson hors de toute "localisation cérébrale", mais il fut visionnaire de prétendre que l'esprit était immortel, indépendamment et plus certainement que l'âme, puisque l'esprit n'est pas sans renvoyer à une existence matérielle. 

Le scientisme n'est pas absolument contraire à la foi. C'est une doctrine d'apprentis sorciers portés à abuser du pouvoir de l'intelligence humaine qui fera toujours tout ce qu'elle peut, au rebours de l'amour qui ne fera jamais que ce que peut l'amour, affirmait François Varillon, mais l'amour de Dieu peut transformer les résultats les plus controuvés de la science moderne.

BHL ou la France protestante

Justice au Singulier: Entretien avec Bernard-Henri Lévy

 

J'ai déjà écrit dans ces colonnes que BHL était l'homme de France que chacun se donnait le loisir, la facilité et la liberté de détester sans craindre d'avoir à récuser un procès en antisémitisme que cet homme a l'élégance de ne pas faire à ses détracteurs et cela doit être dit en préambule, alors même qu'il fait partie de ces vigilants qui ont toujours lutté contre la montée de l'antisémitisme quand il touche aux autres, mais pas contre leur propre personne qui en sont vaccinés. BHL accepte d'être détesté parce qu'il reconnaît écrire des livres clivants qui lui valent de voir accumuler contre lui des réprobations farouches et des haines tenaces de la part d'adversaires à qui il reconnaît la qualité de ne pas être amnésiques. Ce n'est pas seulement à cause du charme de son expression, mais à cause decette honnêteté intellectuelle que, pour ma part, je n'ai jamais détesté BHL même s'il avait un titre à ma détestation: il a entraîné la France dans la guerre de Libye par une sorte d'"ingérence humanitaire" à la Kouchner, et lorsque Nicolas Sarkozy est arrivé au pouvoir, j'avais anticipé qu'il devrait choisir entre ce que j'appelais l'axe bernard-henri-lévy-kouchenérien et le védrinisme dont la suite a démontré que ce pouvait être un vichysme déguisé. Car la tectonique des plaques a fait qu'Hubert Védrine tout comme Roland Dumas ont glissé vers une géopolitique d'extrême droite qu'à titre personnel, je ne suis pas loin de partager, essentiellement par pacifisme, pacifisme qui encore une fois est mon seul titre à réprouver BHL pour autant que, selon le mot de Gilles Deleuze, "écrire, ce soit sortir du rang des criminels". Or un écrivain qui entraîne son pays dans une guerre prend la responsabilité de commettre des crimes, un peu comme un candidat à devenir père de la nation doit non seulement s'assurer d'avoir les qualités libidinales et fécondantes y afférentes, mais savoir qu'en contrepartie, il ne fera pas que faire naître, il fera mourir. Écrire et entraîner son pays dans une guerre, c'est prendre cette responsabilité au moral et surtout au physique. Pas étonnant que cela empêche de dormir et je suis insomniaque, car avoir une conscience, c'est avoir des remords.

 

Du temps de ma précoce adolescence où je m'escagassais que d'autres éditorialisent sans que je puisse mettre mon grain de sel ni avoir voix au chapitre sur l'agora, je m'agaçais qu'il y ait des grandes consciences faces auxquelles nous autres anonymes n'avions qu'à fermer notre clapet ostracisé en acceptant leurs oracles qui étaient d'autant plus insupportables qu'ils étaient rationnels. BHL est une de ces consciences qui aiment l'influence qu'ils préfèrent au pouvoir, mais qui sont mues par l'anthropologie pessimiste chère au protestantisme qui est loin d'avoir enfanté les Lumières dans leur culte de la raison dont Luther parlait, rien de moins, comme de "la putain du diable". Ce qu'on suppose des Lumières est un optimisme qui guide la plume de Rousseau, mais que dément sa mélancolie native et son antiprogressisme viscéral. Les Lumières, c'est le kantisme et sa critique de la raison pure ou de la faculté de juger. Le pessimisme de l'anthropologie protestante, BHL le résume bien en disant qu'il ne croit pas au bien et que le totalitaire est celui qui croit s'en saisir. BHL ne distingue pas entre le bien et le mal. Il se borne à distinguer entre le mal et le moindre mal. Car comme Luther, il croit qu'au commencement de l'homme dont la nature est entièrement déchue par la chute, qu'au commencement était le mal, qu'il ne faut raconter qu'une "Histoire du mal" (G. de Tanouarn), que le Léviatan est un animal fabuleux qui a entreautres qualités de diminuer l'hostilité des hommes à défaut de pouvoir instituer l'amitié politique. La ruse de l'anthropologie protestante est d'avoir un élan qui nous fait oublier son pessimisme originel et BHL participe de cette ruse qui fait croire que les Lumières postulent que "l'homme est naturellement bon" et que c'est la société qui le rend mauvais avec ce qui, chez Rousseau, ne procède nullement d'une naïveté bénigne, car "l'homme n'est" à ses yeux "un tout parfait et solitaire" que s'il chasse tous ses semblables qui ne sauraient concourir à sa vie. L'état de nature rousseauiste est celui du chasseur qui veut faire place nette pour être libre et asservir la nature à ses souhaits. "Atchoum!", n'éternue pas BHL à ma prose indigeste, car s'il n'est pas anodin que Philippe Bilger l'interroge sur "Fréquence protestante" afin qu'il puisse faire oublier que son anthropologie est pessimiste et ne croit pas au bien, l'excuse à la ruse de son élan d'influenceur est qu'il cherche la vérité et se résout par avance à la vouloir, si avant qu'elle s'éloigne telle l'étoile ou l'horizon, mais si peu aimable soit-elle que la philosophie ne puisse se permettre de se déclarer de préférence "amour de la sagesse" que "rechercherche de la vérité", ascèse à laquelle s'est toujours soumis Sartre, ce nihiliste déconstruisant l'idée de vocation et le faisant dans ses mémoires, un des premiers maîtres dont BHL s'est essayé à retracer le "siècle" et à qui il a rendu hommage dans l'exercice de sa philosophie sans devoir s'arrêter en face d'un autre "passant considérable" qui aurait laissé une moindre trace, tel Rimbaud si Verlaine ne s'était pas intéressé à lui pour recueillir ce qu'il avait à dire au genre humain.

 

BHL, ici interrogé sur "Fréquence protestante", est un patriote de cette confession demeurée fidèle à "l'Esprit du judaïsme" et partisan du libéralisme, de la "droite libérale", de la "gauche libérale" disait-il hier dans "le Grand rendez-vous", et de "la démocratie représentative" que juifs et Grecs ont inventé, ceux-ci pour l'avoir pratiquée et avoir théorisé ou chroniqué cette pratique dans l'âge d'oranti-trumpiste d'Athènes au Vème siècle, ceux-là, non seulement pour s'être perçus comme un "peuple élu" afin de représenter l'humanité, mais avant tout pour s'être fait vertement tancer par Dieu lorsqu'ils exigèrent un roi auprès de Samuel, car alors ils allaient devenir une nation comme les autres, qui serait opprimée comme les autres nations par un roi dont la plaie de l'idolâtrie suppurerait sur tout le peuple et sa volonté politique mi-figue mi-raisin, la "pureté" étant "dangereuse". "Je veux bien qu’on invente autre chose que la démocratie représentative, mais toutes les tentatives que nous avons vues de pratiquer la démocratie directe, la démocratie sans médiation ont toutes tourné au désastre. »", affirme BHl qui concède que "lepopulisme" fait écho aux "angoisses d'un peuple malheureux", angoisses qui "ne se résoudront pas en sortant les sortants par le dégagisme généralisé et par le branchement de gouvernants qui seraient l’expression non filtrée des humeurs du peuple, car un peuple n'a pas seulement une volonté, il a surtout des humeurs".

 

BHL est sans doute un sioniste, mais ce n'est pas un binational et il se définit comme un patriote français, au patriotisme que je prends le risque de caractériser comme protestant. Il me plaît de l'entendre dire: « J’aime la France. C’est mon pays, je n’en ai pas d’autre et je n’en aurai jamais d’autre." Je partage pour des raisons esthétiques son désamour de ce qu'est devenue la gauche soumise à la France insoumise et à son analphabétisme de la conflictualité tous azimuts là où l'alphabétisation du clivage ouvre au dialogue dans la plus pure tradition philosophique. Comme lui, je trouve à Michel Barnier plus d'allure qu'à François Bayrou qui s'est montré meilleur tacticien (mais le temps a joué en sa faveur) de vouloir tenir par le parti socialiste que de se remettre pieds et poings liés entre les mains du Rassemblement national à l'irresponsabilité duquel on a désormais goûté, nous l'avons essayé, il est coresponsable de la dissolution et de la censure qui a fait tomber le gouvernement Barnier et de l'instabilité politique qui règne aujourd'hui en France.

 

BHL semble "n'appréhender la politique qu'à travers la morale", note Philippe Bilger. Le judaïsme se revendique d'un fonds et d'une responsabilité éthique qui ne résiste pas toujours à l'épreuve de la politique, mais qui, chez l'écrivain BHL, devient une leçon d'écriture. "J’écris facilement et je travaille énormément. Ce qui compte dans l’écriture, c’est la justesse, le rythme, la percussion. Une forme réussi conduit l’émotion et la conviction. Le travail qui consiste à créer une langue bonne conductrice de rhétorique, de conviction  et de vérité. Aragon était un immense improvisateur, mais c’est une grâce. Claudel était un improvisateur". La preuve est que ce dramaturge qui commença par étudier Shakespeare pied à pied comme Brassens s'imprégna des fables de La Fontaine à son retour du STO avant d'écrire ses chansons longues comme des cigares, ce dramaturge (Claudel) capable de dresser cette plus grande des fresques du monde qu'est le "Soulier de satin", rêvait d'écrire des Mémoires improvisés. L'improvisation est l'élan de ceux qui en demandent trop à la vie et qui préfèrent ce trop qui n'est pas à leur portée à tout ce qu'ils pourraient avoir s'ils n'étaient pas fâchés avec les limites ou savaient s'en donner. J'en parle à mon aise, je suis de ceux-là.

 

"Les écrivains sont tous des laborieux. En tout cas moi j’en suis un. Je n’ai jamais eu l’idée d’une œuvre à accomplir, mais j’ai eu l’idée de ce à quoi devait ressembler ma vie et je n’ai pas été trop infidèle à l’idée que je m’en faisais. C’est plus important que le bonheur." Chacun place le curseur de son sentiment de réussite où le mène le tempérament de son corps au vent de son époque. 

dimanche 26 janvier 2025

Tenue de soirée

Je vaisdevenir le spécialiste des chroniques de mes soirées télé.

Hier soir, j'ai regarrdé pour la première fois"Tenue de soirée" de Bertrand Blier avec Gérard Depardieu, Michel Blanc et Miou-Miou dans les rôles principaux. À sa mort, j'avais entendu dire que Bertrand Blier était un excellent dialoguiste, ça ne m'avait pas frappé, j'étais passé à côté comme "la Femme d'à côté", je l'évitais soigneusement, avec l'a priori que c'était un cinéaste très visuel. En m'apprêtant à écrire cette courte recension, je croyais que le film était sorti dix ans plus tôt, en 1976 et non en 1986, et qu'il était en avance sur son temps. En effet, si la date que je lui assignais avait été la bonne, j'aurais pu dire: quelle exploration courageuse de l'homosexualité! Orla dépénalisation de l'homosexualité et les années SIDA étaient passés par là. Sans cela, pour plagier François Fillon dans sa campagne de la "droite Trocadéro" où il croyait devenir notre mentor, qui aurait imaginé Gérard Depardieu en homosexuel plus vrai que nature? Homosexuel dominant, rétorqueront les fines mouches ou les fines bouches. Le film explore l'homosexualité de façon viriliste et décrit les femmes selon des stéréotypes qui passeraient aujourd'hui pour misogynes. Mais ce film date d'un temps où homme et femme jouaient chacun avec ses armes dans le duel et où il ne serait venu à personne de dire que le sexe était une identité de genre ou qu'être une "personne du sexe" équivalait à désigner le sexe faible. Monique (Miou-Miou) ne se prive pas d'humilier Antoine (Michel Blanc) dans la première scène du film; Bob (Gérard Depardieu) ne se prive pas de la baffer, ce qui ne l'empêche pas de leprendre pour "un ami formidable", elle déchantera bientôt.

Mais surtout, quand on voit les mots qu'on met dans la bouche de notre futur Obélix national et quel cas on fait du phalus de notre acteur bien membré, je ne vois pas comment s'étonner des remarques qu'il a faites par la suite à la ville à des partenaires dont il se souciait peu qu'elles consentissent à le devenir. J'avais eu la même impression en allant voir Fort Saganne paru à la même époque et où les scènes qui m'ont le plus marqué sont celles où le mâle dominant qui jouait Charles Saganne lutinait comme un phoque la babydol de la Boom I et II dont Julien Clerc n'avait pas encore fait des seins l'objet d'un hymne national. Après cela, on nous parle d'un #MeTOCinéma. On a tout simplement changé d'époque et avec les illusions rétrospectives qui caractérisent ces changements, on voudrait juger des acteurs de la précédente avec les codes de la nôtre. On leur reproche de ne pas s'être comportés avec la chasteté prude et pleine de retenue de notre néo-puritanisme hypocrite. Ils n'avaient pas prévu qu'on les jugerait à cette aune. Quand ils étaient et n'étaient pas encore des has been pour n'avoir pas anticipé ce qu'on penserait d'eux aujourd'hui, on les admirait pour leurs manières grossières et mal dégrossies.

On pourrait croire que la galanterie a fait des bonds. Je crains plutôt que les hommes et les femmes n'aient pris leurs distances et qu'il soit désormais difficile de les faire se rapprocher.