Commentaire posté sur le blog de
Philippe Bilger, au pied de l’article :
Quelque chose me dit que la saillie
d’Abou Dabi sera reprochée à Nicolas Sarkozy comme la citation tronquée du
discours de Dakar à propos de l’homme africain et de son entrée dans l’histoire,
insuffisante, faisait dire Henri Guaino à son porte-parole, nulle, a retenu l’opinion.
– Avez-vous remarqué que c’est
précisément depuis la présidence de Nicolas Sarkozy, dont le nègre parlait mal
de l’homme africain, qu’on reconnaît la plume dans celui qui répète ses
discours ? Le nègre a accédé au statut d’auteur. Peu s’en est fallu qu’Henri
Guaino devînt candidat à la présidence de la République, ce dont je me serais
personnellement très bien porté. -
« La démocratie, c’est le
gouvernement du présent », accusait Maurras, et « le gouvernement du
spectacle », renchérissait Guy Debord, où non seulement le moindre
long-termisme est impossible, mais où « le vrai est un moment du faux »,
de sorte que non seulement les lois qui sont votées sont à courte vue, mais
elles sont votées sur la base de mensonges, mensonges ayant trait aussi bien à
la temporalité (« l’actualité commande ») qu’à la hiérarchie de l’information
(on réagit au fait divers et à l’émotion qu’il suscite).
L’information et l’actualité
singent la culture. La culture étant une information de la civilisation qui extrait
de l’arbitraire en les sélectionnant, l’artiste qui illustre son siècle ou la
citation qui représente une pensée, l’actualité informe en imitant la culture
et en sélectionnant arbitrairement des petites phrases insipides et
décontextualisées, qu’elle extrait d’un long discours déroulant tout un raisonnement,
le plus souvent intelligent. La culture est du passé choisi, l’actualité est du
présent sélectionné.
La chose est sans importance,
mais la chambres d’enregistrement qu’est notre Parlement-croupion, n’a pas grand-chose
à envier aux parlements que vitupérait Chateaubriand dans les mémoires d’outre-tombe, et qui ont précipité
la chute de l’Ancien Régime. Macron aggrave la dérive en prévoyant que le droit
d’amender sera indexé sur le nombre de députés que compte le groupe
parlementaire. Autrement dit, votre droit de modifier la loi diminuera si vous
êtes dans l’opposition, car vous n’êtes pas là pour discuter la loi, mais pour
enregistrer la loi.
L’honneur de la démocratie est-il d’être un
régime faible ? En deux jours, vous employez deux fois ce mot d’honneur, d’abord
pour souligner celui de la responsabilité, et ici pour mettre la responsabilité
à l’épreuve des contre-pouvoirs. Or, pour s’exercer pleinement, la
responsabilité peut-elle s’affaiblir ? À vous lire en effet, « l’honneur
[de la démocratie] », qui n’est pas qu’une « empêcheuse de gouverner
en rond », « est précisément d'interdire à des "hommes
forts" de faire fi d'elle. »
Mais nos gouvernants sont-ils des « hommes
forts » ? Je me souviens d’une longue interview de Nicolas Sarkozy
dans Paris Match, alors simple ministre de Chirac et trublion du gouvernement,
où on le voyait jouer au foot ou au tennis avec son petit Louis en lui
recommandant : « Frappe fort. » Être fort, ce n’est pas frapper
fort.
Comment l’entropie et la loi de dégradation de l’énergie
et des profils se sont-elles appliquées aux présidents de la Vème République ?
Les deux premiers furent des patriotes sincères ; les deux suivants
avaient des destins français ; les deux suivants étaient des ambitieux ;
François Hollande était une chiffe molle empathique et sympathique. Le locataire
actuel du Château n’est pas un pisse-froid, mais un pisse-congelée et pas un
ambitieux, mais une ambition indifférente. Jacques Chirac voulait arriver à
être président de la République en France ; Emmanuel Macron voulait
arriver à n’importe quoi, n’importe où, et il est devenu président de la
République en France.
La démocratie serait-elle par
nature un régime faible et un pouvoir impersonnel ? Ce qui l’affaiblit est
d’être une hybridation de pouvoir personnel sur un régime impersonnel, de
pouvoir devant durer peu et dépendre de la versatilité de l’opinion. La
démocratie représentative est la greffe qui a mal pris, d’un peu de pouvoir
personnel sur un régime impersonnel. Comme chacun de nous gagnerait à courir
jusqu’au bout son risque existentiel, la démocratie sortirait renforcée d’aller
au bout de sa logique. On la dit le régime de la séparation des pouvoirs ?
Alors pourquoi l’exécutif dispose-t-il en pratique du quasi-monopole de la
proposition des lois ? Pourquoi le Parlement vote-t-il des lois sans
écrire ses décrets d’application ? À quoi sert la Cour des comptes et
pourquoi gaspillons-nous notre Trésor à la laisser subsister, si ce sont les
parlementaires qui votent le budget au gré des pressions des agents d’influence ?
Pourquoi les citoyens n’exercent-ils pas directement le pouvoir législatif et
ne votent-ils pas les lois qui les concernent ? Doit-on favoriser jusqu’au
référendum d’initiative populaire ? Toutes réformes qui seraient beaucoup
plus radicales que la VIème République de Jean-Luc Mélenchon ou de
(politiquement) feu Arnaud Montebourg (jusqu’à plus ample informé), QUI NE
SERAIT qu’un parlementarisme renforcé, tempéré par le tirage au sort.
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