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samedi 18 novembre 2023

S'émerveiller d'être chrétien

Même si ce n'est plus très à la mode, je ne dirai jamais assez mon émerveillement, non pas d'avoir la foi (car la foi n'est pas mesurable pour une raison que je vais évoquer), mais d'appartenir à l'Église.

Dans mon enfance, ce n'était pas "sexy". Il y avait un catholicisme sociologique que je trouvais insupportable. Les gens allaient à l'église pour montrer leur belle bagnole. Aujourd'hui, quand même certains le font encore, ça ne les empêche pas de ne pas aller à la messe sans savoir pourquoi. Plus personne ne va à la messe sans raison.

Et puis surtout, l'Église est une famille où l'on fait l'expérience d'une amitié fraternelle et spirituelle. L'Église est "le corps du Christ où nous sommes tous membres les uns des autres" (sr Nathalie de Taulignan citant st-Paul)

Une famille où il y a des prêtres dont un invité de "Radio courtoisie" disait ce soir: "Je demande à un prêtre d'être un saint." Moi aussi, pas moins. Et je le lui demande parce que, s'il l'est, il me montrera un chemin de sainteté qui m'engagera et sera contagieux.

Trois paroles entendues aujourd'hui par des prêtres accompagnés ce jour:

André Piette qui ne m'a pas dit cela aujourd'hui, mais nous sommes revenus sur cette question que je lui posais de façon lancinante sur une affirmation qu'il fit un jour: "Nous sommes trop facilement passés d'un Dieu dur à un Dieu mou." "Mais quel est le vrai Dieu?" "Ni un Dieu dur, ni un Dieu mou, mais un père. Le Dieu de Jésus-Christ est un père et Jésus-Christ nous apprend à dire "notre Père". Car (extrait d'un échange avec ma Nathalie ce matin au téléphone) il faut commencer par s'approprier cette paternité divine avant de pouvoir dire "Notre Père".

Du P. Bernard Schlotter sur la respiration chrétienne: "Nous inspirons la grâce de Dieu et nous expirons nos péchés."

Du même: "Tous autant que nous sommes, nous avons beaucoup plus de cinq talents. Comme tout ce qui a été créés, Dieu a vu que nous étions très bons. Nous avons reçus le baptême que nous devrions fêter comme notre anniversaire. Nous avons la foi. La messe est la concentration de tout le mystère du Christ. Nous avons une vie pour porter du fruit au service de nos frères. Nous avons le talent de prier. Nous avons reçu la Confirmation qui signe l'entame de notre quête de Dieu et de notre quête de l'Esprit."

De l'abbé Guillaume de Tanouarn en conversation avec Paul-Marie Couteaux en première partie de son "Libre journal de chrétienté":

"Nous vivons des temps apocalyptiques, non pas en ce sens que nous approchons spécialement de la fin du monde, mais parce que l'apocalypse est la révélation des pensées des coeurs" (lui) "sans limitation de ses passions et sans compréhension des passions d'autrui."(PMC)

"Toutes les religions sont porteuses d'un messianisme et le messianisme est dangereux. Le christianisme échappe au messianisme parce qu'il introduit un doute et ce doute est la foi." [Il n'introduit pas comme à un donné dans une relation à Dieu évidente.] "Le Christ s'est appelé "Salut" et non "Mashia". Il a préféré porter le nom grec de Christos, non pas porteur des solutions de tous les problèmes humains, mais oint de Dieu."

Et enfin, mon éternel ami Hervé que j'ai tant disputé, provoqué, coléré. Je lui expose mardi matin pour la énième fois que je ne comprends pas la condition de fils comme horizon de la condition humaine. "Mais le père est celui qui veut notre bonheur. Seulement pour le comprendre il ne faut pas le coréller à la paternité humaine, il faut contempler le mystère de la paternité selon la paternité divine."

Quand je reçois toute cette lumière, je suis émerveillé d'être chrétien. 

jeudi 16 novembre 2023

Vincent Bolloré, un téléévangéliste à la française

Je ne serais pas malheureux si Vincent Bolloré n'existait pas. Et pourtant, j'étais très bien disposé à son égard: il admirait quelqu'un que j'aimais beaucoup, le Crabe tambour, le commandant Guillaume, dans l'émission duquel il s'était invité sur "Radio courtoisie" par pure et simple désir de rendre hommage à ce héros, à ce soldat, à ce corsaire. 


Je fantasmais et connaissais si peu cet entrepreneur que, quand il a offert quelques jours de vacances sur son yacht à Nicolas Sarkozy en guise de retraite monastique pour recoller les morceaux de son couple, je me suis couvert de ridicule en affirmant sur "Radio ici et maintenant", un médium-forum où il m'arrivait d'intervenir, que Vincent Bolloré n'avait pas un grand poids médiatique. C'était bien peu de diriger "Direct matin" et "Direct soir". Peut-être alors détenait-il déjà le canal 8 de la TNT, mais à part le fait que Jean-Marc Morandini en était le Deus ex machina et y jouait à bas bruit le rôle qu'y joue aujourd'hui Cyril Hanouna, cela n'influençait pas grand monde.


Je ne pouvais pas m'imaginer que sa puissance montante absorberait un jour "Vivendi" et reprendrait "Canal" dans cette opération. Lorsque c'est arrivé, "France inter" le dépeignait en investisseur influenceur qui, avant d'évincer les Guignoles, écrivait des sketchs de sa propre main pour leur montrer quel genre d'humour ils voulait les voir pratiquer s'ils voulaient rester ses employés. C'était à n'y pas croire et pourtant rétrospectivement, à voir en effet "la reprise en mains" qu'il a exercée sur les médias qu'il a rachetés, que Bolloré écrive les sketchs de ses propres mains était un sketch, mais  un sketch probable et concevable à défaut d'être convenable. 


Je n'allais tout de même pas m'alarmer pour "Canal". Après tout ce n'était qu'une création de François Mitterrand qui ouvrit cette unique chaîne privée pour la donner à son ami André Rousselet qui, quand il n'exploitait pas les taxis de sa compagnie la G7 dont il était l'actionnaire principal et à qui il demandait des commissions exorbitantes, appartenait à la gauche de la dérision permanente. "L'esprit Canal" était le nom donné à cette dérision qui employait certes quelques humoristes vraiment drôles, mais qui avaient la fâcheuse habitude de cracher dans la soupe en ne mettant jamais leur courage au bout de leurs idées. Preuve en était que quand Vivendi fut racheté par "TF1" bien avant que Bolloré ne l'acquît, ces humoristes courageux manifestèrent pour nous prévenir qu'on allait voir ce qu'on allait voir et ils sont finalement restés des employés modèles du nouvel acquéreur qui, il est vrai, eut l'intelligence de ne pas changer grand-chose à l'"esprit Canal" en gage de leurs fonds, ni beaucoup intervenir dans la politique éditoriale de la chaîne. On allait voir ce qu'on allait voir et on n'a rien vu. 


Bolloré retournant "l'esprit canals" et faisant  une OPA idéologique sur cette chaîne, c'était drôle comme une ironie du sort. Ou comment un abus de pouvoir mitterandien pouvait-il être retourné par une simple fusion-absorption. Le Florentin n'aurait pas détesté la subversion conservatrice, lui qui, un an après avoir donné cet os à ronger à sa gauche dérisoire, prit langue avec Sylvio Berlusconi, entrepreneur de spectacle qui voulait faire une télévision de westerns spaghetti avant de se lancer en politique sur les pas de Reagan, autre ancien comédien de série B.


Vincent Bolloré "n'est pas seul" dans son empire. Il y a ses fils. André Rousselet n'était pas seul à "Canal". Il y avait Alain De Greef, Rodolphe Belmer ou Pierre (de) Lescure. C'est une façon différente de savoir s'entourer. 


Vincent Bolloré n'est pas seul à être conservateur. Nous pouvons l'être aussi, même moi. Seulement le vrai conservateur est une espèce de traditionaliste qui aime l'histoire, les moeurs

, le patrimoine et la foi. Le conservatisme avait tellement été banni de la sphère publique qu'il attendait sa revanche et qu'on pouvait se satisfaire du pluralisme qu'allait nous offrir Vincent Bolloré. Mais le conservatisme taiseux de Bolloré est à sa sauce. Bolloré a "ses croyances" et il tient à les imposer. On peut diffuser "des messes" sans les teinter d'un parti pris judéophile et systématiquement islamophobe. 


Les écrivains de Brive-la-gaillarde ont du souci à se faire après le rachat (sic) d'Achette par Bolloré. N'a-t-il pas repris en mains tous les titres qu'il a acquis? Avec lui, le commanditaire n'a pas besoin de parler pour se faire entendre. La reprise en mains du "JDD" par Geoffroy Lejeune devait confier l'hebdomadaire à un journaliste  professionnel qui savait lever des fonds et retrouver des recettes pour un organe de presse en mauvaise posture financière. Geoffroy Lejeune  n'a pas mis longtemps à imprimer sa marque et à transformer l'hebdomadaire en la voix de son maître. On ne pouvait pas non plus oublier le précédent d'"E-télé" dont les journalistes n'avaient pas tort, dans une longue grève, de signer une motion de défiance à leur nouveau patron qui allait presque tous les remercier.


On connaît désormais trop bien Bolloré pour savoir qu'il ne déçoit jamais dans son rôle de commanditaire qui n'a pas besoin de se montrer pour être obéi. Il n'investit jamais à fonds perdus, jusqu'à fabriquer de toutes pièces un candidat présidentiel à sa botte en la personne d'Éric Zemmour, qui ne  se cachait pas d'être la créature de Bolloré dans "la France n'a pas dit son dernier mot". Bolloré avait fait son chemin depuis le marquage de son territoire par le voyage offert à Nicolas Sarkozy.   C'était un cadeau clinquant offert à charge de revanche à ce président blingbling. Martin Bouygues qui était l'ami historique de celui-ci n'aurait jamais agi de la sorte. Et pour cause: c'était un professionnel du soft power entreprenarial et il était de la vieille école, celle d'un Édouard de Rothschild faisant la charité  à "Libération" en le rachetant, sans infléchir ostensiblement la ligne éditorial de ce journal en quête de lecteurs et emblématique  d'une gauche qu'il valait mieux avoir pour soi que contre soi, en plus de mettre quelques annonceurs dans sa poche. Martin Bouygues n'avait d'autre ambition que d'offrir à ses propres annonceurs du temps de cerveau disponible de ses téléspectateur. 


Martin Bouygues n'était pas seul et savait s'entourer de professionnels de la télévision. Vincent Bolloré n'a cure d'être seul, d'être mal entouré ou de ne pas être un professionnel de l'audiovisuel. Ce qu'il veut, c'est faire de sa chaîne "Cnews" un "Foxnews" à la française et d'en faire la vitrine de ses idées, pas de son sens de l'humour. Bolloré père doit être trop fin pour goûter les saillies de Cyril Hanouna. Mais Hanouna sait se montrer aussi intelligent qu'il est vulgaire. Il peut alterner d'insupportables séquences sur la pétomanie supposée de Benjamin Castaldi et des débats politiques ou sociétaux de bon niveau. Cette inflexion à 180° dans les talkshows est une marque de l'esprit du temps, où toutes les libres antennes radiophoniques destinées aux jeunes et animées par des boomers roués comme Maxou comme Arthur alternaient une extrême vulgarité à des réflexions psychologiques de haute volée pour une génération qui mettait  sur le même plan tous ses affects, des ébats sexuels au engagements sentimentaux, politiques ou sociaux. 


En 2002, au début de la téléréalité, la production et Benjamin Castaldi ont fait sortir du loft 2 et de leur réserve les candidats forcément groggys à l'idée que Jean-Marie Le Pen puisse accéder au pouvoir. Cette perspective n'était pas celle  de la France des lofteurs,  c'est devenu celle de Bolloré, dont le mélange des genres des émissions de Cyril Hanouna est la concession à l'esprit du temps, sa "petite blague" et son "en même temps" à lui, ou la part de l'esprit potache que consent  ce téléévangéliste à la française pour installer les crédules dans sa foi du charbonnier tout en suscitant un Trump qui croiserait les intérêts des catholiques, des judéophiles et des capitalistes. Un conservatisme à l'hameçon duquel on n'est pas obligé de mordre, surtout en plein avant-guerre mondiale et civile. 

Pourquoi pas moi?


@Michel Deluré | 16 novembre 2023 à 10:24
"Certes, n'importe qui peut très bien dire « je suis moi».

J'avais une amourette qui, chaque fois qu'elle me téléphonait, me disait "c'est moi" d'un air triomphant en me dérangeant presque à chaque fois, car j'en aimais une autre beaucoup plus qu'elle, tellement idéale que je trompais mon idéale avec elle qui était amoureuse de l'amour, mais qui ne savait pas qu'elle était vide et que c'était peut-être ce vide qui faisait son charme d'idole.

Elle savait qu'elle était vide, mais elle ne voulait pas le savoir et quand elle vous disait "c'est moi", elle croyait vous apporter le monde alors qu'elle ne vous apportait rien.

Mais le monde était peut-être encore plus vide qu'elle qui se prenait pour le centre du monde et qui en effet l'était, quand on vivait avec elle.

Elle s'annonçait en me disant: "C'est moi." Et j'avais envie de lui dire: "Ah bon, ce n'est que toi?" Or elle était sublime et je ne pouvais pas la sublimer en l'estimant, car elle n'était qu'elle, toute centrale qu'elle était.

"Mais vous conviendrez que ces mots ont une résonance autre, qu'ils soient prononcés dans un contexte particulier par un humoriste, en l'occurrence Pierre Dac dans ce cas précis":

Pour rappel: "Je suis moi. Je viens de chez moi et bientôt j'y retourne."
Un psychanalyste que je consultais pour comprendre qui j'étais me dit un jour: "Personne ne quittera ce monde en pouvant répondre à la question: "Qui suis-je?" Je laissai tomber sa cure et son cabinet s'il ne pouvait pas m'en dire davantage.

" ou qu'ils le soient par le commun des mortels."
Je ne crois pas dans la banalité du moi? Je ne connais que "la banalité du mal" et je ne crois pas aux anonymes, non pas dans le sens de Patrice Charoulet qui n'aime pas l'anonymat de la pseudonymie: mais je crois qu'il n'y a pas d'anonymes, il n'y a que des noms propres dont certains sont connus et d'autres inconnus. Tel être distingué ou célèbre peut être aussi propre que le nom qui l'a fait sortir du lot et du commun pour devenir une personnalité, mais il y a beaucoup de personnalités sordides bien qu'elles aient un nom propre.

Pourquoi, hormis la postérité, Pierre Dac serait-il moins le commun des mortels que moi? Pourquoi pas moi? Quand on me fait une proposition quelle qu'elle soit, j'ai tendance à répondre: "Pourquoi pas?" je préfère le "pourquoi pas" serviable ou qui ne veut pas mourir idiot au "pourquoi" des enfants dont j'aime les questions sans réponse, mais qui en posent d'aussi stériles que celle que j'ai posée à Thierry Piras, psychanalyste chamane: "Pourquoi avons-nous deux yeux et notre front ne serait-il pas le point d'intersection de notre bilatéralisme psychique à propos duquel Freud et Fliess se sont disputés, chacun s'attribuant la paternité du concept et le premier l'ayant en réalité volé au second?" "Pourquoi avons-nous deux yeux? Vous n'avez qu'à demander à Dieu." "Papa bon Dieu, c'est mon surmoi."

Tu me sollicites et je te réponds: "Pourquoi pas?", c'est le contraire du "pourquoi moi?" que hurlent à part soi tous les dolents et tous les valétudinaires qui ont un tel mal de ventre qu'ils se disent qu'ils n'ont pas mérité ça. Le "moi" qui est banal prend à mal d'avoir mal. Pourquoi? Ou pourquoi pas?

Rien ne saurait "[différencier] le "moi" célèbre de celui de "monsieur tout le monde" du moment qu'Ulysse a dit qu'il n'était Personne et qu'avant Jean Gabin, Socrate a dit que tout ce qu'il savait, c'était qu'il ne savait rien. Science paradoxale du connaisseur inconnaissant, inscience qui me paraît le faux-fuyant du faux monnayeur ou du banquier universel!

Je préférerais un homme qui me dirait: "Tout ce que je sais en tant que moi et en tant qu'homme, c'est que je ne vaux rien, car je suis un vaurien. Seigneur, dans ton Royaume, souviens-toi du vaurien que je suis."

 

mercredi 15 novembre 2023

Vincent Peillon n'a pas refondé l'école

Vincent Peillon n'a pas refondé "l'école de la République" qui, selon le mot pour une fois bien inspiré de  Gilles Kepel, est devenue "l'école de la pseudo-bienveillance et du relativisme moral".


Vincent Peillon avait écrit un livre intitulé: "La Révolution n'est pas terminée." Il avait un compte à régler avec l'Église catholique. Il accuse aujourd'hui les catholiques de s'être mis en travers de son chemin et d'avoir entravé son action avec une agressivité qui n'est pas entièrement fantasmée de sa part.


Avant de devenir à son tour ministre de l'Éducation nationale, Najat Valaud Belkacem, quipromouvait "les ABC de l'égalité" sous les hourvaris de "la Manif pour tous", mentait en déclarant que "la théorie du genre n'existe pas", elle qui venait de commander à l'IGAS (je le découvre dans cet article de Didier Desrimais:


Révélations de Vincent Peillon: les cathos lui ont fait vivre l’enfer! - Causeur) "un rapport sur l’égalité entre les filles et les garçons à l’école en proclamant que « la cible des enfants de moins de trois ans se doit d’être au cœur des politiques publiques dans la mesure où les assignations à des identités sexuées se jouent très précocement ». 


"M. Peillon, désireux de complaire à sa jeune collègue et d’être dans l’air du temps, rédige dans la foulée une circulaire destinée aux recteurs d’académie. Ces derniers sont invités à favoriser « les interventions en milieu scolaire des associations qui luttent contre les préjugés homophobes » et à « relayer avec la plus grande énergie la campagne de communication relative à la “Ligne Azur”, ligne d’écoute pour les jeunes en questionnement à l’égard de leur orientation sexuelle ou de leurs identités sexuelles. » C'était le tremplin de l'encouragement à la "transition de genre" dès le plus jeune âge.


» Quelques parents et enseignants ont alors la curiosité d’aller jeter un coup d’œil sur le site de l’association “Azur”. En plus d’un glossaire expliquant les nouveaux mots issus de la novlangue sur le genre, le lesbianisme y est vivement encouragé dans un livret numérique comportant, à la rubrique “Tombe la culotte”, des photos ne laissant aucun doute sur l’orientation sexuelle de damoiselles tout de cuir vêtues et armées de godemichets, tandis que les garçons, eux, sont invités à user de drogues « festives » et désinhibitrices pour combattre leur homophobie en expérimentant des pratiques homosexuelles." 


Le Conseil d'État abroge la circulaire Peillon sur la base du rapport de M. Rémy Keller qui commente: « La brochure (du site Azur) fait l’éloge du sado-masochisme, de l’échangisme et du libertinage, et décrit en détail des pratiques sexuelles diverses, dans des termes crus que nous serions fort gênés de reprendre dans cette enceinte et qui sont manifestement inadaptés aux élèves – et pas seulement les plus jeunes. […] Plus grave encore, le site encourage des pratiques interdites par la loi, et encourage à des comportements sexuels particuliers. Comment ne pas comprendre que des parents – et des enfants – soient choqués à la lecture des contenus que nous avons évoqués ? […] Ce n’est pas faire preuve d’une pudibonderie excessive que de constater que la présentation quasiment pornographique de certaines activités sexuelles est manifestement inadaptée aux élèves et qu’elle n’a certainement pas sa place dans les établissements d’enseignement secondaire. On ne peut que s’étonner de la légèreté du ministre qui a encouragé des enfants – parfois âgés de dix ans à peine – à consulter ce site. » 

Les AFC, mais plus encore Farida Belghoul auraient-ils eu raison? (L'initiative de cette dernière dite des "Jours de retrait" a été honteusement pillée par Éric Zemmour, coutumier du recelle de titres et d'idées, son association des "Parents vigilants"qui doit tout aux "Jours de retrait".


-Vincent Peillon ambitionnait, rien de moins, que de "[refonder] l'école".  Je me préparais alors à devenir professeur et j'ai démissionné avant d'enseigner faute de talent d'acteur et parce que les programmes séquentiels de l'enseignement du Français me semblaient dépourvus de toute cohérence disciplinaire et ne pas être de nature à construire une tête bien faite.


Pour refonder l'école, il ne misait pas sur une inflexion programmatique, mais sur l'introduction de l'éducation à tout et n'importe quoi en lieu et place des contenus disciplinaires. Il s'agissait de « désanctuariser la classe » en entérinant la diminution des heures d’apprentissage de la lecture et du calcul pour les remplacer par du temps passé en « ateliers » abordant, par exemple, le tri des déchets" ou la prévention contre les conduites à risque. 


-Il se fendit aussi d'une "Charte de la laïcité" en quelque vingt points mal écrits qu'il s'agissait d'afficher partout et si possible d'apprendre par coeur et qui cette fois ne visait pas les catholiques, mais visait sans les nommer les élèves issus de l'islam prosélyte, l'islam étant, selon ma formule, la diabolique surprise de la gauche laïciste qui donnait raison aux analyses de leur pire ennemi Jean-Marie Le Pen, même si cette gauche persécute à tort les jeunes filles pudiques ou qui veulent porter une belle robe ou plutôt que leurs grands frères qui les surveillent ou les malmènent, leurs pères qui les forcent à se marier et les idéologues qui trompent les uns et les autres à grands coups d'alerte Internet.


J'ai connu Vincent Peillon député, comme auteur d'un indigeste rapport sur le handicap. Dans un Français indigne d'un philosophe,  il faisait assaut d'"inclusivisme", concept  qui fait toujours illusion auprès des associations de personnes dites "en situation de handicap" et de leurs soutiens et proches qui souffrent de l'infirmité des gens qu'ils aiment, mais qui aboutit à empiler sur la tête des handicapés des milliers de dispositifs qui font que pour comprendre les mécanismes de la "compensation du handicap", il faut être un juriste rompu à l'usage d'une langue étrangère et non pas une personne concernée qui recherche une solution pour élever ses enfants ou bénéficier de droits élémentaires.


Mis au rancard du ministère de l'Éducation nationale où il se serait bien vu avoir la longévité de Jean-Michel Blanquer (et aurait peut-être été moins nocif que ce ministre gesticulateur de l'inégalité des chances qui voulait repérer dès l'école maternelle les enfants irrécupérables), Vincent Peillon commença par enseigner à Genève, puis prétendit se refaire une virginité politique en présentant sa candidature (pas nulle du tout) à la primaire socialiste de 2017. Battu, il ne se comporta ni comme un renégat ni comme un salaud, c'est-à-dire qu'il ne soutint pas Manuel Valls, mais il se mit au service de Benoît Hamon, qui disparut corps et biens quand il vit qu'il n'avait plus d'avenir politique en dehors d'un recentrage sur la famille qu'il formait avec ses enfants et sa femme LVMH. 


Mais comme "on ne meurt jamais en politique" ou qu'on est toujours reclassé quand on fait partie du personnel politique, "Vincent Peillon a été nommé, en 2021, conseiller maître expert en service extraordinaire à la Cour des comptes. Fort de cette éminente fonction, l’arrogant pérore sur les plateaux de télé. Il y livre des argumentations consternantes avec le même ton condescendant que celui qu’il maniait lorsqu’il était ministre." 

samedi 11 novembre 2023

De la finitude

Échange avec le frère Norbert-Marie Sonnier (OP) autour du thème de la finitude à partir de ma question un peu obsessionnelle: Pourquoi Dieu qui est l'amour infini nous a-t-il créés finis plutôt qu'illimités? "Je ne sais pas, me répond-il. Il y a des philosophescomme Heiddeger qui nous aident à réfléchir à la question, et ill y a deux manières de transcender la finitude: le désir qui peut s'étendre à l'infini et le fait d'essayer de capter, d'intégrer et de s'intéresser à l'universel de l'homme. 

Humanisme ou mystique?

Discussion stimulante avec Jean-Pierre Gosset sur le blog de René POujol. Merci à lui de la permettre.


"Jean-Pierre Gosset10 novembre 2023 at 12 h 01 min

Merci à René et à tous deux.

Ton billet René m’a conduit à questionner de prime abord ce qui distingue l’humanisme du mysticisme. J’ai trouvé un seul texte clair: « Mysticisme et humanisme – Autour du tombeau vide » de Jan Miernowski * () que l’auteur résume ainsi « Mysticisme et humanisme sont inversement proportionnels [comme des vases communicants plus on a de l’un et moins on a de l’autre, dans le sens où l’humanisme vise une parole grosse d’une présence, tandis que le mysticisme se résigne à la parole travaillée par l’absence. Cette thèse générale est soumise au jugement de quatre auteurs, échelonnés dans la longue durée : Erasme de Rotterdam et Marguerite de Navarre, respectivement, un humaniste et une mystique prémodernes ; Michel de Certeau, un anti-humaniste et un mystique postmoderne ; et enfin Bruno Latour, une sorte de néo-humaniste qui clame hautement son « amodernité ». Chacun de ces écrivains met la parole humaine – et particulièrement la parole religieuse – face au sépulcre vide du Christ, au lendemain de la Résurrection. »

Vos remarques sur les mots, Michel et Julien rejoignent ma question « humanisme et mysticisme? ». Les mots vivent et sont objet de « jeux » plus ou moins sains, de manipulation au long cours. De même que gnose a signifié parler avant connaitre, hérésie a qualifié le débat avant l’erreur; et païen désignait le paysan sans doute un peu frustre et non le mécréant et l’impie. Ah, comme on l’aime le prochain!

Plus dans l’actualité, bien qu’il y ait près de 500 millions de sémites, dont une large majorité d’arabes, le mot antisémite a pris le signification actuelle sur la base d’idées médiocres voire nauséeuses ravivées à la fin du 19ème.

Ah, comme on l’aime le prochain! Et puis, il y a aussi, un peu d’humour, « l’ordre mis par Dieu », ce seul mot français du langage informatique qui surnage sur l’océan anglais: ordinateur inventé par Jacques Perret philologue théologien, auteur aussi en 1968 de « inquiète Sorbonne »).

Ce billet m’a surtout rappelé 1969, et cet échange avec un des dirigeants du pôle logements d’Emmaüs (Camus, Henri je crois?) qui m’a dit avoir quitté avec d’autres l’abbé Pierre pour fonder « un autre Emmaüs » exclusivement logement quelques années plus tôt, sur fond d’autoritarisme, de manque de professionnalisme et de mauvaise gestion. Je viens de lire que, selon Axelle Brodiez-Dolino** l’époque de cette scission a correspondu à l’éviction de l’abbé Pierre par l’establishment politico-catholique pré-conciliaire à cause de ce que l’auteur nomme « L’incapacité du « père » à arbitrer ». Chaque aventure humaine est singulière et complexe car vivante.

* https://books.openedition.org/pup/48150?lang=fr

** https://laviedesidees.fr/Les-trois-ages-du-conflit.html

Répondre à Jean-Pierre Gosset

etudestorrentielles.blogspot.f…

JULIEN WEINZAEPFLEN10 novembre 2023 at 22 h 19 min

Votre commentaire est stimulant, Jean-Pierre.

Je me souviens d’un vendredi saint très tourmenté où je me sentais pris à mon propre piège et où mon ordinateur se mit à tourner sans s’arrêter tandis que j’inventai la maxime: « On est souvent le dindon de la farce que l’on a soi-même écrite. » Comme j’essayais en vain d’arrêter mon ordinateur, j’entenddis le Père Raniero Cantalamessa, chapelin de la maison du pape, qui disait ce que je pris pour une maxime définitive: « On a souvent imaginé de reconstituer le mouvement de la pensée humaine, mais on n’a jamais imaginé une machine qui puisse aimer comme un être humain. » Je m’étais forgé cette définition atomiste de la pensée humaine à laquelle je souscris encore, car on peut être atomiste et croyant, matérialiste et spiritualiste: « La pensée humaine est la rencontre électriquement organisée entre deux infinitésimaux universels présents dans le cerveau. » Cette définition était tributaire de ma lecture de Bergson qui s’oppose absolument à toute localisation cérébrale de l’esprit (pas moi), mais que je rejoins quand il pense que tous nos souvenirs sont présents à notre mémoire.

Pour en revenir à l’ordinateur, l’intelligence artificielle s’est longtemps contentée de nous poser des questions auxquelles nous étions sommés de répondre par oui ou par non. C’était enfin pour nous le moment de choisir, ce que nous différons si volontiers de faire, abouliques jusqu’à la neurasthénie. Mais il fallait être aussi naïf que moi pour croire que l’intelligence artificielle s’arrêterait là et s’en tiendrait à nous poser des questions ou à répondre aux nôtres. La poésie ou la musique assistées par ordinateur semblaient relever du hasard, elles n’étaient pas dangereuses. Aujourd’hui, l’intelligence artificielle montre, si j’ose dire, son vrai visage: elle ne se contente plus de nous poser des questions, elle singe notre création. La machine singe l’homme come le diable est le singe de dieu. À moins de croire à l’homme-machine, ce que je crois être une option: j’ai déjà dit que j’étais matérialiste.

Passons au choix. Un homme dont je m’honore d’être ou de me croire l’ami, l’abbé Guillaume de Tanouarn dont j’ai souvent parlé ici, m’a appris le peu de choses que je sais sur le choix. (Un des grands malheurs de ma vie a été de ne pas savoir poser un seul choix positif ni prendre un tournant qui ne serait pas négociable. or on construit sa vie sur l’ensemble de ses choix positifs, faute de quoi on est condamné à traîner une valise de regrets qui deviennent une montagne devant notre conscience accablée. Toute décision est bonne à prendre et déclarerait-on forfait face au combat spirituel, on n’échappera jamais au combat contre soi-même. L'existentialisme comme la spiritualité ignatienne sont des écoles de choix).

Dans son livre « Délivrés », l’abbé de Tanouarn dit qu’il existe trois types de choix: le choix du non choix, majoritaire ; le choix du moi, égoïste, rare, mais pas médiocre et le choix de Dieu, héroïque.

Si je sais bien mes étymologies, l’hérésie vient du mot choix. Pascal la définit non pas comme « l’oubli de la vérité, mais comme l’oubli de la vérité contraire. » Car, dès que l’on s’adresse à l’esprit et à moins de faire de la vérité une idole, on doit tendre à la coïncidence des opposés ou encore à l' »union des contraires » dont parle Simone Weil, à défaut de l’union des contradictoires qui est impossible, en vertu (peut-être, mais pas exclusivement) du principe de non contradiction logique.

Est-ce que Bruno Latour était encore un humaniste? Et est-ce que notre époque est encore humaniste? Michel foucault ne s’est-il pas réjoui de la mort de l’homme? Nous y sommes. Le paradigme écologique s’est substitué au paradigme humaniste. C’est pourquoi j’ai une dent contre l’écologie politique qui n’a jamais dénoncé que très marginalement ces deux maux infligés à la terre que sont l’esclavage des animaux auquel les végans nous ont rendu sensibles et compatissants, et l’agriculture industrielle qui détruit plus certainement les labours que, s’il y a réchauffement climatique, il est d’origine anthropique ou que l’homme ne détruit la couche d’ozone.

On ne parle plus de la faim dans le monde, on parle du déréglement climatique. Il ne faut plus sauver nos âmes, il faut sauver la planète. Nous ne portons plus notre espérance au ciel ni ne voulons plus mettre du ciel dans notre vie, mais le salut de la planète nous inquiète. La subversion écologique est autant une subversion à l’égard de l’homme qu’elle l’est à l’égard de Dieu.

Souvent, je me suis demandé comment définir la mystique en me demandant accessoirement si j’étais un mystique. Quelqu’un qui m’a quasiment servi de secrétaire m’a répondu un non sans appel. La définition la plus convaincante que j’ai trouvée de la mystique est que le mystique est celui qui ne parle plus en son nom, mais qui fait parler Dieu comme s’Il s’adressait à lui-même, soit que ce soit un procédé littéraire, soit que Dieu lui parle vraiment. Je saurais faire parler Dieu en écrivant, je l’ai déjà fait. Mais Dieu ne m’a pas parlé de telle sorte que ma lettre ait la voix de Dieu. C’est pourquoi je ne suis pas un mystique et j’en reste à ne pas savoir ce qu’est la mystique, préférant me ranger parmi les humanistes, peut-être parce que je manque de profondeur ou de réalité, comme Gisors, père de Kyo, en accusait le baron de Clapique dans « la Condition humaine ». J’ai toujours pris pour moi cet anathème de Gisors. « Il boit, car il n’a pas de réalité. » 


J'ajouterai que le mystique est celui qui a répondu "oui" à la question: "y a-t-il quelqu'un au centre de cette conscience que je tutoie?"  Mais il a reçu cette réponse affirmative de celui-là même qui le tutoie au sein de sa conscience. Celui qui lui a apporté la preuve de l'existence d'un autre en lui qui le surplombe est son surmoi ou son surnaturel.

Antisémitisme, pourquoi je ne défilerai pas!

Si j'en crois les chaînes infos que j'écoute d'une oreille distraite depuis quelques heures, la marche contre l'antisémitisme qui aura lieu ce dimanche sera le dernier endroit où il faut être. Y serai-je? Non. Et pourquoi? 
Parce que la question n'est pas de savoir si je défilerai avec le RN ou je ne sais quel autre parti plus ou moins respectable. Et pourquoi n'est-ce pas la question? Parce quIsraël n'invective plus l'extrême droite depuis que la coalition à sa tête comprend  des PARTIS d'extrême droite. Il faut déplacer la question qui est désormais: saisirai-je l'occasion de la séquence formée par la barbarie du Hamassuivie par le blocage punitif de Gaza pour dire aux juifs que je les aime comme j'aime l'État qui se veut leur emblème? Je n'aime pas les agissements de cet État, donc je me contenterai de ne pas être antisémite à la maison. Je me contenterai d'être un non antisémite de salon. 
Mais il faut que je poursuive mon introspection. Le dernier endroit où il fallait être était la manifestation pro Charlie. Je n'y suis pas allé. Ma mère chez qui je déjeunais était à fond en soutien de cette manifestation. Elle a allumé la télé et je dois dire que ça avait de l'allure. C'en était même émouvant. Il flottait un parfum de fraternité dans cet unanimisme, tellement contagieux que Renaud a embrassé un flic et en a fait une chanson. 
Regretté-je de ne pas m'être rendu à la manif en soutien de Charlie et de ne pas avoir participé à ce moment de fraternité française? Non, car derrière l'unanimisme, je crains le tous contre un. Et je n'aime pas du tout le slogan d'une banderole où j'aurais dû m'approprier: "Je suis Charlie". Non, je suis moi. (En l'occurrence, "je suis juif" serait un slogan plus vrai puisque je suis chrétien). 
Je n'aimais pas que l'on dise que les morts de Charlie n'étaient pas responsables. Au contraire, ils sont morts en responsabilité et en martyrs de leurs idées. Mais l'Occident a  perdu le sens du martyr. Différence entre le martyre chrétien et le martyre islamique: le chrétien donne sa vie, l'islamique prend la vie des autres en même temps qu'il donne sa vie dans une mort contagieuse. 
J'ai trouvé enfin qu'il y avait un indice compromettant à participer à cette grande liesse de la fraternité française: c'est que le bon peuple de France était soutenu par le gratin des dirigeants internationaux au milieu duquel s'était invité Bibi Netanyahou. Je n'aurais pas voulu manifester avec Bibi. Je comprends encore mieux pourquoi.

vendredi 10 novembre 2023

Le Likoudistan israélien. Réponse à deux commentateurs insignifiantsdu blog de Philippe Bilger

@Serge HIREL | 08 novembre 2023 à 14:33

« Likoudisés », « Palestiniser », « Onze-septembriste », « Bataclanistes », « Treize-novembristes », « zemmourisation »...

« Nous vivons des temps alarmants », concluez-vous... Oui, pour la langue française !"

Il est vrai que votre prose ne brille pas par la fabrique du  néologisme. Pour tout dire, elle est un peu ennuyeuse, prévisible, attendue et je passe souvent outre.


Vous partagez l'essentiel du commentaire de Marcel P me concernant.? M'étonne pas. L'ancien policier et l'ancien policier de la pensée sans succès me défouraillent de concert, j'en conçois presque de l'honneur. Je vous lis un peu plus que je ne le lis lui, car vous écrivez mieux. Vous avez du métier quand même, mais vous resassez beaucoup.


_____________________________________"


@Marcel P | 08 novembre 2023 à 11:39

J'écrivais (et je le maintiens):

"Il [Éric Zemmour] voudrait palestiniser notre pays en montant les chrétiens contre les musulmans qui sont une minorité trop forte et trop importante pour qu'un dissensus majeur avec cette communauté soit sans conséquence. L'impossibilité d'une opposition de néo-croisés occidentaux et de musulmans fanatisés est claire à mes yeux depuis la première guerre du golfe. Rester sur une position équilibrée est donc autant un gage de sagesse que de prudence. "

Je le maintiens, car prudence est mère de sûreté.


Vous me répondiez:

"Belle prudence. Vous ne voyez ainsi pas que le dissensus existe depuis bien longtemps ?"

Le dissensus, non, la division communautaire, oui.  

"Depuis quand le voile islamique pose-t-il problème en France ?"

Depuis qu'on en a fait un problème, 1989, Ernest Chénière.

" Jusqu'à quel degré êtes-vous prêt à l'accepter pour que n'existe pas de dissensus ?"

Je ne suis pas comptable du fait que la France ait accepté que ses ex-colonisés viennent travailler dans ses usines. Mais à partir du moment où cela était fait avant ma naissance et où j'ai toujours connu cette coexistence avec les populations immigrées, je suis prêt à accepter les compromis dans la mesure où ce changement de peuplement a eu nécessairement une influence sur l'idéologie française et donc sur sa diplomatie, car la guerre civile est la plus terrible des guerres.


La population arabo-musulmane était déjà trop importante en 1991 pour que nous nous permettions de participer à  l'opération "Tempête du désert", opération qui plus est illégitime, à laquelle nous n'aurions point perdu notre âme de n'y point prendre part, mais c'était sans compter avec l'américanisme reaganien de François Mitterand, dont François Asselineau nous explique aujourd'hui qu'il déplorait la guerre que nous livraient secrètement les Américains en commandant leurs alliés et en les inféodant pieds et poings liés à leur politique, puisqu'ils sont dans l'Otan.


"On peut lister à l'infini les français juifs qui se sont battus et qui se battent pour la France, sans équivoque, sans exception.

On peut aussi cataloguer les musulmans dans l'armée française qui annoncent explicitement qu'ils refuseraient de se battre contre un adversaire musulman."

Et on peut aussi  honorer l'héroïsme des soldats que le film "Indigènes" a fait revenir dans la mémoire française.  Des allogènes "français par le sang versé".


"Apaiser les tensions avec l'envahisseur, ça s'appelle collaborer."

L'envahisseur n'a pas manifesté l'intention de hisser son drapeau comme emblème de notre nation. L'envahisseur n'a pas manifesté l'intention d'envahir. Au contraire du colonialisme britannique qui était une conquête sans influence, l'immigration européenne est une influence sans conquête et cette influence ne s'exerce que dans la mesure où nous l'avons permise et encouragée. Je ne suis pas comptable de cette réalité que j'ai toujours connue, je fais avec, car une patrie n'est pas une abstraction, ne vous en déplaise.



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Et que se passe-t-il à Gaza? Israël n'a pas bombardé un hôpital, oh non! Mais il tire sur des ambulances (sic) et son blocus fait en sorte qu'aucun hôpital n'est approvisionné, pas même en antalgiques ou en produits anesthésiants. Israël avait prévenu les Gazaouis d'avoir à s'en aller pour éviter le massacre, mais il avait bloqué l'arrivée du pétrole et de l'eau. Comment s'en aller sans carburant? 


Comme d'habitude, les Palestiniens sont livrés à eux-mêmes. Les médicaments sont à disposition, mais Israël n'ouvre passa frontière avec l'Égypte qui réduit les couloirs humanitaires à moins que de besoin pour éviter l'immigration arabe au sein d'un pays arabe sous prétexte du précédent palestinien au Liban ou en Jordanie. 


Alors je veux bien qu'on entende me faire manifester contre l'antisémitisme. Mais certainement pas sous le prétexte(je reprends le terme de "la France insoumise") de collaborer avec les Israéliens dans leur génocide palestinien en vengeance contre les exactions terroristes du Hamas à leur encontre.


Vous voyez, Marcel P.? Je n'ai pas peur des mots. Je reprends le mot "prétexte" aux insoumis et contre eux, je qualifie le Hamas de "terroriste". Je fais mien leur appel au "cesser-le-feu", mais je n'ai pas aimé leur discours pendant les émeutes urbaines consécutives à la mort de Naël après une course poursuite qui a mal tourné, avec  des collègues à vous plus courageux et plus intelligents que vous. C'est comme ça, les gens ne peuvent pas être classés dans vos petites cases et je ne vous ferai pas l'avanie de vous dire qu'il vous en manque une. Prétérition.


Mais je vais témoigner de deux choses à votre intention, car j'imagine que vous n'avez jamais mis les pieds en Israël-Palestine, ce qui ne vous empêche pas de pérorer. Je m'y suis rendu en 2011 avec mon frère et ma belle-soeur. Chacun de nous faisait un voyage différent: mon frère faisait un voyage religieux; je faisais un voyage politique pour vérifier si ce qu'on  m'alléguait de  la situation des Palestiniens était exact; et ma belle-soeur, artiste contemporaine, s'interrogeait sur la notion d'appartenance.

Mon frère est beaucoup plus bien-pensant que moi. Il n'aime pas les idées qu'il me suppose avoir. Il m'a pourtant dit l'autre jour qu'on n'aurait jamais dû créer l'État, car il n'était pas porteur d'une paix viable. Je ne dirais pas qu'il ne fallait pas accéder à la demande des sionistes qu'une entité voie le jour(pour reprendre cette fois la rhétorique des pseudo-antisionistes qui sont de vrais antisémites qui s'ignorent). Mais on aurait dû faire de la Palestine mandataire un Etat binational sans partition, avec une surveillance internationale de la manière dont les deux juridictions et les deux administrations étaient capables de travailler ensemble ou, si vous préférez, de collaborer... Faute de quoi on était parti pour autant d'années de guerre que durerait l'État juif d'Israël, la "solution à deux États" ne réglant pas du tout le problème.


Je terminerai par ce double témoignage. Les trois pieds nickelés que nous étions si vous tenez à nous injurier (j'ai quand même failli me noyer dans la mer morte et ma belle-soeur m'a sauvé...) avons poussé jusqu'à Béthanie en Palestine. Je voulais pouser jusqu'à Damas, mais mon frère redoutait les assurances israéliennes qui nous interdisaient de passer les chck points. Quand nous arrivons dans la ville en début d'après-midi, nous voyons un cortège d'enfants endimanchés qui se rendent à l'école, comme si leurs parents considéraient que l'école était leur avenir et leur seul trésor pour de meilleurs lendemains. Nous avons vu aussi des écoliers israéliens, mais il y avait une grande différence de traitement entre les petits Ashkénases que leurs éducateurs gardaient comme la prunelle de leurs yeux, un pistolet à la ceinture, et les petits Falashas que leurs éducateurs gardaient aussi arme au point, mais beaucoup moins soigneusement conservée, comme si ces Falashas n'étaient jamais que de la pègre israélienne. Donc je ne dirai pas: Israël, État raciste, mais Israël, société d'apartheid? Je n'entrerai pas dans le débat de savoir si c'est une société esclavagiste. Je me souviens que l'identité juive naît de ce que Dieu libère les Hébreux de l'esclavage de Pharaon. Sous la conduite de Moïse, ils quittent l'Égypte pour "coloniser" le pays des Cananéens, terre promise bien qu'elle ne leur appartienne pas et qu'il  y ait des habitants à fort potentiel sur ce territoire, nous apprend le livre des Nombres après l'exploration qu'en ont fait douze éclaireurs dont deux défaitistes redoutant la conquête furent châtiés et punis de mort.


À Béthanie, nous nous sommes arrêtés dans un restaurant tenu par un Palestinien chrétien. Le hasard faisait bien les choses, nous aussi, ma belle-soeur exceptée, étions des  chrétiens. Le patron du restaurant à l'enseigne de "1941" et qui se vantait d'être le plus vieux restaurant de Palestine nous a raconté qu'une frontière soudainement apparue, un peu comme le mur de Berlin en 1961, l'avait séparé de son frère et qu'il avait été emprisonné, comme 45 % des Palestiniens, avec ou sans raison. 


Alors il faudrait que je manifeste pour soutenir un État pareil sous prétexte de prouver que je ne suis pas antisémite et que je ne confonds pas tous les juifs avec le Likoudistan isrélien? Non merci. 

mercredi 8 novembre 2023

La likoudisation de l'électorat juif de France

Pour qui, sans prétendre avoir l'expertise de Jérôme Fourquet ni croiser comme lui autant de données statistiques ou sondagières, se contente d'être un observateur, il n'est pas difficile, comme je l'ai déjà écrit, de relever que l'"archipel français", si on intègre les divisions communautaires à notre sociologie politique traditionnelle, se divise aujourd'hui entre bloc centriste ou bourgeois, islamo-gauchisme et israélo-droitisme.

Gérard Miller a moralement raison de rappeler les juifs français à leur "boussole morale", mais ils ne ressemblent pas aux juifs américains qui continuent de peser idéologiquement sur le parti démocrate, tandis que les juifs français se sont likoudisés, en quoi ils ont fait comme les juifs israéliens. Le parti travailliste, berceau de la "démocratie israélienne", s'est réduit comme peau de chagrin et n'est plus qu'un lointain souvenir. Le destin de ce parti ressemble à celui de nos partis de gouvernement, droite et gauche mis dans le même sac. La droite LR et le parti socialiste réduit à ses seules forces ne sont plus que les ombres d'eux-mêmes. Les juifs français n'ont pas viré vers la droite française traditionnelle, ils ont au bas mot viré vers le Likoud et parfois un peu plus à droite, ils ont viré vers la droite israélienne.

Tout à sa stratégie de dédiabolisation, Marine Le Pen ne se ferait plus pincer à danser au bal de Jörg Haider, mais mendierait un carton d'invitation à Bibi Netanyahou. Parallèlement, maintenant que l'extrême droite est arrivée dans le gouvernement israélien pour protéger Netanyahou des poursuites judiciaires qui le menaçaient, la communauté juive à travers le monde n'exerce plus aucune vigilance contre l'extrême droite telle qu'Edwy Plenel rêverait qu'elle se perpétue.

Parmi les "juifs médiatiques" qui ont joué un rôle dans la politique française, l'évolution de Julien Dray est symptomatique et à mon sens affligeante. En 2002, les bras lui en tombaient parce que le restaurateur Joe Goldenberg avait osé dire à propos de la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle, qu'en tant que Français, il comprenait ce vote. Julien Dray fustigeait "TF1" comme étant "TF haine" pour avoir fait la courte échelle à JMLP. Aujourd'hui, il est un débatteur régulier de "CNews" à côté de qui "TF1" en 2002 était un tout petit joueur en matière de souffler sur les braises, ce que la chaîne de Vincent Bolloré fait toute la journée. Ses dissensions avec Gilles-William Goldnadel sont de pure forme. Il faut que l'antiracisme n'ait pas valu bien cher à ses yeux pour qu'il se soit renié à ce point et l'ait jeté aux orties.

Rien d'étonnant à ce qu'Éric Zemmour ait rencontré un franc succès en se rendant en Israël. Il voudrait palestiniser notre pays en montant les chrétiens contre les musulmans qui sont une minorité trop forte et trop importante pour qu'un dissensus majeur avec cette communauté soit sans conséquence. L'impossibilité d'une opposition de néo-croisés occidentaux et de musulmans fanatisés est claire à mes yeux depuis la première guerre du golfe. Rester sur une position équilibrée est donc autant un gage de sagesse que de prudence.

Mais le devoir d'un Français qui n'a que cette nationalité est de discerner ses vrais amis parmi tous les binationaux, et on peut dire que la ligne de démarcation entre nos vrais amis et nos ennemis déguisés ou de l'intérieur, entre ceux qui utilisent le nom de France et le titre de Français pour parler d'autre chose et ceux qui aiment vraiment la France, entre les loyalistes et ceux qui n'ont pas la France chevillée au coeur comme leur nation prépondérante et de premier choix, est égale dans les communautés juives et musulmanes. La propagande est des deux côtés. Les musulmans ne la distillent pas sur les médias officiels qui les insultent à bas bruit toute la journée. Ils communiquent à coups d'alertes Internet et de vidéos qui véhiculent une lecture paranoïaque (on dit aujourd'hui complotiste) d'à peu près tout ce qui se passe.

Mais la double défense qu'ont prétendu incarner Alain Finkielkraut sur le plan culturel et Éric Zemmour sur le plan politique, double défense de la France et d'Israël comme si leurs intérêts étaient communs ou, osons le jeu de mots, comme s'ils étaient croisés, est une autre imposture qui ne vaut pas mieux.

C'est pourquoi la candidature d'Éric Zemmour était vouée à l'échec, non parce qu'elle divisait ce que cette mouvance appelle le "camp national" comme le fit en son temps Bruno Mégret qui pourtant se rallia au panache belliqueux et souriant de Zemmour, mais parce que, n'étant pas faite au nom de la nation, elle ne représentait ni la droite ni la France. S'il en fallait une confirmation, nous avons ce voyage de Zemmour en Israël, à peine la guerre éclatait-elle sous la forme catastrophique et sans lendemain de cette riposte onze-septembriste aux attaques barbares et treize-novembristes ou bataclanistes du Hamas.

La zemmourisation de la droite française la ciottise en sa sottise: celle de vouloir palestiniser la France et exacerber une tension communautaire en affirmant que la police française doit s'inspirer des méthodes de la police israélienne, ce qui était un des arguments de campagne d'Éric Ciotti. Argument misérable et surtout régressif. Nous vivons des temps alarmants. 



Billet écrit sous le prétexte de cet autre billet:


Justice au Singulier: "L'électorat juif vote à droite" : un honneur et une responsabilité... (philippebilger.com)