Ce que j’ai aimé en Vendée ?
La même chose que ce que j’y ai presque détesté au Puy-du-fou : la
capacité qu’ont les gens de là-bas de coopérer les uns avec les autres, ce qui
va des quatre mille bénévoles de la cinéscénie à, beaucoup plus simplement, le
fait que trois cents personnes sur sept mille habitants assistent à la première
de la compagnie de théâtre de la ville qui a aussi fondé une école de théâtre
et va donner la pièce durant tout l’été.
Ce que je n’ai pas aimé au
Puy-du-fou, c’est ce que ce parc à thème révèle de l’imaginaire de Philippe de Villiers,
qui se borne à considérer qu’un peuple
se constitue par la guerre et pour la guerre.
À ce compte, à quoi bon être contre l’Union européenne ?
Dans le grand cirque, qui est une
attraction du parc, où des gladiateurs se battent au milieu des tigres et des lions,
où les gaulois sont chrétiens avant d’avoir été christianisés et où le gouverneur romain n’a aucun sens de l’honneur
et ne tient pas parole, celui-ci commence par haranguer la foule : « Citoyens ! »
Comme la foule leconspue, , le mot qui suit est : « Taisez-vous. »
Dans l’imaginaire de Villiers, la fable politique est cette grosse ficelle que l’Union
européenne est l’Empire, que l’Empire dit aux nations : « Taisez-vous »,
et que le peuple a toujours raison. Pour Philippe de Villiers, l’Union
Européenne est l’autre nom de l’Emppire ou d’Edouard Balladur : « Je
vous demande de vous arrêter. »
Pour Jeanne Smits ou Victoire de
Jeaghère, la gauche est un synonyme de la « culture de mort ». Je n’ai
jamais aimé cette expression de Jean-Paul II . Pourtant j’ai appris par
Jeanne Smits que l’avortement de masse avait été une des premières mesures adoptées
par Lénine et que la Russie de Poutine qui pourchasse l’homosexualité se
prévaut de ce triste record que 22,5 % des couches se terminent par un
avortement.
Qui sont les vendéens ?
Sont-ils des chouans ? Ce sont des gens qui sont partis en guerre pour s’insurger
contre la levée en masse (de la conscription) et qui du coup ont pris le parti
des prêtres réfractaires qu’ils appelaient leurs « bons prêtres » et
qui se sont opposés à la constitution civile du clergé, dont je rappelle qu’en
soi et si l’Eglise l’avait soutenue, elle aurait renoué avec le principe d’élection
des évêques en vogue aux premiers temps de l’ère chrétienne et qui ne donnait
pas à l’Eglise romaine cet excès de structure pyramidale qui fait souvent crouler
sa hiérarchie sous la rébellion des éléments les plus traditionalistes.
Qui sont les vendéens, je le
découvre à travers le film de Patrick Buisson, Les manants du roi, dont le point de vue est étrange,
précisément parce que, tourné par un idéologue revendiqué, il semble se
caractériser par une absence de point de vue et, loin d’être favorable aux
Vendéens, il montre que ce sont eux qui ont ouvert les hostilités, que les
Bleus n’ont été atroces que galvanisés par thureau qui a ordonné un génocide
et, aux Lucs-sur-Boulogne, un Oradour-sur-Glane ; que la Convention, après la mort de
Robespierre et de Thureau, a essayé de calmer le jeu ; que les chefs
vendéens se sont voulus irréductibles ; que Charrette a bouffé à tous les
râteliers et, après avoir pensenvisagé de négocier un compromis avec la
République, a reçu promesse de Louis XVIII qu’il le soutiendrait et le
ravitaillerait par l’Angleterre. Le comte d’Artois, futur Charles X, devait le joindre, mais l’abandonna en rase
campagne, ce qui lui valut ce cri rageur d’une des dernières missives de Charrette :
« Vous signez mon arrêt de mort. »
C’est toute la tragédie du
populisme conservateur dont je ne sais pourquoi Patrick Buisson s’obstine à l’incarner,
lui que son apparente absence de point de vue quand il analyse ou quand il
filme conduit à signer des fresques sociologiques inégalables d’exhaustivité et
de profondeur de champ : quand un peuple supplée à ses élites nobles ou
bourgeoises pour défendre leurs valeurs loin desquelles elles ont émigré, soit ces
élites ne reviennent pas et abandonnent le peuple dans la défense de leur pré
carré, soit, si elles reviennent, elles l’exproprient de ces valeurs, comme si
ce n’était pas lui, le peuple, qui les avait défendues. Le peuple conservateur
défend des chefs qu’il tient pour légitimes et cela se retourne contre lui
parce que ces chefs le lâchent. Mais les Vendéens n’ont pas seulement voulu
être fidèles à leur roi et se donner des chefs ; leur paysannerie de
terroir n’entendait pas se laisser enrôler dans unne armée qui fît corps avec
la nation, ce qui les a faits se retourner vers l’Église.
A l’université d’été de Renaissance
catholique, j’ai été le voisin de chambre, une fois de table et plus souvent de
chaise du dr. Xavier Dor. Autrefois j’aurais rougi de ce voisinage. Aujourd’hui,
je trouve que le dr. Dor est un héros de notre temps.
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