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dimanche 1 juin 2014

Lettre ouverte à Jean-Luc Mélanchon pour l'exhorter à faire le Front des populismes

écrite à la suite de son article: http://www.jean-luc-melenchon.fr/2014/05/30/pendant-que-la-poussiere-retombe/comment-page-5/#comment-222346 et ainsi libellée: Cher Jean-Luc Mélanchon, Je vous parle d'un espace politique où peu de vos commentateurs s'adressent à vous. Quel est-il ? Je ne suis ni de droite, ni de gauche, je suis populiste. La première fois que jem'en suis rendu compte, c'est en votant au premier tour de la présidentielle de 2002 pour Jean-Marie le Pen. Depuis, je n'ai jamais plus récidivé dans ce vote. Aux dernières élections européennes, j'ai voté pour vous. Pourquoi ai-je voté pour le Pen ? Parce qu'en 2002, il était le seul à proposer une "République référendaire". Pourquoi n'ai-je pas récidivé au second tour et plus jamais ensuite ? A cause de ma caissière à qui je payais mes coursesau Monoprix de l'avenue Jean Jaurrès à Paris, dont j'ai senti la tristesse quand elle évoqua ce résultat et qui, si je lui avais dit que j'avais voté pour le Pen, aurait cru que j'avais voté contre elle. Or j'aspirais seulement à un peu plus de démocratie. Sur quoi, au lendemain du refuge de la France dans un second mandat Chiraquien auquelj'ai également refusé de prêter ma voix, en vous voyant tous les deux, Marine le Pen et vous, sur un plateau télé, je me suis dis que la vie politique française tournerait désormais autour de vos deux personnalités rabiques. Je me souviens de votre première passe d'armes : vous ne digériez pas cet acte souverain du peuple français d'avoir porté son père au second tour d'une élection présidentielle, et elle vous répondait d'une voix haineuse que vous suintiez la haine. Sa haine était pire que la vôtre et votre intolérance était pire que la sienne, mais j'ai senti confusément que vous alliez exprimer à vous deux le mal du peuple, elle avec une xénophobie que je ne partage pas, vous avec un antidémocratisme en sommeil qui m'indispose encore davantage, s'il est possible ! Et pourtant, c'est vous deux ensemble qui auriez raison, mais c'est vers vous que s'est porté mon vote, parce que votre protestation était sans haine, toute enragée qu'elle fût (encore que vous ayez mis de l'eau dans votre vin en parlant moins "cru et dru" au cours de cette dernière campagne). Le vote pour Marine le Pen au Parlement européen était parfaitement inutile et purement destructeur : elle ne fera rien pour "détruire de l'intérieur" cette Europe dont le principe est à sauver, si le gouvernement bureaucratique et néo-libéral l'apervertie : vous aviez un Président de la commission européenne à proposer, contre le démocrate chrétien, le social démocrate ou le libéral assumé. Au pire, vous auriez pu contribuer à faire élire Martin schultz, qui valait mieux que Jean-Claude Juncker. Dans cette élection européenne, pour peu que l'on accepte de répondre à la question posée, le vote pour Marine le Pen était parfaitement inutile et nihiliste. Seulement, si je vous entends bien l'un et l'autre, elle veut le pouvoir et vous ne croyez qu'en la "fonction tribunicienne" et en "l'éducation populaire", un peu comme le père de Marine le Pen se contentait d'être "tribun de la plèbe", disait-il. Dans quelle mesure croyez-vous en votre programme si votre parole est avant tout "éducative" et "pédagogique", donc infantilisante, et que vous n'aspirez pas à exercer le pouvoir ? Et pourqoi, à présent que Marine le Pen a rallié votre diagnostique et vos solutions sociales, ne neutralisez-vous pas sa xénophobie en constituant avec elle le front des populismes ? Pour le dire autrement, de quoi avez-vous peur ?Pourquoi continuez-vous à fonctionner sur un logiciel dépassé, où il y aurait la gauche d'un côté et la droite de l'autre, comme si la sociale démocratie n'avait pas aggravé le néo-libéralisme et l'atlantisme belliqueux ? Auriez-vous peur des bruns comme ils ont peur des rouges et comme la société tout entière a peur de l'alliance des rouge et des brun au nom d'une résurgence improbable du pacte germano-soviétique, alors même que les Etats-Unis d'Europe n'ont tellement pas réussi à remplacer l'Europe hitlérienne qu'à travers cet intermédiaire qu'est l'Europe démocrate chrétienne, nous vivons dans une europe allemande, non pas certes sur son axe idéologique, mais sur son axe géographique de la mittel europa (versus la politique de la mer), en participant du même cynisme industriel (bien illustré par Sartre dans Les séquestrés d'Altona) ? Si vous faisiez le Front des populismes, maintenant que Marine le Pen a quasiment épousé vos thèses socialistes, elle neutraliserait votre autoritarisme et vous neutraliseriez sa xénophobie. Ne vous trompez pas de combat nid'époque : l'alternative est entre les populistes (ou les démophiles, c'est-à-dire les démocrates) et ceux qui traitent le peuple en machine à produire ou en moyen de production. Ne soyez pas en retard d'une guerre, l'antifascisme n'est plus demise. Si Madame le Pen et vous refusez de comprendre que vous devez vous allier, votre opposition de gauche restera supplétive, votre ennemie épidermique risquera de ramasser la mise au point de n'incarner qu'une alternative xénophobe, et votre programme à vous ne sera qu'un contrepoint Front contre front, se consolant bien facilementde ne pas trouver de majorité pourêtre appliqué.

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