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mardi 16 janvier 2024

Emmanuel Macron, séduisant sur la forme et sur le fond fidèle à lui-même

Si je réagis à chaud à la conférence de presse d'Emmanuel Macron, je commencerai pour une fois par quelques appréciations positives, mais relativement formelles:

-Il a redonné les trois axes de son gouvernement que je ne l'avais entendus définir pour la première fois que dans son interview dans Càvous: libérer, protéger, unir.

-Il a donné son idée de la France: "pays du bon sens, de la résistance et des lumières". Un bon sens qu'on voit mal a priori s'intégrer à ce triptique, mais il est le premier mot du cartésianisme, puisque l'incipit du Discours de la méthode fait passer "le bon sens" pour la qualité "la mieux partagée par tous".

-Il dit "gouverner au réel avec un certain sens de l'idéal." On le verra dans mon avant-dernier paragraphe, c'est aussi sa limite.

-Comme lors du Grand débat, il est doté d'une mémoire prodigieuse et d'une connaissance de ses dossiers hors du commun, mémoire qui confine à l'empilement, mais il a l'empilement plus visionnaire que d'habitude. Il rappelle plus souvent son "cap" qu'il ne prétend briller par de nouvelles annonces.

-Si j'ose dire, il clarifie le "en même temps", non come "une ambiguïté", mais comme "une double ambition" et une "double radicalité".

-Il fait l'impasse sur le Parlement en se félicitant implicitement que Gabriel Attal ne soit pas grand amateur de lois, ce qui lui évitera peut-être le camoufflet des 49-3. Mais il entend se montrer un peu plus respectueux de l'exécutif, de son gouvernement et du rôle assigné à chacun par la constitution. Pourtant il "ouvre le capot" du comptage de l'absentéisme des professeurs dans l'Éducation nationale.

Si maintenant, j'ouvre le capot de son discours:

-je vois une "France" intentionnellement "plus forte", réindustrialisée, innovante, mais bridée par la "souveraineté européenne".

-J'entends parler d'une "France" potentiellement "plus juste" qui, une fois énoncé le principe d'égalité des chances, donne sa chance au "plus jeune premier ministre nommé par le plus jeune président de la république" parce que c'est un héritier comme lui.

-Il prône un accroissement de la natalité en inscrivant l'IVG (qui est le droit de ne pas faire naître) dans la constitution française et en affirmant "en même temps" que "toutes les vies se valent" (à propos de la guerre de Gaza).

-Il y a des catégories sociales qu'il ne veut pas embêter, les médecins qu'il ne faut pas obliger à s'installer dans les déserts médicaux comme les professeurs sont mutés au gré des besoins des académies, mais il y en a d'autres qu'on doit "responsabiliser" sans état d'âme: les "parents" qui ne contrôlent pas l'usage des écrans de leurs enfants au risque d'en faire "une génération de complotistes" et non pas de "républicains" comme attendu, les petits propriétaires qu'on aidera à rénover leur logement sans jamais leur imposer la réquisition des logements vides au risque de saturer la planète avec notre parc immobilier, les chômeurs qu'il n'ose pas appeler "de faux chômeurs" et qu'il prétend "accompagner" alors que le service public est en compression de personnel depuis plus de vingt ans et auquel il promet un managéria très dur sous prétexte de rémunérer "le mérite" "en même temps" que "l'ancienneté".

-Il fustige les tendances populistes en dressant un réquisitoire convaincu contre le Front national et contre les populismes européens qu'il lui identifie, mais il ne croit pas en la démocratie directe: il croit que transformer le quotidien des gens suffit à étancher leur "soif d'idéal", et qu'une "[frise] symbolique" suffit à transformer une "société" en "nation".

-Oh certes, il aurait volontiers convoqué à un référendum sur un sujet "sociétal", mais il nous refait le même coup que François Hollande sur le "vote des étrangers": il n'a pas trouvé de "consensus" au Parlement pour le faire. S'il y croyait vraiment et avait tiré les leçons de la crise des Gilets jaunes et de leur revendication du RIC (référendum d'initiative citoyenne), il aurait pu nous refaire le même coup que François Mitterrand en convoquant un "référendum sur le référendum", surtout maintenant que la guerre est ravivée entre LFI et "la ministre de l'enseignement privé".

Enfin, il reste tout aussi dangereux "à l'international", étant passé du "il ne faut pas humilier la Russie" à "on ne peut pas laisser gagner la Russie". 

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