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samedi 21 mars 2020

Analyse paranoïaque d'une psychose virale

Tout est devenu addiction et danger aujourd’hui. Le coronavirus est un danger qui s’inscrit dans le puritanisme et le désir de frugalité et de sobriété heureuse, qui réclame confinement contre l’hédonisme dont la liberté nous asphyxie au cas où il serait porteur de maladies vénériennes et contagieuses si l’on ne sort pas couvert, qu’a-t-on fait de notre sidaction ? Vaccinés, nous ne sommes plus immunisés contre les microbes. Aujourd’hui est pour nous le moment de souffrir d’un SIDA mental, ce syndrome déficient immunitaire actif. Passifs et neurasthéniques, nous sommes brisés dans notre volonté. Si on nous avait dit qu’un jour, nous nous laverions les mains et refuserions de nous serrer la main. Nous sommes antiracistes sans dédit, mais l’autre est, comprenez-vous, un agent contaminateur. Nous préférons avoir une immunité quand passera l’ange exterminateur qui emportera-déportera ces infesteurs et propagateurs de maladies pestilentielles.

Nous nous bouchons le nez sous notre masque. Jamais nous n’aurions cru redevenir des mademoiselle Lelongbec. Nous nous protégeons come des vieilles filles contre les assauts de l’autre, cet importun, dont nous continuons de répéter comme un mantra qu’il nous enrichit de ses différences.

L’Église est une des premières à valider qu’il est dangereux de nous tendre la main pour nous communiquer la paix du christ dans une société qui a depuis longtemps renoncer à l’accompagnement.

Nous ne cessions d’alerter contre la peur et voici que nous sommes pris de panique au premier danger. C’est que nous n’avons pas conu le danger. Si l’on essaie de retracer le phénomène au fil des générations, celle de 1920 a conu la guerre et a dû s’y affronter ; celle des babyboomers ont bénéficié des efforts de la Reconstruction et ont connu des années fastes où ils étaient assis à vingt ans et où il leur suffisait de monter un projet pour qu’il se réalise. Ils ont fait tous les excès de la liberté brimée de leur enfance et s’en sont dégoûtés et comme exaspérés. Le retour du refoulé fut le principe de précaution né de la peur de la liberté. Ma génération arrive là-dessus, fait le procès de ses parents et se déréalise, commençant à monter des start-up avec beaucoup de « start » et peu de « up », comme le déplore Yvon Gattaz. La génération suivante a peur pour la planète. Elle n’a pas connu la guerre et a la nostalgie de ce régulateur de l’histoire.

Elle n’est pas la seule. Quand je me demandai de quoi le coronavirus était le nom, je me rappelai ces cafés pris avec MonsieurL., mon ami et lecteur, un grand bourgeois du temps jadis, dont la philanthropie qui n’était pas de façade ne savait pas qu’elle était supportée par un brin de cynisme. « Figaro » en mains, il me répétait souvent : « Ce qu’il nous faut, c’est une bonne guerre. » Il avait l’habitude du gouvernement des hommes. Sa famille en gardait la mémoire. Il puisait dans cette mémoire familiale cette science à peine formulée que la guerre est un régulateur des sociétés humaines. Les hommes ne sont pas faits pour le temps linéaire, ils retombent dans le temps cyclique. Les masses se soulèvent et bientôt elles retombent, les révolutions n’ont pas d’avenir.

Macron n’a pas oublié le rôle de la guerre, cet invariant de l’histoire. Il appartient lui aussi à cette classe d’héritiers nullement parvenus dont l’aptitude et l’habitude de gouverner ont cessé de se reposer sur des valeurs d’intérêt général et généreux pour se muer en pur cynisme, car ce sont des bourgeois décadents que lanaissance a cessé d’obliger. « Ce qu’il leur faut, c’est une bonne guerre », le scénario ne date pas dede Macron et du « Cercle des poètes disparus » de la Providence.

Le 11 septembre a poussé le leader du gouvernement mondial à déclarer depuis ses États-Unis qu’on déclarait la guerre au terrorisme, ennemi indéterminé aux contours indéfinis. Aujourd’hui, les malfaiteurs d’attentats n’ont plus besoin de se bouger. On avait toujours averti contre la guerre bactériologique. Voici qu’un virus survient à point nommé pour passer à ce stade.

La psychose est internationale et tous les dirigeants du monde qui sentent qu’ils pourraient profiter d’une diversion s’y engouffrent. La chine doit faire oublier les entorses à la démocratie populaire qu’elle inflige à la très capitaliste Hong Kong surveillée de près par les Anglais. Elle est engagée dans un bras de fer commercial avec les Américains qu’elle préfère faire oublier au reste du monde. Donald Trump ne rêve que de fermer les frontièrres et profite de l’occasion pour le faire. Macron est enlisé dans sa réforme des retraites et a failli sauter pendant la crise des Gilets jaunes. Il a lu « Ceux de 14 », décide que le Coronavirus sera la grippe espagnole et déclare une guerre sanitaire sans merci. « Nous sommes en guerre », répète-t-il, assuré comme François Hollande. « Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts », assène-t-il comme Paul Reynaud, qui n’était pas un père la victoire.

Je converse samedi dernier avec mon frère au téléphone. Lui et moi convenons qu’il y a un traitement inconsidéré du coronavirus. Nos gouvernants nous mettent en garde contre les psychoses et ils entrretiennent celle-ci, qui prend du champ à l’internationale, pourqoi donc ?

Il ne ferait pas bon être complotistes. L’intelligence est lart des recoupements comme la culture est celui des rapprochements. Le complotisme est un raisonnement qui soupçonne une action concertée de conjurés en vue de nuire. Systématique, le complotisme est paranoïaque ; mais reconnaissant le complot où il a lieu et s’il a lieu, la capacité d’analyse qu’il déploie est une preuve d’intelligence. Il est interdit d’être intelligent. Il ne saurait y avoir de concertation quand tout fait système, pour que soit indiscernable la chaîne des causalités.

Le coronavirus n’est pas le fruit d’un complot, mais la prophylaxie de sa propagation présente tous les signes de la psychose. Mon frère émet l’hypothèse que de s’être emparé de cette épidémie de grippe certes meurtrière, mais d’une mortalité pas autrement spectaculaire sauf en Italie, obéit à une volonté de susciter un chaos pour mettre l’économie à plat, afin qu’elle reparte sur de nouvelles bases. Un peu comme un jubilé où l’on remettrait les compteurs à zéro, mais où ce serait le gouvernement qui déciderait à la fois du moment où surviendrait ce jubilé sans appui calendaire rituel, et du chiffre auquel on remettrait le compteur pourchacun. Comme un jubilétempéré par l’arbitraire. Je lui réponds qu’il ne croit pas si bien dire, puisqu’il y a un philosophe qui prône la destruction créatrice, que celui-ci s’appelle Schumpeter et est cité avec admiration par Emmanuel Macron.

Les gouvernements de l’Union européenne ne sont d’accord que sur un point : arrêter leur économie. Macron trouve sous le sabot d’un cheval 300 milliards pour sauver les entreprises de la faillite où les fait courir l’inaction à laquelle il les condamne. Sa ministre de la santé Agnès Buzyn, qui a abandonné son poste en pleine crise du coronavirus avant de se poser rétrospectivement en lanceuse d’alerte,n’a pu trouver que quelques centaines de millions d’euros à débloquer pour abonder les urgences en grève et en détresse, et le « président des riches », qui n’a plus de mots assez aimables pour les soignants, a toujours soutenu qu’augmenter massivement le SMIC ferait courir des risques à notre économie. Aujourd’hui, il se rend à l’évidence que la santé n’a pas de prix et répète « quoi qu’il en coûte » pour tordre le cou à ceux qui répondent qu’ele a un coût. « Rien ne sera comme avant », promet-il, comme Sarkozy avant lui aimait répéter avec une belle continuité qu’il avait changé.

Une crise va survenir. Rédacteur de l’introduction du rapport Attali sur les voies et moyens de faciliter la croissance sous le quinquennat de son agité prédécesseur, Emmanuel Macron avait écrit que nous nous préparions à un cycle de croissance ininterrompue trois mois avant lacrise de 2008. Il a suffisamment étudié l’économie pour savoir que celle-ci est un cycle de croissance et de récession. Il sait que les crises sont un régulateur de l’économie comme la guerre est un régulateur de l’histoire et des sociétés.

La crise de 2008 a fait découvrir à qui l’ignorait que « le capitalisme était la privatisation des profits et la nationalisation des pertes ». Pendant la crise, on a sauvé les banques. Avant celle qui vient, on les somme de prêter aux entreprises pour éviter que l’économie ne tombe en ruines. Les banques sauvées, la finance cigale détient le trésor de la fourmi et ne se montre pas prêteuse. Les choses sont rentrées dans l’ordre inégalitaire, créant 9 millions de travailleurs pauvres dans l’appauvrissement des classes moyennes. À la sortie de la crise à venir, tout devrait rentrer dans l’ordre inégalitaire, car ce seront les gouvernements qui décideront pour chacun selon son milieu sur quel chiffre on mettra le compteur, et Macron ne peut pas avoir découvert l’eau chaude à la faveur d’un refroidissement.

Nous avons fait entrer les télécrans dans nos maisons et nous sommes si addicts au virtuel que du moment que nous assiste cette domotique interactive, nous sommes prêts à tous les confinements. Les gouvernements européens nous font faire une expérience orwellienne et nous font passer le test de Milgram. « Nous allons vous enfermer et si vous sortez de chez vous, nous vous jetterons en prison. Supporterez-vous le confinement ? » Cette mesure est inédite, mais le confinement étonne à peine. Nous nous habituons déjà, ne demandant plus une chambre à nous dans ces colocations qui servent d’appartements collectifs de la démocratie libérale, mais un coin dans la cave quand sonne l’alerte des lanceurs qui ont étéremplacés par des hommes à la main de « la guerre c’est la paix ». « Nous faisons cela pour protéger les plus fragiles, les personnes vulnérables et les personnes âgées, poursuit Goldstein. Il vous est interdit de les visiter et de déjeuner en famille sous peine d’amende. Leurs aidants viendront les voir au compte-gouttes. En cas d’urgence, si les services de réanimation sont engorgés, on triera les malades, on soignera les jeunes rentables et on laissera mourir les vieux inutiles, par mesure de sélection. Les aéroports, les supermarchés, les débits de tabac et les « commerce nécessaires » resteront ouverts, mais le culte n’est pas un commerce nécessaire, nous interdisons le culte. »

Bien qu’on ait toujours prié pour endiguer les fléaux et les malheurs publics, le culte se laisse interdire de bon coeur. Les anciens sont morts de la canicule en 2003 parce qu’on ne s’en préoccupait pas, c’est oublié et l’unionsacrée commande de dire qu’il est judicieux de les laisser pour compte. On ne saurait mourir que du coronavirus. C’est pourquoi l’on reporte les opérations, même urgentes, qui sont sans rapport avec l’épidémie. Pour éviter des morts du coronavirus, combien mourront des maladies qu’on n’éradiquera jamais et qui resteront après lui ?

Ces morts, on ne les enterrera pas. N’importe si la sépulture était un signe d’homminisation. On les jettera dans leur tombe en restreignant leur entourage au minimum syndical des croque-morts.

Dormez en paix, Madame la marquise, nos petits marquis veillent sur nous. Leïla Slimani tient dans « Le Monde » son « Journal du confinement » où elle se prend pour la belle au bois dormant – Marlène Shiappa se prenait bien pour Gallilée quand elle fut critiquée d’aller chez Cyril Hanouna -. Nos petits marquis nous réveilleront dans six semaines, car la patience des manants râleurs est séquentielle, il ne faudrait pas en abuser, toutes les bonnes expériences ont une fin. C’est aussi ce que se disaient « Ceux de 14 » quand, pendant la mobilisation générale, ils partaient « la fleur au bout du fusil en chantant ». Mais c’était un temps de patience et nous sommes devenus des patients impatients.

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