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jeudi 3 janvier 2019

Inaperçu de l'histoire des idées: l'absolutisme n'était pas dans la monarchie absolue.

L'éventuel et rare lecteur de ce blog le sait, j'aime chercher des inaperçus -moi, ce n'est pas les champignons-. L'actualité, l'histoire et la littérature sont pleines d'inaperçus. J'exhume l'inaperçu du jour chez Rousseau. On fait de l'auteur du "Contrat social" l'inspirateurde la Révolution française. Je veux bien, si on l'entend du point de vue de sa recherche intellectuelle et de quelques traits de sa théorie politique, ou encore de ce qu'on lui attribue la paternité de l'individualisme, partant du fait qu'il considérait l'homme comme "un tout parfait et solitaire", une monade errante sans famille, sans appui. Orphelin de mère, Rousseau avait un problème avec la paternité, ce qui le conduisit, avant qu'il eût abandonné ses enfants, à s'en vouloir de s'être attiré les bonnes grâces de son père, qui l'élevait en lui lisant des romans comme à une fille, tandis qu'à son frère était réservé d'être laborieux, sans que le père de Rousseau mît en lui ses espoirs moraux, lesquels il investissait en Jean-Jacques, à qui il demandait de ne rien faire en particulier, mais d'être et de développer son esprit délicat. C'est à Michel Onfray que je dois le désir de me plonger dans le "Discours et les fondements de l'inégalité parmi les hommes", texte fondateur auquel le contre-historien de la philosophie reproche d'avoir bâti des fictions en écartant les faits. La plus grande science est toujours mythologique et avoue elle-même se fonder sur des hypothèses. Là n'est pas mon propos du jour. Mon propos, c'est l'inaperçu. Or, de même que, dans "Le contrat social", Rousseau faisait état de l'habitude qu'avaient les Français (sous Louis XV, donc avant la Révolution) de s'entre-appeler non pas "sujets", mais "citoyens", il nous montre dans le Discours que sous le Règne de Louis XIV, dont l'historiographie n'avait pas encore fait l'origine et le parangon de l'absolutisme, si le roi pouvait y proclamer: "L'Etat, c'est moi", parole dont on ne saura jamais si elle est apocriphe ou attestée, il se jugeait aussi le premier sujet des lois de son royaume. Rousseau cite cet extrait d'un "édit publié en 1667 au nom et par les ordres de Louis XIV ": « Qu’on ne dise donc point que le souverain ne soit pas sujet aux lois de son État, puisque la proposition contraire est une vérité du droit des gens que la flatterie a quelquefois attaquée, mais que les bons princes ont toujours défendue comme une divinité tutélaire de leurs États. Combien est-il plus légitime de dire avec le sage Platon que la parfaite félicité d’un royaume est qu’un prince soit obéi de ses sujets, que le prince obéisse à la loi, et que la loi soit droite et toujours dirigée au bien public." Donc à supposer que Louis XIV ait jugé que son pouvoir était absolu, il n'envisageait pas de l'exercer de manière arbitraire, ce qui va contre bien des idées reçues.

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