Le blogueur que je suis vit dans
une niche de commentateur. J’essaied’en
prendre mon parti. Voici le second commentaire posté sur le blog de Philippe
Bilger au pied de son article : « Un
ministre peut tout, un ministre ne peut rien » :
D’habitude, je n’aime pas mes
textes féroces. Celui-ci l’est bien plus que mon premier commentaire. Mais j’ai
si souvent traité ici de ma théorie du « peueple parlementaire » ou législateur
que je trouve inutile d’y revenir. Je me sens à l’aise dans le monde des
abstractions, mais il est des constats qu’il faut savoir dresser.
« Il manque un volet concret
à mon commentaire d'hier soir.
Je me rappelle comme si c'était
hier cette première professeur dépressive rencontrée il y a vingt ans dans une
abbaye où elle venait se reposer, qui disait se faire molester tous les jours
et que son principal ne défendait pas, car il ne s'agissait pas que son collège
fût déclassé, ni qu'on pût laisser dire que l'Éducation nationale souffrait
violence des élèves, ce qu'on peut résumer par boutade en disant qu'après que
les profs ont tapé les élèves, depuis l'interdiction des châtiments corporels aux
écolâtres, ce sont les élèves qui tapent les profs.
Cela a été évoqué
par @Achille : en banlieue sont envoyés les professeurs les moins chevronnés,
et les commissariats sont en sous-effectif. La République en marche marche sur
la tête ou la tête à l'envers : il faudrait à l’évidence que le maximum
d'effectif de police se concentre sur les quartiers qu'on appelle
"sensibles" pour ne pas avouer qu'on y mène une vie bien plus sauvage
que celle de Vendredi, de même qu'il faudrait que s'y concentrent les
professeurs les plus chevronnés. On cache qu'on n'organise pas ces nominations
par cette rustine qu'est le dédoublement des classes primaires en réseau
d'éducation prioritaire, qui permet d'opposer la France rurale dans laquelle on
ferme des classes (et qui n'est rien pour notre président de la République
puisqu'elle n'a souvent pas le haut débit) à la France des banlieues qu'on va
bientôt rapprocher des métropoles pour que "les loups entrent dans la
ville", ce qui ne serait pas anormal si on commençait par les domestiquer,
qu’ils soient solitaires ou en bandes&meutes, excès de langage mis à part:
la banlieue est le territoire d'Al-Qaïda, des bandes et des caïds, d'où cet
autre rapprochement sémantique. "Al nostra" fera du « bon boulot »,
cependant que Georges Bensoussan nous parlera des "territoires perdus de
la République" et ne sera pas soupçonné d'importer le conflit
israélo-palestinien dans la République parce qu'il n'est pas par position du
côté des importateurs ou des importuns dont on dit qu'ils importent, bien qu'il
ait écrit une remarquable histoire du sionisme en deux volumes à ce qu'on dit
(je n'ai pas vérifié, n'ayant lu que celle de Denis Charbit).
Il arrive qu'au
sommet de l'État on reprenne la rhétorique des territoires perdus de la
République, rhétorique qui décrit une réalité bien que ceux qui la poussent le
fassent dans une intention de "concurrence victimaire et communautaire"
qu'ils dénoncent par ailleurs. Je précise que l'exode des juifs hors de la
Seine Saint-Denis est des plus préoccupantes. Mais l'exécutif préfère se
regorger de déclarations martiales que de rendre des sanctions exécutives.
L'administration ne protège plus ni les administrés ni ceux qui travaillent
pour elles comme ma professeure de collège déprimée rencontrée il y a vingt
ans, c'est dire depuis combien de temps dure le phénomène. Il n'y a qu'à voir
comme les professeurs sont envoyés dans n'importe quelle académie ou coin de
France. Le site du Sial les balade comme des pions. Les lois sont de plus en plus déclaratives,
comme la prochaine amende dont seront passibles les frotteurs ou les siffleurs
de filles qu'on ne prendra jamais sur le fait. À tout prendre, la loi préférera
importuner les femmes voilées qui ne font de mal à personne. Elle acceptera, au
retour du bled, de légitimer les mariages forcés qui y auront été contractés,
tandis que des catholiques qui voudraient se marier religieusement sans
contracter de mariage civil ne le pourront pas. Après avoir commenté en amont
l'opportunité des lois votées par le pouvoir législatif, l'autorité judiciaire
décidera en pratique lesquelles seront appliquées, ce qui n'ira pas sans un
certain arbitraire puisque, selon que le juge sur lequel vous tomberez sera de
gauche ou de droite, vous serez puni ou relaxé, et le délit pour lequel vous
serez prévenu sera reconnu ou non.
La première
division de la République est l'insécurité. La première indivision d'une
République est l'unité dans la sécurité. Celui qui exerce le monopole de la
violence légitime doit être le même sur tout le territoire. Sous prétexte que
les caïds n'aiment pas la police, on ne doit pas déléguer aux caïds les
pouvoirs de police. Quand mettra-t-on fin à tout ce bordel, à ce terrorisme du quotidien, à cette anarchie
rampante, à cette impuissance étatique drapée derrière le ministère de la
parole de ministres qui parlent beaucoup, mais ne font rien ? Pour retrouver
les territoires perdus de la République, il faut commencer par le vouloir. »
Mon amie Nathalie Haddadi demandait l’autre soir, sur « France
2 », dans l’émission « Questions directes » dont elle
participait à essuyer les plâtres : « Comment des enfants de la
République en arrivent-ils à vouloir détruire la République ? » Ils
ne sont pas respectés, ni quand la République est aimante, ni quand elle est
sévère. Aimante, elle ne veut pas qu’ils reviennent de s’être battu, non pas du
mauvais côté, c’est à croire -puisque la République préfère combattre Bachar
que Daech et combattre Bachar aux côtés de Daech-, mais dans la proximité des
mauvaises personnes. Elle ne porte pas le deuil des djihadistes français, qu’ils
se sentent effectivement Français, que la République leur ait accordé la nationalité française ou qu’elle leur ait
fait croire qu’ils étaient Français sansleur demander s’ils le souhaitaient. Sévère
dans son laxisme, elle libère sa petite délinquance qu’elle enferme dans sa
condition de voyou, et elle ne fait pas savoir à la pègre qu’elle ne sera
jamais une police parallèle.
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