Pour que la République indivisible ne soit pas divisée, il
faudrait qu'y règne l'amitié politique ou une certaine convergence d'intérêts,
que l'on sait divergents, entre des citoyens déchirés par la crise identitaire.
Il n'y a donc pas moyen d'imposer cette convergence. La République antiraciste
donne à la divergence entre les citoyens, qui n'ont pas tous baigné dans le
même bain culturel, le nom ethniciste de #communautarisme. Le seul moyen
d'éviter que cette divergence ne parte en vrille ou ne dégénère en guerre
civile serait de susciter l'amitié politique en faisant que la chose du peuple
soit plus démocratique et moins républicaine. Ou au moins, ce serait de ne pas
se focaliser sur l'indivision républicaine. Et la laïcité non plus n'est pas un
bon instrument, car c'est un idéal négatif, une religion sans croyance qui
prétend relier sans avoir de liant, car ce qui relie ne peut être qu'un contenu de foi, ou à
défaut des traditions plus ou moins fidèles à la religion qui les a fait
naître.
Les pays musulmans ont tort de proscrire l’athéisme,
mais les pays chrétiens ont tort de prescrire la laïcité comme norme fanatique.
L’antiracisme est une erreur stratégique, plus
ou moins volontaire, qui consiste à imposer un sentiment, qui devrait êtrenaturel,
y compris aux réflexes archaïques de la politique, qui jusqu’au vingtième
siècle finissant, désignaient l’étranger comme un ennemi potentiel, étaient
donc xénophobes, et pratiquaient l’amitié politique nationale et la méfiance
politique internationale, au lieu qu’on voudrait de nos jours pratiquer l’amitié
politique internationale et la vigilance intérieure, ce qui, en plus d’être
absurde, comme de vouloir imposer un sentiment, braque les citoyens surveillés
et les fait redoubler de racisme et d’animosité.
Il résulte de cette politique sentimentale qu’alors
que la dissidence désignait jusqu’alors l’héroïsme avec lequel on s’opposait à
un gouvernement tyrannique ou totalitaire, la dissidencedésigne aujourd’hui la
haine, autrement dit l’opposition sentimentale de certains citoyens aux
sentiments d’amour qu’on veut leur imposer.
La normalisation sentimentale procède à une
dernière désorganisation mentale, en interdisant aux citoyens toute distance
avec l’homosexualité, qu’on appelait jadis une inversion sexuelle et qu’on estimait
contre nature. En forçant ainsi chacun, non seulement à avoir un avis, mais à
aimer une sexualité qui n’est pas nécessairement la sienne et qui en toute
hypothèse relève de la vie privée, la
normalisation sentimentale, loin de faire passer le prétendu contre nature dans
la culture, ce qui serait à l’honneur de la société, disloque une partie de la
confiance que le citoyen lui faisait. Celui-ci la suspecte en effet de lui adresser
une injonction antisociale d’amour du contre-naturel.
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