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samedi 11 juillet 2015

Tsipras est un cheval de troie


La démocratie a du mal à revenir de Grèce parce que les Grecs écrivent alternativement de gauche à droite et de droite à gauche.

 

Ainsi fait Tsipras, qui fait un référendum un jour et feint d’avoir obtenu grâce à lui un blanc-seing pour faire volte-face.


Et les journalistes français ("le débat des grandes voix" hier sur "Europe 1") croient avoir trouvé en lui un de Gaulle du: "Je vous ai compris". De l'usage du parjure en politique?


Au moins de Gaulle était-il un mythologue, Tsipras ne sait que jouer avec les symboles institutionnels avec un certain sens de la péripétie dans la tragédie.

Ainsi réussit-il à organiser un référendum où son prédécesseur Papandréou n'avait pas osé braver le tandem Merkozy qui trouvait cela de mauvais goût. Mais comme Tsipras est d'abord un européen, il détourne ce référendum et lui donne une valeur consultative.

Et puis, à la veille de capituler (la France sait que la capitulation politique pour donner les pleins pouvoirs au signataire de l'armistice de 1940 a été parlementaire), il va se montrer au Parlement européen, où sa présence donne lieu à un débat come il y en aurait plus souvent dans cette enceinte à laquelle les citoyens européens s'intéresseraient si les médias  les relayaient.


Mais il n'en a pas plus tôt donné l'occasion ni ajouté que, s'il avait pu ne négocier qu'avec la Commission européenne, la crise grecque serait déjà réglée, qu'il dégoûte de sa démarche parlementaire comme il a dégoûté le peuple de lui avoir donné la force  de sa souveraineté pour la retourner contre lui. Tsipras transforme de son seul fait le Parlement européen en serviteur croupion de la capitulation et en chambre de préenregistrement de l'austéritarisme consenti par la force détournée du référendum.


Au Parlement européen, Tsipras s'était pourtant contenté de dire que les créanciers n'avaient pas à déterminer sur quoi devaient porter les efforts budgétaires du moment que le compte y était. Ceux-ci n'envisageaient de coupes que sur la fonction publique, la TVA et les petites retraites. Ils proposaient de porter le coup de grâce au pouvoir d'achat grec et au secteur touristique pour faire revenir les investisseurs et relancer l'économie du pays. Tsipras avait l'air de dire qu'on pouvait faire payer les armateurs, les insulaires, l'Eglise orthodoxe et les corrompus, mais que c'était son affaire de répartir l'effort fiscal. Il fait la politique de ses créanciers, non pour payer ses dettes, mais parce qu'il est désormais naturel d'être aux ordres de ceux dont on dépend économiquement quand on fait de la politique.


Au moment où le FMI venait sur ses positions en soutenant par l'intermédiaire de ses économistes que la Grèce ne pourrait jamais payer toute sa dette, ne faisant que reprendre ce qu'avait dit DSK au plus fort de son affaire, dans la partie économique de son interview par Claire Chazal, le FMI est le seul interlocuteur que récuse Tsipras, au prétexte que l'Europe lui a promis de discuter de la dette grecque et de la part qui n'en serait point remboursée. Mais on sait ce que valent les promesses de l'Union européenne.


Faut-il être de l'avis de ceux qui, de Jacques Sapir à Marine le Pen, prétendent que tout le mal est dans l'euro? L'euro ne serait-il pas une monnaie pour le Sud de l'Europe ? L'euro nécessite-t-il des économies plus homogènes ou entraîne-t-il la mutualisation des dettes? Cette dernière vision de la monnaie unique fait l'affaire de Tsipras : les autres pays de la "zone euro" continueront de cracher au bassinet et lui de naviguer à vue.


Le plus grave est que Tsipras discrédite la partie des forces de l'alternative (dites "extrémiste" par le prétendu Système) qui propose une sortie européenne et négociée de l'austérité, pour donner raison aux nationalistes, qui pensent qu'on ne peut faire aucune confiance à l'Union européenne des mauvais compromis. En France, la trahison de Tsipras fait passer Mélanchon pour un déséquilibré naïf, tandis qu'elle conforte Marine le Pen, l'amie d'Aymeric Chauprade.

Giscard, qui a une position raisonnable sur la crise grecque, est depuis longtemps à la retraite et DSK hors jeu, à qui je ne donnerais pas les clefs de mon pays pour une moussaka.

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