mercredi 18 mai 2016
Mon journal de presse
Ce 18 mai 2016
Jean-Luc Mélanchon écrit dans son billet "l'éruption qui vient" :
"L’épisode du 49.3 est un concentré du tableau politique dans lequel nous vivons. À deux signatures près, une motion de censure venant de la gauche était
déposée et le gouvernement serait tombé par la gauche."
Il sait bien qu'il ment : si les frondeurs n'ont pas voulu voter la motion de censure de la droite, pourquoi la droite aurait-elle voulu voter la motion de censure des frondeurs ? Comment peut-on jouer cette comédie parlementaire dans une société si clivée ? Manuel valls se révèle plus clivant que ne l'aura été Nicolas sarkozy, qui se vantait à juste titre en 2012 de n'avoir subi "aucun blocage", alors que tous les corps constitués menaçaient de se mettre en grève générale dès le lendemain de son élection. Je l'ai moi-même entendu de mes oreilles, proféré par un chehminot.
Le Front de gauche a voté la motion de censure de la droite, nous admettrons donc que Jean-Luc Mélanchon est plus conséquent que les frondeurs, même s'il sait bien que son affirmation ne tient pas. La preuve, c'est quil assigne des limites à sa "convergence des luttes". Il se comporte plutôt comme un agent qui déjoue le populisme en singeant la colère du peuple qu'en agent qui assume celui-ci. Jacques Rancière a raison de dire que le peuple n'est pas seulement en colère. Bernard stiegler a raison de dire que la réduction du peuple à sa colère peut provoquer une régression. Il n'empêche : croire qu'on peut encore vouloir le bien du peuple en donnant dans l'antifascisme, c'est commettre un anachronisme. Je sais bien que Jacques sapir a compromis cette convergence des luttes des fachos et des antifas en disant qu'elle devait se résoudre dans la dictature. Je ne le crois pas. Seulement nous abordons à un moment révolutionnaire. Alain de Benoist rappelait opportunément cette citation de Lénine : "Une révolution se produit lorsque la base ne veut plus et que le pouvoir ne peut plus." Au vu de la situation présente, nousen sommes proches. Si l'on n'assume pas la convergence des luttes à ce moment, on prépare une ouverture possible à toutes les régressions. Je comprends que Jean-Luc Mélanchon ne puisse pas avaler facilement que les antifas doivent se réunir aux néofas, mais c'est le seul moyen d'humaniser et de décommunautariser la colère qui vient.
Michel Wieviorka disait ce matin sur "France culture" que la violence est devenue un tabou dans notre société. Ça dépend laquelle. La violence des zadistes ou des "Nuits debout" est tolérable. Celle de l'extrême droite ou des islamistes n'est pas tolérée. C'est comme la pédophilie. Celle des prêtres fait rêver des secrets d'alcôve les plus sordides. Celle du personnel de l'Education nationale n'étant liée en principe à aucune frustration sexuelle, ne scandalise personne. Farida belghoul accusait cette institution de corrompre la jeunesse. Elle pourrait presque s'en faire gloire, vu que ce fut sous ce chef que fut condamné Socrate, lequel était pédophile au sens moderne et contrevenant au polythéisme en vigueur en voulant rationaliser la figure des dieux et les ramener à un seul... La laïcité intente de même à la religion en général le procès d'être une "sous-culture", le pape fait bien de le signaler dans son interview à "la Croix". En réalité, dans la continuité de la tradition philosophique, la laïcité ne supporte pas les religions qui ne tendent pas vers l'individualisme. C'était le cas du christianisme, qui a dévoyé sa vertu d'espérance en ne la teintant plus de charité, au point que chaque chrétien escompte davantage en son salut personnel, qu'il n'a le souci d'appartenir ou de constituer l'Eglise. L'islam a une vision plus territorialiste et plus clanique. Il ne tend pas vers l'individualisme qui seul est supporté par le "relativisme social et moral" qu'est en fait la laïcité. L'islam est la surprise diabolique de la laïcité, qui a trouvé en lui, pense-t-elle (et je ne suis pas loin de penser comme elle), un obscurantisme pire que celui qu'elle voulait remplacer. Aussi la laïcité a-t-elle commis le Front national pour dire tout le mal qu'elle pensait de cet obscurantisme et que son islamophobie soit portée sans qu'elle ait à se salir les mains. C'était la thèse d'Alain Soral en 2011,sur ce point il a raison.
Savoir comment une société sécrète ses tabous est un intéressant sujet d'étude. Pourquoi une société qui corrompt sa jeunesse s'indigne-t-elle devant la pédophilie ? Pourquoi supporte-t-elle la violence des bobos et est-elle horrifié par la violence des voyous allogènes ? Pourquoi se focalise-t-elle silencieusement sur cette seule forme de violence au point d'oublier que les autochtones avaient naguère un code de l'honneur du voyou, sans compter la violence politique ? Pourra-t-on contenir la violence du moment révolutionnaire que nous traversons par suite de trop de précarité ? Comment se fait-il que, depuis une quinzaine d'années, c'est-à-dire depuis que le paupérisme s'est répandu et que le libéralisme s'est découvert comme doctrine de gouvernement économique de la mondialisation, les journalistes ont tombé le masque et se sont tous assumés comme libéraux libertaires ou socio-libéraux ? Comment ne voit-on pas que la mue de François Hollande n'est qu'une conséquence que ce méchant naïf croyait pouvoir tirer innocemment de l'aveu de ses copains préférés, ceux-là mêmes pour qui il se dépensait en petites blagues ? Comment les anciens gauchistes ont-ils si facilement pu abandonner la lutte des classes pour la changer en lutte des sexes ou des moins réellement diviseurs des attributs sociaux ? Comment la gauche vit-elle l'abandon de son monopole culturel au profit d'une droite dont elle découvre stupéfaite qu'elle a des opinions ? Comment cette gauche, qui se rengorgeait de son pluralisme tant qu'elle n'avait pas de contradicteurs, vit-elle cette concurrence, maintenant qu'elle est devenue libérale ? Comment les progressistes, amis de "la société ouverte", qu'elle le soit économiquement ou plus largement, supportent-ils que ce soit les tenants de la pensée close qui déploient désormais le plus d'énergie et de créativité intellectuelle ? Et que signifie cette inversion de la créativité dans un moment prérévolutionnaire ?
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