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samedi 16 octobre 2021

Nouvelles réflexions sur le rapport Sauvé



-Doit-on considérer que le rapport Sauvé est parole d'Evangile? Statistiques estimées à la louche, mais surtout entre-soi assumé par le président de la commission, qui l'a présidée à condition de nommer tous ses commissaires, a fonctionné "à budget ouvert", a produit des statistiques à la louche, par des méthodes d'estimation, a fait parler M. devaux en tête de sa conférence de presse pour expliquer à ses commanditaires qu'ils étaient "la honte de l'humanité" et a pris la tête, sous le prétexte d'agissements moralement indéfendables, d'une contestation portant les revendications de "Wir sind die Kirsche" en Allemagne, et dans le monde francophone de "Golias", de la CCBF et de tous les progressistes pour exiger un "Vatican III" de l'Eglise (il ne le dit pas tel quel, mais ceux qui prennent le rapport Sauvé pour parole d'Evangile le font pour lui), comme s'il fallait se parer des vertus du néo-puritanisme en vogue (et je ne dis pas que les abus dont il est question sont dénoncés par une conception puritaine de la relation amoureuse) pour saper la morale chrétienne, ce dont je me fiche, mais pour détruire l'eglise en la ruinant, ce dont je ne me fous pas du tout.


-Car il s'agit bien de savoir pourquoi l'Eglise catholique est "la seule internationale qui tienne" comme le dit Guillaume de Tanouarn; pourquoi elle a survécu à tous ses crimes (et Périco Légasse a peut-être raison de dire qu'elle est la plus grande tueuse de tous les temps, opinion qui me scandalise), ce qui ne s'explique pas à moins qu'elle ait en effet les promesses de la vie éternelle et que les péchés incommensurables de ses membres n'atteignent pas sa sainteté ontologique.

"Moi, quand j'aurais commis tous les crimes possibles...", s'exclame sainte Thérèse, l'apôtre de la voie d'enfance...

   Comment l'Eglise peut-elle survivre, non seulement aux abus sexuels de ses clercs et de ses laïcs, mais aussi à son indifférence envers tant de prochains malades, handicapés, isolés, affamés ou démunis,  en priant pour que des gens se dévouent à son service dans les prières universelles, en leur envoyant le Secours catholique ou la Conférence Saint-Vincent de Paul pour les soutenir d'une tape sur l'épaule, d'une bonne parole qui ne mange pas de pain ou d'une aide ponctuelle; tout en ayant les yeux de Chimène pour les migrants ("tu aimeras ton lointain comme toi-même et l'homme in abstracto"), jusqu'au jour où des coutumes différentes viennent déranger ses habitudes? 


-Et j'irai plus loin. Ce qui interpelle ma foi en Jésus à l'heure actuelle après avoir douté de son historicité (et le doute n'est pas levé en moi), cru que c'était un egregor qui existe par l'appel à l'existence que lui lancent les croyants (et il m'arrive encore de le penser); un paranoïaque qui se prenait pour le Fils de Dieu et que tout le monde a cru; après avoir pensé tout cela non sans l'aimer, je me demande comment on peut dire qu'Il n'a pas péché alors qu'Il S'est mis en colère, a rabroué Ses apôtres, a maudit le figuier sec, a menacé les sarments secs d'être jetés au feu et dit aux vierges folles qu'Il ne les connaissait pas. Comment peut-Il être doux et humble de coeur et en même temps si âpre? Comment peut-Il ne pas pécher et contrevenir à nos conceptions les plus évidentes de la relation humaine qui reconnaît l'autre et ne le rudoie pas? Pourquoi dit-on de Jésus qu'Il n'a jamais péché sauf si c'est vrai et dans ce cas, qu'est-ce que cela dit de la manière dont nous devons concevoir la relation humaine? Jésus ne nous blesse-t-Il pas d'amour autant qu'Il nous aime inconditionnellement, ce qui ne transparaît pas dans les Evangiles au premier coup d'oeil?


-Et enfin les victimes doivent-elles s'enfermer dans leur statut de victime? Il n'est nulle enceinte judiciaire où la justice est rendue au nom des victimes, sans quoi ce n'est pas une réparation, c'est une vengeance. Un procès reconstruit rarement une victime et la justice doit être rendue au nom de la société. La justice. On doit faire réparation aux victimes, mais la réparation ne leur rendra pas ce qu'on leur a pris à tout jamais. La vie, écrite à l'encre indélébile, est faite de ces deuils irrémédiables et de ces pertes irréparables, dont il n'est pas écrit qu'on ne doive pourtant pas s'en remettre. Pourquoi être une victime serait-il la seule condition dont on ne doit jamais se remettre? Pourquoi s'enfermer dans le statut de victime? Est-ce que la résilience n'est pas l'ultime ambition d'une victime qui ne nie pas son trauma, mais refuse de s'y laisser enfermer pour le reste de ses jours? 

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