vendredi 12 août 2016
Réflexions sur le nationalisme
Le nationalisme a mauvaise presse. On lui oppose le patriotisme qu’on lui préfère. On lui préfère le patriotisme, ce nationalisme de « la terre et les morts » et de la marseillaise où notre « sang » non « impur » viendrait abreuver les sillons de notre identité. Je n’aime pas la marseillaise.
Le patriotisme est un nationalisme identitaire et de civilisation. Je n’ai jamais été patriote.
Ma boussole pour juger de mon nationalisme est cette citation attribuée à Maurras :
« Un peu de nationalisme éloigne de l’universel, beaucoup de nationalisme en rapproche.
Catholique, je suis nécessairement un nationaliste universaliste.
Ma matrice nationale est adoptive, sans être naturalisatrice à tour de bras. Même si la naturalisation imite ce que fait la grâce et bien qu’un enfant ne choisisse pas les parents qui l’adoptent, l’adoption nationale, parce qu’elle est mature et devrait concerner des adultes ou des pupilles, devrait supposer l’accord de l’adoptant et de l’adopté.
Mon nationalisme n’est pas civilisationnel comme l’est le patriotisme identitaire, mais il est culturel. Sa matrice adoptive suppose le choix, ou au minimum l’adhésion à un modèle historique et culturel. La nation dont je suis le natif et, en tant que tel, un adoptant de droit, est historiquement chrétienne et a tout un patrimoine culturel qu’on ne doit pas assumer en bloc, mais dont on doit accepter l’essentiel.
Je suis contre la double nationalité, non seulement à cause du dilemme et du risque de trahison qu’elle fait courir en cas de guerre entre les deux nations qui se disputeraient l’allégeance du soldat, mais parce que le choix de la nationalité doit exprimer une préférence. Une origine étrangère n’exclut pas le choix préférentiel de la culture et de la matrice nationale, tout en n’impliquant pas le reniement de la culture du pays d’origine, pourvu que préférence il y ait.
La double nationalité pose en outre un problème démocratique dont on parle peu : un citoyen binational a deux voix dans le monde.
Je suis contre « le droit du sol » dans les sociétés multiculturelles, précisément parce que la greffe nationale n’a pas eu le temps de prendre, ni le pacte d’adoption celui d’être signé. Je ne crois pas au contrat social que l’on ne signe pas. J’estime qu’on ment à un musulman de France d’origine maghrébine en lui racontant qu’il est Français.
Suis-je national socialiste ? Je lève tout de suite une équivoque que pourrait faire planer cette question provocatrice : le nazisme, qui a brandi cet étendard, était condamnable, non en tant que socialiste, mais en tant queraciste. Du reste, sa politique sociale se limitait à tarir la reproduction de la misère en éliminant les « dégénérés », et à investir l’énergie du prolétariat dans une politique de grands travaux qui réduisit beaucoup le chômage, seul point positif à porter au crédit de ce régime bestial.
Je serais plutôt national socialiste en ce que, considérée extérieurement à la nation, la société est une abstraction. Le nationalisme peut incarner l’abstraction sociale, même si le danger du nationalisme culturel dont je me réclame, est de ne pas échapper à l’abstraction, à trop ignorer la terre pour éviter l’appel du sang.
Alain soral se dit un national socialiste qui ne serait pas impérialiste et n’aurait pas besoin d’espace vital. Mais Alain Soral étant antisémite est raciste, et partage le fond du national socialisme allemand, même s’il ne prétend pas faire de nouvelles guerres de conquête – parfois, l’appétit vient en mangeant, mais je charge inutilement la barque -.
Je remarque que le racisme sanguinaire est un avatar du patriotisme de terroir et non du nationalisme culturel, même si le nationalisme culturel n’est pas indépendant des ethnies majoritaires et autochtones.
La décolonisation a purifié le nationalisme français de la tentation impérialiste. Mais la décolonisation n’est pas terminée. Je crois à l’autodétermination et au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Je suis heureux que les Dom-Tom soient français. Mais si j’étais né sur ces territoires, je serais séparatiste. Et je suis partisan qu’on leur demande s’ils veulent rester Français et pourquoi.
La tentation impérialiste n’est pas jugulée dans nos gouvernements extérieurs au nationalisme. Les guerres néo-coloniales de la France-Afrique ne sont pas faites conformément au génie français, mais au néo-conservatisme américain qu’on voudrait incorporer à la France. À l’origine, les guerres d’ingérance modernes ont été d’inspiration américaine, même si la tendance française à la théorisation a porté le français juif Bernard Kouchner à les présenter au nom de la France et à les imposer à l’ONU. L’imposition mondiale d’une norme nationale n’appartient pas à l’universalismefrançais.
La décolonisation n’est pas terminée. Le constat est valable dans les deux sens. Les ressortissants des pays ayant accédé à l’indépendance devaient ne pas émigrer massivement, et nous devions ne pas les accueillir en masse, comme si nous avions à réparer d’avoir envahi leur pays. L’invasion est un mal, mais la réparation n’est pas un acte politique, et la tendance à l’émigration de masse des pays ayant accédé à l’indépendance, comme notre tendance à l’accueil de masse, a pillé les forces vives de ces pays et formé des génératiions d’apatrides, assis entre leur pays d’origine qui ne les reconnaît plus, et la France qui fait semblant de les avoir assimilés et qu’ils ne se sont pas assimilée.
Mais les migrations ne sont pas un mal. Elles sont un phénomène inéluctable dont on ne peut que limiter l’ampleur entâchant de le contrôler. L’origine de ce phénomène est démographique et tient à la révolution des transports. On ne saurait à la fois admettre le libre échange en permettant la libre circulation des capitaux et empêcher des émigrants de venir par avion.
Mais un émigrant n’est pas un migrant, et la désorganisation des pays arabes par l’afflux de migrants qui n’ont aucun désir d’Europe est un facteur de déséquilibre majeur pour les sociétés tant arabes qu’européennes.
Existe-t-il un nationalisme européen ? La question s’entend ainsi : il n’existe certes pas de nation européenne, mais le nationalisme peut-il s’insérer dans une structure européenne ? Je ne vois pas ce qui s’y oppose, sinon que l’antieuropéisme systématique de tous les nationalistes français prétend avoir réglé la question.
Le nationalisme impérialiste et raciste allemand a voulu bâtir une mittel europa qui se serait méfiée des puissances occidentales. En réaction, on a bâti une Europe technocratique dont le ciment était l’économie et le marché. Mais le marché ne fonde pas un peuple, ni n’entretient un désir decoalition.
L’europe périt d’avoir été pensée et fabriquée par des commissaires au service des marchés et d’une paix lointaine. Il n’y a pas de paix économique. Mais l’Union européenne avait un second vice originel : sa construction s’est adossée à l’atlantisme. Le pacte atlantique a précédé de deux ans la CECA et a été négocié et signé par les mêmes, Robert schumann et Jean Monnet.
L’euro n’était pas condamné de naissance à son échec actuel, qui n’est pas irrémédiable, s’il avait vraiment voulu faire concurrence au dollar pour refonder un ordre monétaire juste, et si la « zone euro » ne s’était pas ouverte à des pays aux économies trop éthérogènes, l’euro ne serait pas la monnaie de la baisse du pouvoir d’achat et du niveau de vie des européens.
Le nationalisme est-il chrétien ? La question est difficile. La Bible reconnaît l’appel du sang d’abel qui doit être vengé d’un assassinat et d’un fratricide. L’appel du sang dans la genèse pouvait passer pour un patriotisme primitif, mais c’est beaucoup plus le cri de l’opprimé qui monte vers Dieu depuis les profondeurs de la terre. La matrice chrétienne est adoptive, mais la matrice adoptive du nationalisme culturel ne doit pas singer l’adoption divine. En d’autres termes, la naturalisation ne doit pas singer la Grâce du baptême.
D’autre part, la construction de l’Église montre que la notion de peuple est privilégiée à celle de la terre du père, le peuple de dieu se déclarant de la patrie céleste.
Cette prémice étant admise, toutes les formes d’organisation de l’exil terrestre me paraissent permises, du cosmopolitisme du citoyen du monde au patriotisme charnel de l’homme qui pense que l’incarnation se prolonge en révération de la terre, en passant par la position, qui serait plutôt la mienne, de celui qui veut faire nation pour faire peuple.
Doit-on donner sa vie pour sa nation ?La forme classique de la question contient le mot patrie. J’aurais tendance à dire que, si le peuple auquel on appartient et qu’on choisit de former avec d’autres, dans le « plébiscite de tous les jours » dont parle rEnan, si ce peuple est en danger, on peut lui donner sa vie, atendu qu’il est bon de dévouer sa vie à quelque chose qui la dépasse. Mais le don de sa vie à la nation n’est pas celui chanté par LE CHANT DU DEPART : « Un Français doit vivre pour elle, pour elle un Français doit mourir ». Pouvoir n’est pas devoir, et on ne doit donner sa vie ni à la terre selon le lieu commun du patriotisme, ni à la République que désigne le Chant du départ, régime idéologique et idéologie de régime. On doit donner sa vie à son peuple, pour défendre son peuple, on à sa terre et non à une idée d'égrégation sociale ayant pris une forme de gouvernement.
Le nationalisme a-t-il une forme de gouvernement ?
L’hydre lepéniste, comme une résurgence de la bête immonde, a effrayé l’État et la société qui lui ont oposé un républicanisme exacerbé, qu’on peut globalement réunir sous le vocable de chevènementisme, et qui va aujourd’hui de Jean-Luc Mélanchon, l’ancien international-socialiste devenu nationaliste chavésien, ou d’arnaud Montebourg, le démondialisateur qui se soigne, à Emmanuel Macron, qui apporte au patronat l’obole du nationalisme français et républicain. (ON voit par là qu’il n’y a pas de doctrine économique du nationalisme, sinon que le libéralisme est plus américain que Français, quoique Calvin soit français...)
Le chevènementisme est un nationalisme républicain, qui voudrait monopoliser la République au service de la nation, pour respecter et capter l’héritage révolutionnaire.
Le lepénisme peut revêtir trois formes de gouvernement : la royauté (que drague Emmanuel Macron), la démocratie ou le fascisme.
À la croisée des deux derniers se trouve le populisme. Ce mot de la démocratie, dévoyé par « nos élites » qui le sentent opposé à elles, peut désigner, soit le respect du peuple, soit la démagogie (le populisme mélanchoniste est une démagogie argotique) qui, dans le cas du lepénisme, flatterait les instincts xénophobes,dans un contexte où le racisme et l’antiracisme se nourrissent réciproquement et obsessionnellement comme l’autre nom de la peur de la guerre et de l’envahisseur.
Le nationalisme doit participer à la construction du peuple tel qu’il apparaît, dans toutes ses composantes, en respectant l’origine de la nation matricielle.
Je suis un nationaliste social, démocrate, éventuellement européen, populiste et non xénophobe, étant entendu que mon national populisme s’oppose à la sociale démocratie,gouvernement des corps intermédiaires qui bâtit la société contre le peuple, au détriment de l’intérêt général et au service des intérêts catégoriels.
Je crois en une refondation démocratique et sociale de la nation.
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