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lundi 4 février 2013

Non à l'élitisme pour tous!

Ma réponse à M. le professeur alain Labit: Que le temps soit le matériau premier de la musique, cela est contesté. Ca l'a été notamment lors d'un colloque qui fut diffusé sur "France culture" à l'occasion, si ma mémoire est bonne, des "rencontres de Pétrarque", qui avaient pour thème le temps. Il y a eu une intervention déniant cela, d'un certain Nicolas... « Ce peu profond ruisseau calomnié, la mort". C'est bien du Mallarmée, concentration d'une pensée très profonde en un minimum de mots entrechoqués.Ce que j'en comprends ou reçois, c'est que la mort n'est pas grand-chose, ou, pour le dire autrement, qu'il existe peu de distance entre la mort et la vie, entre le temps des vivants et le temps des morts, qui est peut-être le nôtre moins, non un vide, mais un inconnu. Ce temps nous est commun, rattaché, du côté des vivants, par la mémoire. Le matériau de la mémoire est le temps déboussolé, c'est peut-être là que mémoire et musique se rejoignent, et les religions ont pour fonction de nous aier à passer, donc elles ont une fonction dans "l'apprendre à mourir" humain, et comme la musique est un langage qui relie les vivants et les morts parce qu'il transcende le temps, il transcende l'espace, il est avec l'esprit, celui Dont on ne sait ni d'où Il vient, ni où Il va. "plus importante est la répétition, plus faible l'information, et plus indigent le résultat: la théorie de l'information nous apprend que la répétition tue l'information". Je réagis en béotien, mais pourquoi l'adage : "la pédagogie est faite de répétition" dit-il exactement le contraire ? Si je tire Alain Labit vers la conclusion où on le sent aller, il faut qu'une mélodie soit donc imprévisible. Voici ma réaction prévisible d'improvisateur : cette position pose deux problèmes : 1. Une mélodie imprévisible devient vite inchantable. Or Vatican II a prôné "la participation active des fidèles". Faut-il faire du chant d'assemblée ou du chant de chorale ? C'est une alternative, un choix. Si l'on opte pour la seconde solution, on en viendrait à vouloir créer l'équivalent d'un grégorien pour aujourd'hui. Pourquoi pas ? Mais l'autre problème est plus vaste : 2. Si l'on assume que l'information doit être maximale dans la mélodie que l'on se propose de composer, alors cela signifie que l'on convient que la musique doit êtrre le véhicule de l'information. Elle devient, soit un substitut, soit un canal de Dieu. Elle peut le devenir légitimement, si l'on pense que la prière tient à la fois de la surprise et du silence. Silence de l'assemblée prise par surprise par le message de l'Inconnu divin, du "tout autre". Mais, dans ce cas, on est dans un cantique à fonction didactique, on n'est pas dans un chant de louange. Là encore, c'est un choix. On peut aussi considérer que certains temps liturgiques sont dévolus à la louange et d'autres non. L'offertoire n'est clairement pas un temps de louange, mais qui des autres temps liturgiques ? si même le "kyrié" est un hommage à la Miséricorde de dieu beaucoup plus qu'un chant de pénitence, n'est-ce pas une louange? Et quid du chant d'entrée, dont le dynamisme du processionnal qu'il accompagne semble commander une action de Louange ? N'y aurait-il pas une certaine cohérence à considérer que le temps qui précède la "liturgie de la Parole" est un temps de louange, préparant le cour du fidèle à la dimension de l'eucharistie, "Sacrifice de louange", la dimension propitatoire pouvant intervenir ultérieurement au cours de la messe ? Le dézingage de "trouver dans ma vie ta Présence" est un classique et peut être musicalement rigoureux, mais c'est un dézingage de tous les cantiques populaires. Je préfère la réflexion suivante que je me suis souvent faite : pourquoi ne pas importer en l'état, quitte à transformer les traductions de Théodor de bèze, le répertoire huguenot français du XVIème siècle ? ce serait en outre un excellent moyen pour découvrir le choral protestant. Je crois qu'on peut dire sans trop de risque que "la liturgie chorale du Peuple de dieu" est un échec, parce qu'elle est trop demi-savante, de l'aveu même du frère André gouzes, qui disait - j'en ai été le témoin - que son niveau musical et celui de ses collaborateurs ne lui permettaient pas d'appréhender une ouvre de "grande écriture" telle que la messe que l'abbaye de sylvanès avait commandée à Karol beffa et à la création de laquelle j'ai participé, sous la houlette de Jean gouzes, le frère d'andré. Jean vilar ou pas, "l'élitisme pour tous" demeure un oxymore. "Les sept dons du saint-esprit", n'y a-t-il pas quelqu'amalgame entre le récit biblique de la première Pentecôte et son interprétation magistérielle ? Mais l'auteur du présent article pourrait me taxer de fondamentalisme biblique. "L'entertainment" ne constitue-t-il pas un certain mode de réveil ? bon, admettons qu'il y a entre l'entertainment et l'art la différence qu'il y a entre ce qui empêche de s'assoupir (qui peut être un excitant) et ce qui, non pas réveille, mais éveille. Là encore, la critique d'alain Labit contre les cantiques d'"entertainment" spirituel est en partie recevable, dans la mesure où l'"entertainment" procède de la peur de s'assoupir, qui elle-même procède de la peur du silence, contre laquelle la prière doit lutter plus que tout. Seulement, l'"entertainment" est aussi une façon de ne pas perdre la mémoire, comme la louange procède de l'anamnèse, que l'esprit-saint fait de dieu dans les "orphelins de dieu" que nous serions sans Lui. L'anamnèse est la conviction dont l'esprit nous remplit que nous ne sommes pas abandonnés, elle précède l'abandon à dieu. L'anamnèse est un retournement de la tendance de la mémoire à se complaire dans le malheur en louange. En cela, l'"entertainment" a tout de même du bon, et il faudrait faire attention à ne pas faire de la foi une vertu si grave qu'elle se prenne au sérieux. Vertu théologale émanant du Dieu créateur, la foi doit aussi se ressaisir de ceci, que "Dieu Crée par (et avec) fantaisie". La Création est fantaisie, et travail sur la fantaisie, mais travail inspiré, qui ne doit pas trop transpirer, mais surtout sentir la transpiration, pour contredire l'adage sur la répartition de l'inspiration et de la transpiratiion dans l'acte de création.

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