https://www.philippebilger.com/blog/2024/03/la-droite-ne-d%C3%A9teste-pas-albert-camus-.html#comments
de l'article consacré par Aurélie Raya à Catherine Camus dans "le Point":
https://www.lepoint.fr/culture/la-peste-les-confidences-de-la-fille-d-albert-camus-sur-la-serie-de-france-2--03-03-2024-2554104_3.php#11
et de la quasi totalité des commentaires du billet de Philippe Bilger m'amène avant tout, moi qui n'ai pas lu tout Camus et qui ai commencé par prendre "l'Étranger" au premier degré tant je suis prédisposé au contresens, moi qui en revanche ai aimé "la Chute" et "le Malentendu", mais qui n'ai lu ni "la Peste", ni "Noces", ni "l'Été", ni "le Dernier homme", à remercier Tipaza de me l'avoir expliqué, ou plutôt de m'avoir conforté dans l'explication que ma lecture empirique aurait moins bien formulée que lui, à savoir que Camus était, à la mode des anciens Grecs, un écrivain des limites, donc un écrivain borné, comme Élisabeth Borne était prédestinée, en politique, à ne pas faire des étincelles; un écrivain des jeux littéraires à condition de ne pas importer le théâtre dans la vie civique; un écrivain dont la principale leçon de la fable qu'est "Caligula" vous explique avec assez de réussite qu'il ne faut pas demander la lune; un écrivain guetté par l'indifférence aux idées ("la Chute") et aux hommes ("l'Étranger"), mais qui s'oblige à s'intéresser à ses semblables au risque de les tuer par erreur ou désinvolture sans regret de la vie quand il court à l'échafaud; un écrivain vous mettant en garde contre le terrorisme ("les Justes") ou le sadisme ("l'Homme révolté") pour garder les mains propres (au contraire de Sartre, l'anti-saligots qui préfère garder "les Mains sales", quoique ne s'étant pas beaucoup mouillé; un écrivain de la responsabilité; un Danton un peu dandy à la création de "Combat"; un "libertaire de coeur et un social-démocrate de raison" dont il ne fait pas bon être l'héritière comme Catherine Camus, parce qu'on s'ennuie un peu à dire oui aux uns et non aux autres, à être macroniste par défaut, à avoir un jumeau qui ne vous "rend service", étant malade, que quand il refuse la panthéonisation de son père, à essayer de coller aux traces et au train d'un "papa" qu'on a trop tôt perdu, à faire passer ses langueurs dans une bouffée de cigarette, à essayer d'être tranquille et en fin de compte à s'ennuyer un peu beaucoup, entre Olivier Todd qui vous pille et Michel Onfray, autre manuelliste de philosophie spécialisé dans les raccourcis, parce que papa, vous dis-je, n'était pas un romantique; qu'à force de s'empêcher de défaire le monde, on s'empêche d'en rien faire; on s'en remet au moins offrant qui n'est pas le moins inquiétant, on s'en remet à Macron qui rejoue l'escalade vers la Troisième guerre mondiale et certes, on est sûr de ne pas se déshonorer en restant bien centriste, mais on se sent floué, désabusé, comme quelqu'un qui n'a pas pu faire sa vie en tuant le père car héritière de profession, il nous était interdit de faire le deuil, et des journalistes venaient recueillir nos oracles pour faire parler un mort qu'on n'a pas assez bien connu, sinon que, comme Henri IV jouait au cheval avec ses enfants, le grand écrivain jouait au football avec nous, et était peu disert parce que sa mère était sourde et qu'il ne s'était jamais remis lui-même de ce silence qui était imposé à cette femme discrète et tant aimée.
Simone de Beauvoir s'était elle-même sentie flouée dans "la Cérémonie des adieux". Ferré, cet autre libertaire de coeur, dirait qu'"avec le temps on n'aime plus" et c'est dommage, parce que le stoïcisme a l'avantage de ne nous faire agir que sur ce qui dépend de nous pour garder la sérénité, mais il y a des moments où l'on se dit que la sérénité est une ambition de feuille morte, que de trop se dégager n'engage à rien et que le stoïcisme, ça vous blase.
Et pourtant j'aurais moi aussi voulu "me mesurer à l'Homme révolté ", livre d'une extrême densité, mais derrière la compréhension de tous les délires humains, je le trouve trop sage, comme une philosophie de la morale éternellement provisoire.
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