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mardi 27 juin 2023

Jean-Michel Fauvergue et la radicalisation policière

https://www.philippebilger.com/blog/2023/06/entretien-avec-jean-michel-fauvergue-1.html#comments


Difficile et ridicule, quand on n'en est pas un soi-même, de commenter les propos d'un héros confronté au terrain qui raisonne d'après son expérience, et Jean-Michel Fauvergue en est certainement un. Il parle bien du rôle du chef à l'avant et à l'arrière, du succès qui est celui de l'équipe quand elle a réussi à "libérer les otages", ce qui est "sa première finalité", et de l'échec du chef quand l'opération a mal tourné. Mais comme le citoyen doit faire preuve d'esprit critique, je me risque à cet exercice aisé où l'art est difficile.


Jean-Michel Fauvergue explique que son plus grand succès est l'Hypercacher et fait l'impasse sur la guerre des polices, qui serait d'origine administrative et aurait interdit à la BRI et aux soldats de l'opération Sentinelle d'intervenir au début du massacre du Bataclan. Il n'en relève pas moins que le lieu de ce massacre fut pour lui le plus traumatisant et qu'il a du mal à en parler, c'est sans doute pourquoi il ne veut pas entrer dans la polémique. Jean-Michel Fauvergue, qui n'a pas pu faire grand-chose au Bataclan, a pourtant été tenu pour un grand chef du RAID et cette réputation a beaucoup compté dans sa médiatisation.


Je lui ai toujours trouvé des difficultés d'élocution qui ne pouvaient pas en faire un tribun politique (mais ça n'a rien à faire ici). Il nous expose  dans cet entretien, en ayant gagné en aisance depuis qu'il n'est plus député, qu'avec son copain du GIGn et parce qu'ils étaient copains, il est à l'origine d'un changement de doctrine qui consiste à supprimer la négociation dans le cas d'un islamiste radicalisé parce que ça fait perdre du temps et que la négociation permet au djihadiste de se mettre en scène et lui donne une tribune, comme elle en a donné une à Mohamed Merah, qui lui a permis de dire que nous aimions la vie et qu'il aimait la mort. 


Mais Jean-Michel Fauvergue nous expose surtout assez tranquillement que, dans un monde qui se radicalise, il ne faut pas donner leur chance aux radicalisés, une chance toute relative d'être pris vivant et mis à la disposition de la justice pour qu'ils puissent purger leur peine et au-delà regretter, se réformer et mesurer leurs actes.


Autrement dit, Jean-Michel Fauvergue assure qu'il faut très vite donner l'assaut au risque de pratiquer sans état d'âme la peine de mort contre les terroristes.


Il nous explique aussi qu'il l'a joué malin avec son copain du GIGN pour en convaincre Bernard Cazeneuve qui ne demandait qu'à être convaincu, comme Manuel Valls, avec sa théorie des "deux gauches irréconciliables". Ou la dérive d'une gauche qui s'est fait une publicité d'avoir aboli la peine de mort sous le premier Badinter (devenu entre temps, sous Macron, et au terme  d'une longue vie politique le fossoyeur  du code du travail, mais "Le droit avec Badinter et le tordu avec Roland Dumas" n'ont rien à faire ici), et une gauche qui achève de se perdre, après avoir substitué la rigueur au changement sous le premier Mitterrand, en rétablissant sans le dire, sous François Hollande devenu néo-conservateur et voulant pousser Barak Obama à s'engager dans la guerre en Syrie, la peine de mort contre les terroristes, là où la rétablir contre les pédophiles ne souffrirait pas de discussion.


Tout cela dans un contexte où, depuis 2013, la répression policière contre tout type de manifestants a considérablement progressé et où on essaie de mettre sur le même plan, particulièrement depuis "la Manif pour tous", la droite propre sur elle ou encore les femmes voilées et les détenteurs de kalachnikov.


Alors quand j'entends que Jean-Michel Fauvergue a mis au point en devenant député "par hasard", lui qui est toujours allé "au bout de ses rêves", un "continuum de sécurité", ce n'est pas de nature à me rassurer. 

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