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mercredi 9 décembre 2015

L'islam et la République


(En réponse au billet de Rudy consultable sous ce lien) :

 

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Cher Rudy,

 

Vous avez d'abord le mérite de la fidélité à vous-même, ce n'est pas si courant.Dans un billet datant de quelques années, vous vous en preniez à la manière dont François Fillon définissait de l'extérieur l'orthodoxie musulmane. On ne peut pas dire que ça se soit beaucoup amélioré depuis. Les politiciens ont gardé ce réflexe, ils ont même été récemment rejoints par le pape qui, s'autorisant sans doute de l'esprit d'Assise et de se rendre de temps à autre à la mosquée pour embrasser le Coran, exige des musulmans qu'ils se démarquent des terroristes ou de Daech. Les musulmans n'apprécient pas que des "mécréants" ou des non musulmans leur dictent la conduite à tenir en matière de religion. Cette infantilisation sous promesse de "pas d'amalgame" et dictée par le sentiment de supériorité des pédagogues autoproclamés des "Lumières" intellectuelles des "races supérieures" au "devoir [civilisateur]" (visez Léon Blum), nourrit légitimement le sentiment d'islamophobie de nos élites et des autorités politiques et médiatiques  éprouvé par nos concitoyens musulmans.

 

Au lieu de dire ce qu'elle tolère de l'islam au nom de l'ordre public, la République se demande si l'islam est soluble dans la République. Voulant ramener l'islam aux "valeurs" et aux "vertus républicaines", elle se permet d'expulser de France des imans dont le tort serait de ne pas prêcher en français ou de tenir des propos qui iraient contre l'orthodoxie républicaine. Elle pourrait s'opposer à ce que des imans soit mandatés par des puissances étrangères pour avoir pinion sur rue dans des mosquées de France. Mais comme elle est à vendre à la découpe aux monarchies du golfe, elle ne  veut pas leur interdire d'ouvrir des mosquées et  préfère exiger que les prédications soient prononcées en français pour ne pas se donner la peine d'envoyer des agents de renseignement arabophones, à supposer qu'il soit licite que des agents de renseignement  aillent surveiller des lieux de culte.

 

Elle organise l'islam en cooptant pour partie les membres du cfcm et en accréditant parmi les membres élus de cette institution crée sur (et à sa) mesure ceux dont le discours édulcoré lui semble compatible avec elle-même. Elle ne croit pas assez en la maturité des musulmans de France pour leur proposer  de former un concistoire.

 

La République est très chatouilleuse sur la laïcité.  Jamais elle ne demande pourquoi l'islamo-marxiste  du premier FLN n'a pu être tellement marxiste qu'il ait dû s'inféoder à  l'islam qui, s'il n'impose pas la charia dans toutes les sociétés dont il est la religion dominante, contrairement au fantasme occcidental,  interdit du moins à tout membre d'une société musulmane de se dire athée. La République  négocie des traités d'amitié avec l'Algérie et préfère vendre des armes à l'Arabie sahoudite plutôt qu'à la Russie,  elle soutient l'Allemagne dans sa volonté de renouer les négociations pour que la Turquie intègre l'Union Européenne, mais jamais elle ne demande à ces trois pays, l'Algérie, l'Arabie sahoudite et la turquie, sinon l'égalité et la sécurité confessionnelle pour les non musulmans, du moins la tolérance pour les chrétiens et leur culte.

 

La République ne se  souvient pas non plus comment, ancienne puissance coloniale, elle a intégré l'islam dans des pays où elle ne pouvait pas en faire abstraction. Elle ne rappelle pas que des partisans de l'Algérie française comme Jean-Marie le Pen militaient pour une intégration à part égale, avec liberté migratoire et confessionnelle dans les deux sens, des Français musulmans et des Français d'origine européenne.

 

La République enfin, qui ne se définit pas comme un régime politique, mais en désignant son ennemi, ne survit que de s'en être trouvé deux: l'islam radical et le Front national. Ces deux ennemis sont pourtant en guerre l'un contre l'autre, et la République ne prétend négocier un compromis avec aucun d'entre eux. C'est un peu comme en Sirie, où elle exclut que l'ordre soit rétabli et prétend combattre simultanément Bachar el-assad et Daech en prenant fait et cause pour une opposition modérée dont  la partie la plus visible serait une branche d'al-Qaïda qui serait devenue fréquentable comme le Hamas en Palestine. On pourrait croire que  cette inimitié républicaine contre ces deux pôles de radicalité islamiste et nationaliste date des attentats spectaculaires du 13 novembre qui n'ont pas fait plus de morts que ceux de Madrid et n'ont eu pour effet que de changer la majorité politique espagnole, ou  DE la percée  récente et prévisible du front national aux élections régionales,  qui n'a pas fait plus de voix, bien que ce ne soit pas vrai proportionnellement  au pourcentage des abstentionnistes et donc AU NOMBRE des votants. L'agitation comme "variable[s] d'ajustement du discours politique" de ces deux épouvantails que sont le Front national et l'islamisme, voire l'islam, n'a pas  changé de nature, elle n'a fait que s'intensifier parce que la crise de la république est telle  que son gouvernement ne tient plus qu'à ce fil, d'exciter verbalement les citoyens contre ces deux ennemis plus forts qu'elle.

 

"La République", c'est "SOS racisme". Or le coup de génie d'"SOS racisme" comme l'a FAIT REMARQUER Philippe de Villiers est d'avoir dit dans un lapsus révélateur dans l'intitulé même de son association qu'il fallait Sauver le racisme. "Sauver le racisme et le Front national pour que nous puissions nous agiter contre ces deux ennemis à la fois, tout en pouvant si l'étranger devient tropincontrôlable nous élever contre l'islam en nous parant de toutes les vertus républicaines DE l'amour de l'étranger, notre inassimilable semblable. Sauvez le racisme, le Front national et l'islamisme ou l'islam, à bas le fanatisme et vive nous, qui en sommes les régulateurs et, pour prix de cette régulation de salut public, devons, ce n'est que justice, terroriser médiatiquement, judiciairement et financièrement nos ennemis!"

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