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vendredi 2 octobre 2015

Avant la deuxième session du synode sur la famille

(Lire au préalable

 

 

 

Monsieur l'abbé,

 

J'espère ne pas faire une lecture superficielle de votre article en interjetant les quatre remarques suivantes:

 

    1. De quelque côté que l'on regarde, un chemin pénitentiel est toujours proposé pour l'accès éventuel à l'eucharistie des divorcés remariés. En son temps, vous avez critiqué sévèrement celui du cal Kasper que vous trouviez minimaliste. Il me semblait au contraire que la reconnaissance du péché entourant l'échec des divorcés remariés y était particulièrement mise en relief, avec un chemin de retour à la communion sacramentelle et avec la communauté de l'Eglise qui n'était pas sans rappeler le retour public que devaient faire les baptisés convaincus de péché public avant que n'existe la confession auriculaire. Sans vous chercher systématiquement querelle, je me demande si vous n'avez pas critiqué ce chemin pénitentiel par réflexe conditionné contre un prélat à qui vous reprochiez d'être un grand promoteur de l'oecuménisme. Mais surtout je me demande si la critique traditionaliste très acerbe contre le cardinal Kasper n'a pas abouti comme  souvent à l'effet  inverse  du but recherché, à savoir qu'on fait à présent une proposition encore plus minimaliste que ce chemin pénitentiel exigeant un haut degré de repentance. Cela a d'ailleurs commencé, en amont du synode et pour lui donner le ton de la volonté du pape, par le bradage des procès en nullité qui se feront plus vite que le prononcé du divorce civil et avec un certain mépris de la réalité des relations au nom de la maturité requise pour qu'un amour soit vrai et indissoluble.

 

    2. Il y a un curieux paradoxe à assister, aussi bien dans le motu proprio de Benoît XVI visant la libéralisation de la célébration de la messe de Saint-Pie V que dans cet instrumentum laboris,   au retour du curé dans sa charge apostolique et pastorale au moment même où, au nom de la collégialité sous le pontificat de françois, dans les faits sous Benoît XVI, le rôle propre du curé comme "empereur en sa paroisse" s'était vu confisquer par les évêques et par les conférences épiscopales, évêques qui ont fait capoter le motu proprio de benoît XVI par une pratique très dirigiste de l'administration des sacrements dans les diocèses.

 

    3. Au cas où le second schéma serait retenu par le synode, c'est-à-dire celui qui donnerait le dernier mot de la discipline du Sacrement eucharistique au curé pour les divorcés remariés, cela ne ferait qu'entériner en l'officialisant une pratique que j'ai toujours vue être observée, depuis au moins la fin des années 1970 où j'ai commencé à m'intéresser au sujet. En pratique, un pénitent divorcé va voir son curé, et c'est lui qui prend sur lui de lui permettre ou non de communier. Et la permission lui est généralement accordée par le curé au nom de la tradition miséricordieuse de l'Eglise.

 

    4. Je voudrais enfin dire un mot de la Miséricorde elle-même.

 

Le chrétien ne mesure pas sa grandeur. La Miséricorde ne consiste en effet pas seulement à ce que Dieu mette loin de lui son péché, c'est-à-dire loin de sa conscience immédiate pour ne pas asphyxier la psychologie du pécheur; mais Dieu efface et oublie le péché.

 

Or au lieu d'entrer dans  le pardon et dans l'oubli de dieu de son péché, le chrétien continue de le ressasser en regardant en arrière avec une certaine complaisance au mal. Or il est encouragé dans cette complaisance à ne pas renaître parce que l'Eglise lui suggère qu'il doit s'assurer lui-même qu'il est en état de Grâce et non de péché grave ou mortel. Le pécheur pardonné vit dans une tension existentielle qui efface le pardon de Dieu et qui est d'autant plus déséquilibrée que le chrétien n'est pas son propre juge. Il faudrait sans doute nuancer ce dernier propos avec ce qui se passera au Jugement dernier, mais il est globalement conforme à ce que la Révélation nous enseigne.

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