Dialogue avec Marquandier sur "le Forum catholique". Les lignes qui suivent sont une réponse à son message que l'on peut trouver ici:
"C'est un mystère. Que vous le reconnaissiez me pousse à m'abstenir du tittre que je voulais donner à ma réponse avant de lire votre message. Je voulais vous répondre que vous imaginiez Dieu comme un tortionnaire. Et que ce soit enbonne et saine doctrine catholique, je l'ai concédé par avance en l'accordant au pasteur qui l'a professé, reconnaissant que c'était de l'augustinisme à l'état pur, et je ne suis pas de ceux qui accusent saint Augustin d'avoir inventé la doctrine du péché originel, car celle-ci se trouve déjà dans saint Paul. Mais je vous dirais pour commencer que saint Paul, saint Augustin et Martin Luther étaient des hommes terriblement écartelés, on ne peut pas projeter cet écartèlement d'une conscience torturée en Dieu, or Dieu serait écartelé s'Il acceptait de créer des êtres naissant coupables devant Lui pour les plonger dans une tourmente inextricable
Mais raisonnons malgré tout et même si le Concile de Trente traite d'anathème le raisonneur, où l'on voit que Vatican II a eu raison de choisir de s'exprimer d'une autre manière! Car après tout la raison a été donnée à l'homme pour qu'il s'en serve, n'est-ce pas?
Et si le péché originel, non pas avait été créé par l'homme pour comprendre les saintes Écritures, mais lui avait présenté cet avantage de se soustraire à exprimer, sinon une condamnation de l'oeuvre de Dieu (qui est l'homme pour juger Dieu?), mais au pire à conclure que l'homme est naturellement mauvais et au mieux à qualifier la nature humaine de bonne ou de mauvaise. Autrement dit, ce qui s'est joué après la manducation du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal a été, pour Dieu (c'est mon hypothèse) de L'obliger à catégoriser sa Création (Lui qui est bon ne la voyait que bonne), et pour l'homme de s'abstenir de la disqualifier. Il voulait discerner et son orgueil mortifié a dû s'abstenir de juger.
Vous citez le psaume 50 avec la traduction: "Ma mère m'a conçu dans le péché" alors que sa traduction la plus courante est: "J'étais pécheur dès le sein de ma mère". Cela me rappelle une prédication d'un pasteur évangélique du seul culte de la mega church de Mulhouse à laquelle j'aie assisté, mais qui ma marqué. Ce pasteur est celui qui a structuré cette Eglise par où s'est étendu le Covid alors qu'il prétendait que Jésus guérissait dans son église, Samuel Peterschmitt. Il supposait que, si Jessé n'avait pas convoqué David à comparaître devant Samuel pour être éventuellement choisi comme roi d'Israël, c'est qu'il avait des soupçons que David était un fils naturel, ce que David aurait avoué dans son psaume par cette phrase: "J'étais pécheur dès le sein de ma mère" ou "ma mère m'a conçu dans le péché." De quoi contrebattre un peu trop facilement et pour je ne sais quel bénéfice le dogme du péché originel qui a des racines aussi bien spirituelles qu'anthropologiques autrement profondes.
Vous comparez l'amour de Jésus pour Lazare à celui que nous pouvons avoir pour des "morts spirituels" non encore baptisés, c'était le contexte de la parole du pasteur luthérien que j'ai cité. À cette différence près que ce pasteur parlait des non baptisés. La mort de Lazare a tellement ému Jésus parce qu'Il l'a aimé vivant et que sa mort L'a affligé.
Maintenant (et parce que j'aime prendre des risques intellectuels), je vous dirais que vous rappelez que Jésus et Marie sont nés préservés du péché originel alors que saint Jean-Baptiste n'a pas bénéficié de cette grâce, ce qui peut expliquer qu'il ait erré sur la fin de sa vie en doutant de l'identité de l'Agneau de Dieu qu'il avait pourtant désigné au point de s'attirer ce résumé de son destin par Jésus: "Il n'y a pas plus grand que Jean-Baptiste et pourtant le plus petit dans le Royaume de Dieu est plus grand que lui", oracle tout différent que le pardon accordé immédiatement au bon larron qui reconnut Son Identité, où l'on pourrait voir un soupçon d'orgueil humain, mais passons outre et ne blasphémons pas.
À ses disciples venus lui faire part des doutes de leur maître incarcéré, Jésus fait une réponse qui n'est aujourd'hui plus satisfaisante ni probante: "Les aveugles voient, les boiteux marchent." Si l'on devait demander aujourd'hui des preuves de notre rédemption, on ne pourrait guère alléguer celles-ci et comme vous n'êtes pas sans le savoir, c'est un aveugle qui vous écrit, à qui la cécité n'a jamais provoqué de manque connu de lui. Je suis aveugle de naissance, je n'ai jamais rien vu et ne pas voir ne m'a jamais manqué, au moins consciemment.
Maintenant autre chose. Lorsque l'Église dit que Jésus n'a jamais péché, si on s'avisait de prouver si on est d'accord avec cela compte tenu de son comportement dans l'Évangile, on aurait du mal à justifier certains de ses accès de colère et de dureté, y compris envers sa mère. Ma grand-mère me disait qu'il "rabrouait" volontiers ses disciples, je me souviens de ce verbe, c'est certainement la première fois que je l'ai entendu employer.
Et troisième paradoxe. Quand l'Église dit que "Dieu s'est fait homme à l'exception du péché", cela met un tel bémol à l'Incarnation que tout se passe comme si (j'ai horreur de cette périphrase qui prétend décrire le réel en faisant comme s'il était inatteignable)Jésus s'était fait homme à l'exception d'une bonne moitié de la nature humaine. Mais comme me répondit quelqu'un à qui je le faisais observer, "nous ne sommes pas à un oxymore près". La clef de ce mystère est peut-être que Jésus a choisi de s'incarner dans la nature humaine telle que Dieu son Père la projetait et non dans la nature humaine déchue et métamorphosée par le péché d'Adam."